« L’objectif n’est pas de faire rustine » - L'Infirmière Magazine n° 374 du 01/09/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 374 du 01/09/2016

 

INTERVIEW : CLÉMENCE MAINPIN DIPLÔMÉE DE L'ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES EN SANTÉ PUBLIQUE (EHESP), CHEFFE DE PROJET MINISTÉRIEL SUR LES GHT À LA DGOS

DOSSIER

F.V.  

Directrice d’hôpital, Clémence Mainpin a été nommée, en avril dernier, cheffe de projet ministériel sur les GHT à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS). Un dossier qu’elle connaît dans ses moindres replis.

L’INFIRMIÈRE MAGAZINE : Pouvez-vous nous présenter l’équipe projet et tracer les grandes lignes de votre mission ?

CLÉMENCE MAINPIN : L’équipe est pluriprofessionnelle et reflète toutes les dimensions de l’hôpital : le médical avec le Dr Patrick Jourdain, le paramédical, avec Brigitte Scherb, ancienne coordinatrice générale des soins des hôpitaux universitaires Paris-centre, et l’administratif avec Stéphanie Saulnier, juriste. Notre mission consiste notamment à coordonner l’action des pouvoirs publics, qu’il s’agisse de la DGOS, de ses opérateurs et partenaires, telles l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux, l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation, la HAS, l’EHESP… qui concourent à la mise en œuvre des GHT. Nous sommes aussi en lien avec le comité national de suivi du GHT et travaillons avec les ARS, qui, elles-mêmes, collaborent avec les délégations régionales de Fédération hospitalière de France afin, entre autres, de construire des outils d’accompagnement, former et assister localement les acteurs qui vont être responsables de la mise en œuvre des GHT. À la DGOS, nous sommes conscients que l’un des principaux enjeux est de convaincre les professionnels que le GHT est leur outil de travail. Nous finalisons d’ailleurs un plan d’information et de communication pour essayer « de descendre d’un cran » dans les organigrammes afin que les GHT ne soient ni perçus ni vécus comme l’expression de décisions prises par un directoire.

L’I. M. : Comment les instances représentatives des infirmières ont-elles été associées à la création des GHT ?

C. M. : Lors de l’élaboration de la loi et des textes réglementaires, la profession infirmière a été associée au niveau national via les organisations professionnelles et syndicales. Elles l’ont également été au niveau de leur établissement puisque les projets constitutifs de GHT ont été présentés en comité technique d’établissement où les IDE sont représentées par leurs organisations syndicales et devant la commission paramédicale. Par ailleurs, les paramédicaux vont être associés à la gouvernance des GHT à deux titres : d’une part, tous vont devoir mettre en place une instance paramédicale (la commission de soins infirmiers, de rééducation et médico-technique de groupement, CSIRMT), qui sera ensuite déclinée dans chaque établissement. D’autre part, un des présidents de la CSIRMT fera partie du comité stratégique du GHT. Il sera, avec les autres présidents de commissions, à la manœuvre de tous les documents de cadrage qui vont organiser, structurer la vie et le fonctionnement du GHT.

L’I. M. : Quelle va être la place des infirmières dans la construction du projet de soins partagé (PSP) ?

C. M. : Elle sera essentielle, car ce sont les paramédicaux qui doivent l’élaborer et personne d’autre. Je précise que le PSP est obligatoire, et devra, comme le projet médical partagé, être finalisé au plus tard le 1er juillet 2017. Chaque PSP sera le fruit des travaux des équipes paramédicales concernées. Ainsi, tout professionnel paramédical aura son mot à dire sur les aspects qui intéressent sa profession, son exercice et ses pratiques qui vont se mettre en œuvre à l’échelle du GHT. Seront concernés, par exemple, l’harmonisation des protocoles de prise en charge, l’organisation graduée des prises en charge, mais aussi, le développement de la télémédecine ou celui de l’ambulatoire, ou encore la déclinaison des protocoles de coopération.

L’I. M. : Nombre d’IDE craignent de devoir « tourner » au sein de leur GHT. Leur inquiétude est-elle fondée ?

C. M. : L’objectif des GHT n’est pas de déplacer des personnels pour faire rustine sur des pénuries de compétences. Les GHT n’ont pas non plus vocation à porter des réorganisations massives sorties de nulle part. Tout changement dans les organisations et les pratiques ne pourra être que le résultat du projet médico-soignant partagé. Ainsi, dans certains GHT, l’évolution des organisations pourra se limiter à une convergence des protocoles de prises en charge ; dans d’autres, des équipes médicales voire paramédicales communes au groupement pourront être créées, mais cela ne ce décide pas a priori. Ce sera la déclinaison de ce que les acteurs auront décidé de faire ensemble.