DIANE LESBOUEYRIES INFIRMIÈRE DANS LES CAARUD AURORE ET PROSES (SEINE-SAINT-DENIS) - L'Infirmière Magazine n° 369 du 01/03/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 369 du 01/03/2016

 

RENCONTRE AVEC

CARRIÈRE

PARCOURS

Propos recueillis par F. R.  

Mon arrivée en Caarud ? C’est tout un cheminement », lance d’emblée Diane Lesboueyries, qui a commencé à travailler à 16 ans en clinique vétérinaire avant de se lancer dans des études d’infirmière et d’opter pour la psychiatrie. « C’est la philosophie qui m’y a conduite, à travers des lectures personnelles », explique cette admiratrice de Schopenhauer, qu’elle estime autant que Freud ou Jung. C’est à La Courneuve que l’infirmière a fait ses premiers pas. Une voie qu’elle a choisie pour son appétence à travailler la relation. « Des patients psychotiques et toxicomanes, c’était mon quotidien. On les abordait alors comme des personnes en souffrance, on adoptait une approche globale », se souvient-elle.

→ De l’humain, d’abord. En désaccord avec les évolutions du service public et après avoir goûté à l’exercice privé où « la notion de rentabilité prime parfois sur la qualité humaine », l’infirmière, en grand questionnement sur son métier, arrive par hasard en Caarud, via une relation. « Je connaissais peu la réduction des risques, mais ça m’a interpellée », résume l’infirmière, qui l’avait pratiquée sans le savoir au début des « années sida » en effectuant de l’échange de seringues. Recrutée à mi-temps à Aurore, à Aulnay-sous-Bois, sur une création de poste, elle y a redécouvert, auprès d’une petite équipe de non-soignants et d’usagers de drogues très précarisés, ce qui lui manquait : de l’humain. « Paradoxalement, c’est dans la misère que j’ai trouvé la plus grande richesse ! », s’étonne-t-elle. Engagée de suite sur un autre mi-temps à Proses, elle est ravie de devoir aujourd’hui retrousser ses manches pour lancer des actions de prévention, de dépistage, d’orientation, de soins, des partenariats… « Je sollicite mes connaissances, mes compétences, les bonnes volontés, il y a plein de choses à faire, c’est très motivant », assure-t-elle.

→ Un échange de savoir-faire. En Caarud, face à des usagers méfiants vis-à-vis du monde soignant, le travail sur la relation est la priorité. L’approche s’effectue par petites touches, autour d’échanges informels, d’un « café-clope »… Aborder les questions de santé est progressivement suggéré. « Je fais alors un peu le tour des antécédents, je prends la tension, la température, le poids… Je regarde l’état des bras, des jambes… Petit à petit, la personne en vient à parler de ses consommations », explique Diane. Un vrai dialogue s’instaure alors. « J’explique aux patients qu’on est dans un partage de connaissances », précise-t-elle. L’usager est considéré comme technicien de sa pratique et l’infirmière lui reconnaît clairement ce savoir-faire. « Quand je prends une saturation, je lui explique le résultat, ce qui est en jeu, afin que cela ait du sens pour lui. De même, quand il me dit comment il se pique, je cherche à savoir pourquoi il le fait de telle ou telle manière et, si besoin, je révise certaines choses », développe l’infirmière qui apprécie de pouvoir prendre le temps nécessaire pour connaître le parcours de son patient, lui apporter finement des conseils de réduction des risques, l’encourager en reconnaissant son expertise, lui offrir d’approfondir la démarche avec un éducateur.

→ Un travail collectif. Parler du soin se révèle souvent pour les usagers un biais pour parler d’eux. « Mon expérience en psychiatrie me permet de commencer à éveiller chez la personne un regard sur son parcours et de pointer que ce n’est pas une finalité en soi. Parfois, d’un coup, s’opère un déclic et surgit l’envie de monter un dossier d’aide sociale, d’hébergement, de rencontrer la psychologue, de s’informer sur un sevrage… », explique-t-elle. L’équipe entière est alors sollicitée et œuvre de concert. « En Caarud, une infirmière est aussi une passerelle vers les autres professionnels. C’est une posture, un savoir-être, un savoir-faire. Mais tout est dans le partage. Sans échange, l’infirmière n’existe pas. On apprend énormément des usagers et des professionnels non soignants. »

MOMENTS CLÉS

1991 : Diplôme d’infirmier de secteur psychiatrique ; DE en 2001.

1991-2007 : Exerce à l’établissement public de santé mentale de Ville-Évrard (Neuilly-sur-Marne).

2008-2014 : Travaille en clinique psychiatrique en tant qu’IDE puis de coordinatrice, ainsi qu’en Ehpad et en Ssiad.

2014 : Intègre les Caarud Aurore et Proses.

Articles de la même rubrique d'un même numéro