Les traitements médicamenteux - L'Infirmière Magazine n° 363 du 01/09/2015 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 363 du 01/09/2015

 

FORMATION

BONNES PRATIQUES

En cas d’agitation aiguë, une sédation médicamenteuse est parfois nécessaire. Un traitement qui nécessite une surveillance accrue pour prévenir la survenue d’effets indésirables parfois graves.

Lorsque l’agitation aiguë nécessite une sédation médicamenteuse, le traitement doit avoir un effet sédatif puissant et rapide sans pour autant présenter d’effets indésirables graves. La voie orale est privilégiée, mais elle est parfois difficile à faire accepter et son effet sédatif est souvent insuffisant. La voie intramusculaire est alors la mieux adaptée à un contexte d’agitation. En revanche, un sédatif injectable est recommandé en première intention en cas d’agitation sévère avec danger pour le patient ou pour l’entourage.

BENZODIAZÉPINES

• Une efficacité relative. Les benzodiazépines (BZD) sont d’utilisation facile et peu risquée, mais leur efficacité est très variable d’une molécule à l’autre. Elles ont une action myorelaxante, anxiolytique, sédative, hypnotique, anticonvulsivante et amnésiante.

• Indications. Les BZD sont utilisées en cas d’agitation d’origine névrotique ou réactionnelle (lire p. 44), ou associées à une hydratation en cas d’ivresse agitée. L’agitation d’une personne impulsive sera plutôt traitée avec un neuroleptique sédatif à cause de l’effet désinhibiteur des BZD qui peut aggraver l’agitation (effet paradoxal). Le diazépam (Valium et génériques) et le lorazépam (Ativan, Temesta et génériques) sont utilisés par voie orale ou intramusculaire.

• Surveillance du traitement. Les effets indésirables des BZD mêlent somnolence, troubles cognitifs, confusion et perte de la coordination des mouvements volontaires avec risque de chute (ataxie). Il y a un risque de pneumonies par fausse route de la salive accumulée à cause de la diminution de la déglutition. Et un risque de dépression respiratoire, surtout en cas de prise de substance sédative ou d’alcool.

NEUROLEPTIQUES SÉDATIFS

Dans l’agitation aiguë, les neuroleptiques (NLP) sont utilisés pour leur action sédative.

• Indications. Dans l’ivresse pathologique de type confuso-onirique, compte tenu du risque de dangerosité, les NLP sont préférés aux BZD. Exemple : tiapride (Tiapridal) avec bilan hospitalier de 2 à 3 jours. Dans le traitement de l’onirisme, on utilisera plutôt l’halopéridol (Haldol) que les phénothiazines (Largactil, Tercian, Neuleptil…), trop sédatives. À l’inverse, une agitation liée à des troubles psychotiques ou thymiques sera traitée en urgence par des neuroleptiques sédatifs (phénothiazines)(1). En pratique, les stratégies thérapeutiques préconisées actuellement sont la loxapine (Loxapac) par voie intramusculaire (IM) et le midazolam (Hypnovel) par voie IM ou par voie intranasale. Ces traitements sont efficaces et aucun des deux n’est associé à un risque vital majeur(2).

• Effets indésirables et surveillance :

• l’hypotension artérielle est la complication la plus fréquente et impose une surveillance hémodynamique rapprochée (tension artérielle, ECG, saturation en O2) ;

• les dyskinésies aiguës sont le plus souvent corrigées par l’injection d’un antiparkinsonien anticholinergique (tropatépine, trihexyphénidyle). Si la dystonie (contractions musculaires involontaires et douloureuses) ne cède pas, les BZD (diazépam) sont préconisées en seconde intention ;

• l’activité anticholinergique de la plupart des neuroleptiques abaisse le seuil épileptogène et peut favoriser la survenue de crises comitiales ;

• le syndrome malin des neuroleptiques (SMN) est beaucoup plus rare et peu documenté dans un contexte de prise unique sur un état d’agitation aiguë. Le patient qui présente des signes évoquant un SMN ou une hyperthermie inexpliquée doit bénéficier d’une consultation médicale en urgence ;

• risque d’allongement de l’intervalle QT et/ou de torsade de pointe : la plupart des neuroleptiques peuvent être responsables d’un allongement de l’intervalle QT à l’électrocardiogramme (ECG), lui-même à l’origine de torsades de pointes(3). Une surveillance régulière de l’ECG, un contrôle de l’équilibre ionique et des interactions médicamenteuses sont nécessaires afin de dépister et de prévenir le risque d’arythmie cardiaque. Les torsades de pointe sont un type particulier de tachycardies ventriculaires, souvent fugaces, mais qui peuvent aussi entraîner une lipothymie ou une syncope ou évoluer vers une fibrillation ventriculaire mortelle (rares cas de morts subites avec certains neuroleptiques).

1 - « Agitation et délires aigus. Synthèse clinique et thérapeutique : De la plainte du patient à la décision médicale », Facultés de médecine de Toulouse.

2 - « Conduite à tenir devant une agitation aux urgences », F. Moritz, J. Jenvrin, S. Canivet, D. Gerault, Service d’accueil et d’urgences du CHU de Rouen, août 2004.

3 - Cf. la liste publiée par l’Agence nationale de sécurité du médicament, Savoir+, p. 60.