Mobilisation générale - L'Infirmière Magazine n° 360 du 01/05/2015 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 360 du 01/05/2015

 

PRIVÉ SARCELLOIS

Dossier

En matière de développement durable, l’hôpital de Sarcelles avance sur tous les fronts en sensibilisant son personnel et ses partenaires.

À l’Hôpital privé nord parisien (HPNP), énergie, achats, déchets, qualité de la restauration, bien-être et santé au travail s’inscrivent dans le cadre d’une dynamique continue bénéfique pour tous. Dans cet établissement de santé d’Île-de-France (95), qui compte 308 lits et emploie 177 IDE (dont 42 spécialisés), la prise en compte du développement durable se décline à tous les niveaux. « Le développement durable ne peut pas être une lubie de la direction générale. Il concerne tous les salariés, soignants ou non-soignants, souligne Ségolène Benhamou, PDG de l’hôpital. Dans un premier temps, nous l’avons abordé sous l’angle du bâtiment et de la recherche des énergies alternatives, lors de la rénovation du site qui existe depuis cinquante ans. Puis, par le volet des ressources humaines, via la qualité et le bien-être au travail. Je suis convaincue que les mesures prises jouent sur la motivation des équipes et l’ambiance générale, voire se ressentent jusque chez le patient. Il faut faire du développement durable l’affaire de tous, pas une chose en plus. » Pour y parvenir, l’HPNP se fait accompagner depuis 2009 par le C2DS afin de structurer sa démarche et de ne pas se focaliser sur les aspects techniques. Il a inscrit le sujet dans ses deux derniers projets d’établissement (2010-2014, 2015-2019), avec une attention portée à la santé au travail. Depuis un an, les salariés bénéficient de consultations gratuites d’ostéopathie une fois par semaine. L’établissement s’est également lancé dans une campagne « Hôpital non fumeur » et apporte son soutien aux salariés souhaitant arrêter de fumer.

Entré en 1999 comme technicien de laboratoire, Franck Paule est devenu hygiéniste, puis gestionnaire des risques. Il a été nommé référent développement durable en novembre 2009. « Je reçois chaque nouveau salarié et le sensibilise aux actions menées, explique-t-il. Pour nos déchets, nous avons créé 25 filières de tri sur le site. Cela implique pour tous une connaissance des procédures en place. » De 2011 à 2013, ce sont 50 IDE et 23 aides-soignants qui sont passés dans son bureau. « Nous réalisons des journées mensuelles “développement durable” sur le tri, les matériaux utilisés et les émissions de COV, la qualité de l’air intérieur, l’éco-conduite menée par notre prestataire de transport sanitaire. C’est un moyen de faire des piqûres de rappel, mais aussi de constater les axes d’amélioration et d’être force de proposition. Pour que le tri des déchets fonctionne bien, il est nécessaire de créer du lien entre tous les corps professionnels. Chacun doit prendre ses responsabilités par rapport à ses actes et considérer la totalité de la chaîne des déchets », ajoute le référent.

Des déchets réduits et recyclés

Depuis 2013, l’hôpital a passé un partenariat avec Recyclum pour la revalorisation de ses déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), soit 500 kilos cette année-là. Dans le cadre d’une expérimentation, il a mis en place en 2011 avec Sodexo, qui assure la restauration du personnel et des patients, une politique de réduction des déchets alimentaires : tout le monde trie les déchets au self. Les biodéchets (organiques) sont ensuite introduits dans un déshydrateur thermique adapté au volume de l’établissement. Au final, 30 kilos de déchets alimentaires produisent 10 kilos de résidus secs. Lesquels, une fois analysés, tamisés et compactés, peuvent être utilisés comme engrais organiques pour l’agriculture. Au-delà de la diminution du volume des déchets (de un à trois containers quotidiens), cette action a permis de réduire la manutention pour le personnel et, de fait, les risques de troubles musculo-squelettiques (TMS).

Des achats éco-responsables

En 2013, l’hôpital a évalué ses partenariats avec les sous-traitants qui interviennent sur de multiples domaines : les transports sanitaires, la restauration, les déchets hospitaliers, le linge, les consommables d’hygiène, les Dasri, les produits chimiques, le biomédical et le bionettoyage. L’objectif est de les pousser à agir, ainsi que les fournisseurs, en intégrant des critères éco-responsables pour répondre à la charte d’achats de l’hôpital. Une charte qui systématise désormais l’utilisation du tampon éco-achats (il comprend cinq critères : énergie, coût global, étiquetage, emballage, bilan carbone) lors des référencements. Concrètement, le houssage des chariots, auparavant en film plastique, a été remplacé, en 2014, par des housses en textile, qui sont réutilisées après nettoyage et dans le respect des barrières microbiologiques. Pour toute rénovation d’une unité ou d’un service, les fournisseurs doivent répondre à trois volets : la lutte contre les infections nosocomiales, l’ergonomie et le développement durable qui cible les colles, les matériaux utilisés et les émissions de composés organiques volatiles (COV). Grâce au travail de la cellule R&D et au partenariat avec le fabricant, les chambres du service SSR sont toutes équipées de poignées en cuivre dotées de propriétés antibactériennes, une façon de lutter contre les infections nosocomiales. Pour le bionettoyage, l’utilisation de franges pré-imprégnées a permis de réduire le volume d’effluents utilisé de 93 m3 sur l’année, ainsi que les risques de manutention et d’émanations pour les salariés. En 2014, 53 % des références en bionettoyage étaient des produits écolabellisés, soit 67,4 % du volume commandé dans l’année. Depuis, une démarche est en cours avec la centrale d’achats, afin de prendre en compte le développement durable chez tous les fournisseurs. L’objectif est d’avoir une vision globale de chaque activité. Il faut tenir compte du coût et de la qualité du produit ou du matériel, associés au minimum d’effets sur la santé des salariés. « C’est la réflexion globale et structurelle sur l’environnement qui permet de trouver des solutions et d’identifier les comportements sur lesquels nous pouvons intervenir », estime Franck Paule.

Une pratique plus réfléchie

Pour Dominique Vandendriessche, IDE depuis 1981, directrice des services de soins infirmiers et référente qualité, « le lien entre le développement durable et les soins se fait à tous les niveaux ». Se questionner sur le volume de compresses utilisées, réaliser le tri des déchets infectieux, lutter contre les infections nosocomiales, rendre le patient actif dans sa prise en charge - grâce à un programme d’éducation thérapeutique - afin de limiter les jours d’hospitalisation dans les services de dialyse, veiller au respect de la manipulation des produits détergents et désinfectants, sources d’allergies et de réactions cutanées pour les agents des services hospitaliers (ASH)… Si cela semble aller de soi, elle reconnaît qu’« il faut faire preuve de vigilance au quotidien. Il est nécessaire de rappeler les quantités de produit à utiliser et d’évaluer les connaissances. C’est un des objectifs des 45 évaluations de pratiques professionnelles ». Les piqûres de rappel, les formations et l’accompagnement sur le terrain sont indispensables. Dans le cadre d’une réflexion collective menée sur la pose d’une chambre implantable dans le service de cancérologie, un set sur-mesure a été confectionné en collaboration avec une infirmière hygiéniste du réseau du Val-d’Oise. Mieux adapté, il contient moins de compresses, moins d’adhésifs, un champ unique troué au lieu de deux, une seringue pré-remplie de sérum… Le résultat final, c’est une pratique professionnelle améliorée et moins de matériels non utilisés et jetés, donc une réduction du volume de déchets et des économies de traitements pour l’établissement.

EN CHIFFRES

L’HPNP c’est :

→ 113 tonnes de Dasri ;

→ 60 m3 de Daom ;

→ 25 filières de tri, dont 10 tracées ;

→ 1,6 tonne de biodéchets ;

→ 12,5 % d’énergie renouvelable ;

→ 20 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre en 4 ans ;

→ 362 litres d’eau par journée d’hospitalisation.

NUTRITION

En avant toute !

Dans le cadre du Plan national nutrition santé (PNNS), l’HPNP et Sodexo ont signé en janvier une charte d’engagement volontaire pour la prévention nutritionnelle. L’objectif est de mettre en place des actions concrètes : une enquête « Qualité nutrition » auprès des convives du restaurant du personnel ; une exigence dans la composition des sandwichs (moins de matières grasses et de sel) ; un affichage de leurs apports nutritionnels ; des conseils donnés en atelier pâtisserie ; l’affichage dans les postes de soins, six fois par an, du « Mot de la diététicienne ». Cette démarche concerne tout le personnel, soignant et non soignant. Elle s’intègre dans la politique d’équilibre alimentaire et de réduction de l’impact environnemental des activités de restauration.