La cystite - L'Infirmière Magazine n° 351 du 15/09/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 351 du 15/09/2014

 

FORMATION CONTINUE

LE POINT SUR

DENIS RICHARD  

La cystite communautaire de l’adulte est une inflammation de la vessie et de l’urètre d’origine infectieuse, affectant avant tout la femme.

Généralement bénigne, elle peut toutefois devenir handicapante par la fréquence de ses récidives. Son traitement antibiotique a fait l’objet d’une révision récente.

DESCRIPTION

La cystite est avant tout une pathologie de la femme, divers facteurs favorisant la survenue de l’infection :

– urètre court facilitant la progression ascendante de bactéries vers la vessie ;

– rapports sexuels, surtout associés à l’usage de spermicides ;

– prolapsus vésical chez la femme âgée altérant la vidange urinaire et prédisposant à l’infection ;

– compression vésicale pendant la grossesse, favorisant une stase urinaire.

Le pic de prévalence se situe entre 20 et 30 ans puis en période post-ménopausique. Chez l’homme, la cystite est rare. Sa fréquence augmente toutefois après 50 ans, en association à une pathologie prostatique.

Physiopathologie

L’arbre urinaire est stérile, exclusion faite de l’urètre distal que colonisent des micro-organismes d’origine cutanée, digestive ou périnéo-génitale. La longueur de l’urètre, la fréquence et l’abondance des mictions, l’intégrité de la muqueuse vésicale et la composition de l’urine constituent autant de moyens préservant des infections vésicales. Lorsque ces protections ne sont plus suffisamment efficaces, ces micro-organismes peuvent migrer vers l’urètre proximal puis envahir la vessie, déclenchant alors une cystite. Ils peuvent ensuite coloniser les reins ou la prostate.

Clinique

On distingue trois formes de cystite.

→ La cystite aiguë simple, qui ne concerne que la femme (chez l’homme, une cystite est à risque de complication, cf. infra). Ses signes, survenant généralement sans prodromes, restent purement urinaires et isolés : outre une urine trouble, elle associe une gêne ou des douleurs sus-pubiennes, une dysurie, une pollakiurie, des brûlures et une impériosité mictionnelles. Il n’y a ni fièvre (sauf infection du parenchyme vésical associée), ni douleurs lombaires ni syndrome inflammatoire. Les complications possibles sont une hématurie, une pyélonéphrite et, plus fréquemment, une (des) récidive (s).

→ La cystite aiguë récidivante caractérisée par la récurrence d’au moins 4 épisodes de cystite aiguë simple sur 12 mois. La prise en charge de cette présentation souvent invalidante est facilitée par la responsabilisation d’une patiente qu’il faut savoir rassurer : une infection urinaire basse même multirécidivante n’est pas un facteur de risque d’insuffisance rénale.

→ La cystite à risque de complication (appelée il y a peu « cystite compliquée ») est une cystite survenant chez un patient présentant au moins un facteur de risque de complication : sexe masculin, hydratation insuffisante et/ou âge (> 65 ans avec critères de « fragilité »(1) ou > 75 ans) et/ou insuffisance rénale chronique sévère (tout facteur de stase urinaire), anomalie organique ou fonctionnelle de l’arbre urinaire (lithiase, reflux, tumeur, etc.), immunodépression grave, etc(2). Ce facteur de risque rend la cystite potentiellement plus sévère et plus délicate à traiter.

Chez l’homme, dysurie, pollakiurie et brûlures suggèrent une autre affection (prostatite, urétrite, infection sexuellement transmissible) : une fois celle-ci éliminée, un diagnostic de cystite à risque de complication pourra être retenu.

Diagnostic

Évoqué par la clinique, le diagnostic de cystite est étayé par la bandelette test-urinaire (cystite simple) ou l’examen cytobactériologique de l’urine (ECBU) (toute autre situation, ou test par BU non discriminant).

→ La bandelette urinaire (BU) multiréactive (Combur Test LN, Exacto Uritop, Multistix 8 SG, Urell test, Uritest, etc.) confirme le diagnostic clinique de cystite simple par la mise en évidence de leucocytes et de nitrites(3) dans l’urine. Le virage de la plage des leucocytes témoigne d’une pyurie, celui de la plage des nitrites d’une bactériurie. Une BU positive (leucocytes + et nitrites +) est en faveur du diagnostic de cystite dans les deux sexes ; une BU négative (leucocytes – et nitrites -) permet d’exclure le diagnostic de cystite avec une probabilité > 95 % chez la femme (mais pas chez l’homme).

→ L’examen cytobactériologique des urines (ECBU) est indiqué en cas de résultat négatif ou douteux de la bandelette, et face à une cystite récidivante ou à risque de complication.

TRAITEMENT

Le traitement antibiotique de la cystite, probabiliste, soulage rapidement la douleur et prévient les complications. Il peut s’accompagner de la prise d’antalgiques (paracétamol) et/ou d’un antispasmodique (phloroglucinol comme le Spasfon) et d’une hydratation permettant d’obtenir une diurèse > 2l/j, en elle-même antalgique.

→ Cystite simple : malgré une évolution spontanément favorable dans 25 % à 45 % des cas, l’antibiothérapie reste justifiée :

– 1ère intention. Prise unique de fosfomycine-trométamol (Monuril, Uridoz et génériques) ;

– 2ème intention. Pivmécillinam (Sélexid) sur 5 jours ;

– 3ème intention. Fluoroquinolone (ciprofloxacine, ofloxacine) en prise unique ou nitrofurantoïne (Furadantine) sur 5 jours.

Un ECBU est réalisé si les signes cliniques persistent au-delà de 3 jours ou en cas de récidive précoce dans les 2 semaines.

→ Cystite simple récidivante : chaque épisode est traité comme une cystite aiguë simple. Lors de la réapparition des symptômes, et après réalisation d’un ECBU de confirmation du diagnostic, la patiente réalisera elle-même à chaque récidive une BU. Un traitement auto-administré lui sera proposé, avec réévaluation périodique de la procédure par le médecin. Certaines situations justifient une antibioprophylaxie continue ou discontinue.

→ Cystite à risque de complication : l’antibiothérapie, différée pour adapter le traitement à l’antibiogramme, repose avant tout sur la prescription sur 7 jours d’amoxicilline, de pivmécillinam ou de nitrofurantoïne. Si elle s’impose, l’antibiothérapie probabiliste repose sur la nitrofurantoïne, puis, sur le céfixime ou une fluoroquinolone jusqu’à connaissance de l’antibiogramme.

PRÉVENTION

La cystite simple, affectant la femme, peut être prévenue par quelques moyens simples :

– Maintenir une diurèse suffisante, même en l’absence de sensation de soif (volume urinaire > 1,5-2 l/j) ;

– Ne pas se retenir trop longtemps d’uriner ;

– Uriner après chaque rapport sexuel ;

– Proscrire les produits de toilette intime parfumés ;

– Limiter les douches vaginales ;

– Ne pas utiliser de spermicides.

Connue également sous le nom de canneberge, la cranberry (Vaccinium macrocarpon) est une plante proche des airelles. Le jus de sa baie, riche en anti-oxydants dont la vitamine C, a été présenté comme ayant un effet préventif de la cystite simple en limitant l’adhésion des bactéries à l’endothélium. Cette allégation est infirmée par les conclusions de l’European Food Safety Authority (EFSA 2012) faisant elles-mêmes écho à un avis de l’Agence nationale de sécurité de l’alimentation (ANSES 2011). Par ailleurs, aucune étude montre une efficacité de la canneberge dans le traitement curatif de la cystite.

1- Il s’agit des critères de Fried : perte de poids au cours de la dernière année, faible endurance, fatigue générale, activité physique réduite.

2- Le diabète n’est plus considéré comme un risque de complication.

3- Ils témoignent de la réduction des nitrates par la plupart des germes impliqués dans les cystites, même si la réaction peut être mise en défaut lors d’infections à d’autres germes ou lors de l’examen d’urines n’ayant pas séjourné assez longtemps dans la vessie (< 4 h).

SOURCES UTILES

→ Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF), « Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires de l’adulte », 2014, www.infectiologie.com

→ Collège des Universitaires de Maladies Infectieuses et Tropicales (CMIT), E. Pilly, « Maladies infectieuses et tropicales 2014 », 24e édition, éd. CMIT Alinéa Plus (Paris), 948 pages.