DES INFIRMIÈRES AU BOUT DU FIL - L'Infirmière Magazine n° 345 du 15/05/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 345 du 15/05/2014

 

CAP SUR L’EMPLOI

DOSSIER

S. M.  

À Lille, un centre d’écoute et d’information régional à destination des malades chroniques, des victimes du cancer ou des personnes handicapées actives est animé par des infirmières. Elles aident les appelants dans leur démarche de retour à l’emploi. Un soin social avant tout.

« Ici il n’y a pas de routine, s’exclame Jeanne-Louise Wozniak, l’une des trois infirmières de la ligne Santé emploi info service (SEIS). Les appelants ont toujours des questions qui ne nous ont jamais été posées. » SEIS est une plate-forme téléphonique d’aide et d’orientation réservée aux habitants du Nord rencontrant des difficultés socio-professionnelles du fait d’une problématique de santé.

« À notre création en 2006, nous étions baptisés « Cancer emploi info service » car ce sont les associations de patients atteints de ces pathologies qui nous avaient alertés sur l’absence de dispositif d’information sur la thématique de l’emploi », rappelle le Dr Sophie Fantoni-Quinton, médecin-expert en santé au travail de l’unité fonctionnelle de pathologies professionnelles du CHRU de Lille, qui supervise la plate-form. Très vite, nous nous sommes aperçus que les questions étaient transposables à d’autres problématiques de santé et notre intitulé a évolué. »

Des femmes en activité

Dès le départ, le dispositif – financé par l’ARS et co-géré par l’Institut de santé au travail du Nord de la France – a été pensé avec des infirmières-écoutantes. « Nous aurions pu aussi recourir à des psychologues ou à des assistantes sociales, précise Sophie Fantoni-Quinton. Mais il s’avère qu’au quotidien, on ne peut pas apporter une information éclairante si on ne connaît pas les étapes de la maladie. » Les écoutantes se forment sur le tas, ou par compagnonnage avec leurs collègues ; elles ont également bénéficié d’une formation à l’écoute. « Cela nous aide à percevoir des choses derrière les mots que prononcent les appelants, résume Brigitte Langlet, également infirmière du dispositif, et à leur faire dire ce qui est plus difficile à formuler. » Même si le soutien psychologique n’intervient que pour 4 % des appels reçus.

Le cancer concerne toujours actuellement 21 % des appelants qui sollicitent le service. « Leurs demandes relèvent majoritairement du maintien de l’emploi, note Jeanne-Louise Wozniak. Beaucoup sont des femmes entre 40 et 50 ans, atteintes d’un cancer du sein, encore en pleine activité professionnelle et qui craignent une rupture à 10 ans de la retraite. » Les questions posées sont variées : démarche et intérêt de la RQTH (lire p. 20), formations accessibles aux travailleurs handicapés, organisation de la visite de pré-reprise ou de reprise. « On sent que les personnes sont démunies par rapport à la multiplicité des interlocuteurs et à la complexité du système », remarque Brigitte Langlet.

En 2013, SEIS a traité les demandes de quelque 416 appelants qui ont formulé 1?154 demandes, dont 15 % concernaient une problématique juridique, 36 % une perte de revenus et 43 % une question relative à l’emploi. Chaque appel fait l’objet d’une réponse par courrier, quelles que soient les informations qui ont pu être transmises oralement. « Comme nous sommes installés dans l’unité fonctionnelle de pathologies professionnelles, nous pouvons directement faire appel aux médecins du service, mais aussi à une juriste, au chef de l’unité qui est également docteur en droit, à une assistante sociale présente tous les vendredis après-midi pour peaufiner les réponses à apporter », explique Brigitte Langlet. Environ 70 % des recommandations formulées sont suivies.

Un suivi à 3 et 6 mois

« Nous ne faisons pas les démarches pour les personnes, mais nous leur communiquons les coordonnées de tous les correspondants qui pourront leur être utiles », poursuit-elle. Ceux-ci sont, par ailleurs, directement informés par SEIS des coordonnées de la personne qui les contactera et de l’objet de sa demande. Il s’agit le plus souvent de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), d’un service de santé au travail, d’associations, des administrations pour l’emploi (Pôle emploi, Mission locale, Cap emploi, etc.), de centres de rééducation, de services sociaux, etc. Puis les IDE-écoutantes assurent un suivi et rappellent les demandeurs à un mois, trois mois puis six mois, afin de voir comment leur situation a évolué, s’ils ont pu appliquer les conseils reçus et s’ils ont encore besoin d’aide. « Souvent, cet appel les rebooste dans les démarches qu’ils doivent effectuer, remarque Jeanne-Louise Wozniak, et le suivi peut être prolongé au-delà des 6 mois, si nous ressentons un besoin. »