La scoliose chez l’enfant et l’adolescent - L'Infirmière Magazine n° 339 du 15/02/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 339 du 15/02/2014

 

FORMATION CONTINUE

LE POINT SUR

ADELINE BLEUNVEN  

Le terme « scoliose » vient du grec skolios, qui signifie « tortueux ». Le dépistage précoce de cette déformation du rachis est essentiel pour éviter son aggravation et les complications associées.

PATHOLOGIE

La scoliose est une déformation tridimensionnelle de tout ou partie de la colonne vertébrale, une courbure de plus de 10° d’amplitude entraînant une torsion d’une ou plusieurs vertèbres sur elle (s)-même (s). Cette déviation provoque une déformation du thorax, de l’abdomen et des zones paravertébrales.

Il existe quatre types principaux de scolioses : la scoliose thoracique, thoraco-lombaire, lombaire et double.

Épidémiologie

La scoliose peut survenir dès la naissance et apparaître à tout âge jusqu’à la fin de l’adolescence. Les filles sont cinq à six fois plus touchées que les garçons. La prévalence de la scoliose est d’environ 40 cas sur 1 000 enfants âgés de 8 à 15 ans. La prévalence des courbures inférieures à 15° est d’environ 3 % chez les adolescents en fin de croissance. Elle est estimée entre 0,1 % et 0,3 % pour les courbures supérieures à 40°.

Étiologie

Cette affection peut avoir diverses origines.

La scoliose idiopathique représente 70 % des scolioses. Sans cause décelable, son origine est probablement multifactorielle (troubles de facteurs neuro- logiques, biomécaniques, hormonaux, de croissance, du métabolisme), avec des facteurs génétiques et héréditaires non négligeables. En effet, une fois sur trois, on retrouve un autre cas dans la famille. Selon la classification de Cotrel, on distingue trois grands groupes : les scolioses infantiles (avant l’âge de 3ans) ; juvéniles (de 3 ans aux premières règles) ; et de l’adolescent (du début de la puberté jusqu’à la maturation osseuse).

La scoliose dite « secondaire » survient suite à une maladie neurologique centrale (infirmité motrice cérébrale, encéphalites, spinabifida…), neuromusculaire (myopathie, amyotrophie spinale) ou osseuse.

Diagnostic

Le diagnostic est clinique. Il repose sur la mesure :

– de la gibbosité (saillie du thorax en arrière) ;

– des déformations et angulations ;

– du déséquilibre par rapport au pli interfessier. L’examen est réalisé en position debout, puis en flexion antérieure du rachis (penché vers l’avant), et, enfin, en position assise pour éviter qu’une inégalité de longueur des membres inférieurs ne perturbe le diagnostic.

L’examen radiologique permet :

– de préciser le diagnostic en chiffrant l’angulation de la scoliose (angle de Cobb) ;

– de calculer la valeur des rotations vertébrales ;

– de vérifier qu’il n’existe pas d’anomalie sous-jacente ;

– de suivre l’évolution des courbures de la colonne vertébrale.

Symptômes et évolution

La scoliose est le plus souvent asymptomatique. Elle provoque parfois des douleurs, une sensation de raideur ou de fatigue musculaire dans le dos. Dix à quinze pour cent des scolioses idiopathiques sont susceptibles de s’aggraver. La déformation peut passer inaperçue pendant des années, jusqu’à l’adolescence. On parle de scolioses évolutives dans les cas suivants :

– La scoliose idiopathique de l’enfant augmente durant la puberté, au point que la courbure du rachis, d’au moins 15° au départ, s’accentue de 5° entre deux radiographies effectuées à six mois d’intervalle.

– La courbure du rachis est d’emblée supérieure à 30°, quel que soit l’âge.

Lorsque l’évolutivité est prouvée, l’aggravation est permanente tant que la croissance n’est pas terminée. Outre l’âge, d’autres critères sont importants pour connaître le potentiel évolutif :

Critères cliniques : taille et poids de l’enfant, date des premières règles, stade pubertaire selon Tanner. Le début de la puberté (entre 11 et 13 ans chez les filles et 13 et 15 ans chez les garçons) est la période la plus critique dans l’évolution d’une scoliose, la croissance évoluant de façon très rapide.

Critères radiologiques, qui permettent d’apprécier l’importance de la maturation osseuse :

– l’âge osseux réel (selon l’atlas de Greulich et Pyle), par une radiographie de la main et du poignet gauche ;

– l’indice de maturité osseuse de fin de croissance, par une radiographie des crêtes iliaques.

L’évolution d’une scoliose est évaluée plusieurs fois par an et conditionne le traitement.

Complications

Outre la déformation de la colonne, différentes complications peuvent être associées à une scoliose.

Caractère inesthétique : la gibbosité peut devenir plus proéminente et provoquer un retentissement psychologique en raison de l’atteinte de l’image corporelle.

Gêne fonctionnelle : la déformation de la colonne rend la marche difficile et certains efforts pénibles.

Douleurs : la rotation des vertèbres est parfois telle qu’elle peut entraîner une compression nerveuse, créant ainsi des crises de sciatique.

Complications respiratoires, cardiaques ou neurologiques dans les formes les plus sévères.

TRAITEMENTS

Les traitements non chirurgicaux

La kinésithérapie ne peut à elle seule éviter l’aggravation d’une scoliose. Elle est donc pratiquée en association avec un traitement orthopédique ou chirurgical. Objectifs : entretenir la mobilité du rachis et la fonction respiratoire, renforcer la musculature du thorax, corriger de mauvaises postures et travailler sur la tenue de la colonne vertébrale.

Traitement orthopédique

Les corsets représentent l’essentiel du traitement orthopédique des scolioses. Ils sont requis pour les formes moyennes à sévères de scoliose (20 à 40° de courbure). Ils constituent une aide active pour que la croissance puisse s’effectuer dans la position la plus corrigée possible afin de diminuer les asymétries de contraintes. Ils sont confectionnés sur mesure et réglables, s’adaptant à la croissance du rachis. L’utilisation éventuelle d’un corset plâtré sur une courte période (environ deux mois) avant la mise en place d’un corset plastique amovible a pour but d’obtenir une meilleure correction. Il maintient la colonne dans la meilleure position. Le corset plastique joue ensuite un rôle de contention. Il doit être porté jour et nuit. Le port d’un corset est contraignant et difficile à faire accepter à un enfant en période pubertaire. Il nécessite un suivi régulier, une motivation importante, c’est pourquoi la démarche doit être bien expliquée.

Le traitement chirurgical, proposé dans les formes les plus sévères, au-delà de 45° de courbure, consiste à réaliser une arthrodèse, c’est-à-dire une fusion des vertèbres opérées, grâce à une greffe osseuse. En complément, une ou plusieurs tiges métalliques sont posées pour maintenir l’alignement corrigé des vertèbres. L’inconvénient majeur de cette chirurgie est le blocage de la croissance rachidienne, c’est pourquoi elle doit être réalisée lorsque l’enfant a atteint une taille suffisante.

Qu’est-ce que « l’attitude scoliotique » ?

> Beaucoup plus fréquente que la scoliose, souvent sans gravité, l’attitude scoliotique est une déviation simple de la colonne vertébrale sans torsion des vertèbres et sans véritable déformation du tronc. Elle disparaît complètement en position couchée, contrairement à la courbure scoliotique. Cette déviation est réductible, et n’évolue jamais en scoliose.

> Elle vient d’une mauvaise position de l’enfant, qui peut avoir diverses origines : inégalité de longueur des membres inférieurs ; pathologie du bassin ; attitude antalgique. Elle est traitée par une rééducation, le port de semelles orthopédiques si les membres inférieurs sont d’une longueur différente, agissant sur la cause de cette mauvaise position.