L’électroconvulsivothérapie - L'Infirmière Magazine n° 339 du 15/02/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 339 du 15/02/2014

 

FORMATION CONTINUE

FICHE TECHNIQUE

CHARLOTTE BONTEMPS  

Visant à traiter certaines pathologies mentales, l’ECT est pratiquée par un médecin anesthésiste-réanimateur accompagné d’un psychiatre. Deux infirmières sont présentes aux séances, assurant un rôle technique et de surveillance.

L’électroconvulsivothérapie (ECT) ou sismothérapie consiste à provoquer une crise comitiale généralisée chez un patient au moyen d’un courant électrique à administration transcrânienne sous anesthésie générale. Les séances sont répétées, typiquement, trois fois par semaine. Ce traitement initial est suivi d’un traitement d’entretien au cours de séances plus espacées.

Une ECT est réalisée sous anesthésie générale, cela afin de respecter les conditions maximales de sécurité. Au préalable, on aura estimé le rapport bénéfice/risque pour chaque patient, avec son consentement.

INDICATIONS

→ L’ECT vise à traiter certaines pathologies mentales :

– dépression majeure ;

– accès maniaque ;

– schizophrénie ;

– autres : troubles de l’humeur dans la maladie de Parkinson; syndrome malin des neuroleptiques ; épilepsie par élévation du seuil convulsif ; dyskinésies tardives induites par les neuroleptiques;

– situations particulières : la grossesse ; l’enfant et l’adolescent; la personne âgée.

→ Selon la Cnam, les hôpitaux publics ont ainsi traité 8 534 patients en 2011.

CONTRE-INDICATIONS

→ Absolues : hypertension intracrânienne.

→ Relatives : malformation vasculaire à risque hémorragique ; AVC récent ; hypertension et insuffisance coronaire sévères.

→ Avec avis: grossesse, pathologies oculaires (décollement de rétine et glaucome) ; pacemaker ; défibrillateurs implantables.

EFFETS INDÉSIRABLES

→ Cardio-vasculaires : troubles conductifs (asystolie) et troubles du rythme sévères, accès hypertensifs avec les risques cardio-vasculaires associés.

→ Neurologiques : état de mal épileptique ; confusion postcritique prolongée ; céphalées ; troubles mnésiques.

→ Respiratoires : laryngospasme ; inhalation; apnées prolongées.

→ Traumatiques : morsure de langue ; luxation mandibulaire ; fractures dentaires ; fracture luxation périphérique ; myalgies.

→ Les accidents graves sont très rares : 2 décès pour 100 000 traitements.

RÉALISATION

→ Le bilan pré-ECT comporte :

– 1 ECG;

– 1 EEG;

– 1 RP;

– 1 bilan sanguin : iono, NFS, hémostase ;

– 1 consultation cardiologique si besoin;

– 1 consultation d’anesthésie ;

– le consentement du patient (selon la loi du 4 mars 2002 et selon un rapport du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants) : « Pour tout recours à la sismothérapie, le consentement éclairé et écrit du patient (ou de son tuteur ou curateur), fondé sur une information exhaustive, doit être sollicité et conservé dans le dossier du patient. » Le traitement ne devrait pas être administré tant que ce consentement n’a pas été obtenu.

Matériel

Il est nécessaire durant la séance et en salle de réveil.

→ Salle d’intervention:

– O2 ;

– vide + aspiration murale ;

– scope: monitorage ECG; FC; pression artérielle et oxymètre de pouls ;

– respirateur : ventilation au masque ;

– défibrillateur

– chariot à médicaments ;

– boîte d’intubation difficile ;

– sismothère.

→ Salle de réveil :

– O2 ;

– vide + aspiration murale ;

– scope ;

– respirateur de premier secours ;

– défibrillateur.

Déroulement et rôle infirmier

→ Le personnel présent se compose d’un médecin anesthésiste-réanimateur, d’un psychiatre et de deux infirmières.

→ Selon l’article R. 4311-10 du Code de la santé publique, l’infirmier ou l’infirmière participe à la mise en oeuvre, par le médecin, des techniques suivantes : sismothérapie et insulinothérapie à visée psychiatrique.

→ Avant chaque séance d’ECT, l’infirmière vérifie que le patient est bien à jeun, qu’il a uriné, pour éviter une éventuelle rupture vésicale et l’émission d’urine lors de la crise ; qu’il ne porte pas de prothèses ni de bijou ni de maquillage.

→ L’anesthésie générale de quelques minutes est réalisée par voie veineuse avec un anesthésiant (propofol/étomidate) et une curarisation (célocurine), pour diminuer les convulsions motrices et leurs conséquences traumatiques.

→ La ventilation du patient est assistée depuis l’induction anesthésique jusqu’à la reprise de la ventilation spontanée.

→ L’infirmière surveille durant l’intégralité de chaque séance : l’ECG; la pression artérielle ; la fréquence cardiaque et la saturation en O2.

→ Les deux électrodes qui délivrent le stimulus électrique doivent être enduites d’un gel conducteur. Elles sont mises en place par l’infirmière de façon bilatérale ou unilatérale, temporale ou frontale, suivant la demande du psychiatre.

→ L’infirmière installe aussi les élec- trodes EEG pour réaliser le monitorage au cours de la séance, afin de vérifier l’apparition de la crise comitiale (nécessaire en termes d’efficacité).

→ Le dosage du stimulus électrique varie d’un patient à l’autre et se fait par une méthode de titration. Celle-ci consiste à administrer de manière successive des courants d’intensité croissante jusqu’à l’obtention du seuil épileptogène.

→ Une fois que le médecin anesthésiste s’est assuré de la reprise de la ventilation spontanée, de la stabilité des constantes et de l’absence de troubles du rythme cardiaque du patient, l’infirmière surveille les fonctions vitales ainsi que l’apparition d’un état confusionnel et/ou d’agitation, en salle de réveil.

→ Le nombre de séances varie en fonction de l’amélioration de l’état de santé du patient.

SURVEILLANCE

– FC + rythme ;

– saturation en O2 ;

– TA ;

– FR ;

– conscience ;

– douleur.

→ À court terme: la phase de résolution.

→ À moyen terme : le risque suicidaire (élevé au cours de la première semaine consécutive au traitement).

→ À long terme : l’efficacité du traitement.

CONCLUSION

Traitement autrefois très controversé, l’électroconvulsivothérapie a désormais une place reconnue au sein de la médecine psychiatrique. Elle donne des résultats appréciables et demeure le traitement le plus rapidement efficace de la mélancolie.

Cependant, il existe une autre méthode médicale, la stimulation magnétique transcrânienne (TMS), une technique utilisée dans le diagnostic et dans le traitement de certaines affections psychiatriques et neurologiques. Il s’agit alors en général de rTMS (Repetitive Transcranial Magnetic Stimulation) : stimulation magnétique transcrânienne répétitive. C’est également un outil d’investigation scientifique en neurosciences. Des publications rapportent que les résultats des revues de littérature et des méta-analyses de ces études auraient montré que la rTMS est efficace dans le traitement de certains types de dépression majeure, dans des conditions spécifiques.

Aller plus loin

Où se former ?

– L’université Segalen de Bordeaux propose un DU pratique et théorie de l’electroconvulsivothérapie et TMS.

– Santé Forma Sud programme une formation : « L’IDE et la sismothérapie en SSPI », www.santeformatsud.fr

Sources utiles :

– Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé: indications et modalités de l’electroconvulsivothérapie – janvier 1998.

– Protocoles 2013 – Mapar éditions – département d’anesthésie-réanimation de Bicêtre.

– Recommandations Société française d’anesthésie et de réanimation 1998. http://www.sfar.org/article/63/in dications-et-modalites-de-lelectroconvulsivotherapie- rpc-1997