Un accompagnement fondé sur la prévention - L'Infirmière Magazine n° 316 du 01/02/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 316 du 01/02/2013

 

DOSSIER

PRISE EN CHARGE

Au-delà des traitements, la prise en charge des patients drépanocytaires repose en grande partie sur l’information des patients sur la maladie et la prévention. L’éducation thérapeutique vise l’observance sur le long terme des consignes et traitements.

Il n’existe pas de traitement curatif de la drépanocytose, hormis la greffe de cellules souches hématopoïétiques, réservée aux formes les plus graves. La prise en charge, pluridisciplinaire, associe médecin de proximité (généraliste, pédiatre, PMI…) et médecin référent hospitalier, qui doit également assurer la liaison avec les autres spécialistes (ophtalmologue, gynécologue, dermatologue…) et, éventuellement, avec le psychologue. Elle a pour objectif le traitement rapide des crises vaso-occlusives et de la douleur, la détection précoce et le traitement des complications aiguës et chroniques et, selon le cas, la discussion sur la mise en route d’un traitement de fond. L’information et l’éducation du patient, notamment sur les règles d’hygiène de vie, sont essentielles dès l’annonce du diagnostic (voir « L’accompagnement des patients », p. 39).

1. LES DIFFÉRENTS TRAITEMENTS

Prévention médicamenteuse des infections et de l’anémie

→ Vaccinations : les patients drépanocytaires ne sont pas immunodéprimés, mais ont une sensibilité accrue aux infections. La vaccination annuelle contre la grippe est nécessaire, non pas en raison d’une gravité particulière de cette maladie chez les patients mais parce que l’infection peut favoriser la survenue d’une crise. Par ailleurs, au-delà des injections prévues par le calendrier vaccinal, les vaccinations antipneumococcique (Prevenar 13 chez le nourrisson, Pneumo 23 à partir de 5 ans et chez l’adulte), anti-méningococcique (de préférence Menveo, qui protège contre les quatre sérogroupes A, C, Y et W135) et anti-hépatite B sont réalisées.

→ Antibioprophylaxie systématique chez l’enfant : les infections pneumococciques sont prévenues par l’administration systématique de pénicilline V (Oracilline) à partir de l’âge de 2 mois et jusqu’à l’âge d’au moins 5 ans (en pratique, souvent jusqu’à 15 ans).

→ En cas de suspicion d’infection, une antibio-thérapie probabiliste est débutée sans attendre en utilisant un antibiotique actif sur le pneumocoque (pénicilline V ou amoxicilline ou amoxicilline + acide clavulanique en ambulatoire).

→ Correction de l’anémie : une supplémentation en acide folique (vitamine B9) est systématique pour aider à la régénération des hématies à raison de 5 mg par jour au long cours ; 10 mg par jour au cours des crises drépanocytaires et durant la grossesse.

Traitement des complications aiguës

→ Lors des crises douloureuses osseuses, la prise en charge s’effectue, dans un premier temps, au domicile du patient. Elle repose sur :

- l’augmentation de l’hydratation : le patient doit boire au minimum 3 litres d’eau chaque jour (voir « L’accompagnement des patients  »). Il est parfois préconisé, en plus, la prise d’un demi-litre d’eau de Vichy, eau alcaline, pour lutter contre l’acidose (cette dernière pourrait favoriser la survenue de crises).

- l’administration d’antalgiques : chez l’enfant, classiquement, paracétamol. En cas d’échec, ibuprofène, puis codéine (Codenfan) ; chez l’adulte, antalgiques de palier 1 ou 2 si la douleur ne cède pas. La douleur est réévaluée au bout de 24 heures, et les signes nécessitant une hospitalisation sont recherchés (persistance de la douleur, fièvre, douleur thoracique ou abdominale, symptômes respiratoires…).

À l’hôpital, les traitements antalgiques sont le Méopa (mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote administré par inhalation), la nalbuphine (chez l’enfant, en intraveineuse lente) ou la morphine. Si besoin, le paracétamol ou un AINS en injectable sont associés à ces traitements. Une hydratation par voie veineuse est également mise en place jusqu’à la fin de la crise. Selon le cas, une oxygénothérapie (en fonction des résultats des gaz du sang), une transfusion sanguine ou un échange transfusionnel (anémie importante) sont pratiqués.

→ Priapisme : la prise en charge initiale repose sur une hydratation abondante et la prise d’antalgiques. Si le priapisme ne cède pas, une hospitalisation en urgence est recommandée (tout retard de prise en charge pouvant conduire à une impuissance). Un traitement par étiléfrine orale (hors AMM) peut être proposé aux patients pour éviter des récidives.

Traitements de fond

Ils sont mis en place si nécessaire.

→ Transfusion sanguine : elle permet de corriger une anémie, mais est surtout indiquée pour diminuer rapidement la proportion de globules rouges contenant de l’HbS. Le geste transfusionnel peut être ponctuel (pour stabiliser, prévenir ou traiter une complication) ou réalisé de manière répétée pour stopper l’évolution de la maladie. Deux techniques transfusionnelles sont possibles : la transfusion simple, ou l’échange transfusionnel, qui associe une saignée à une transfusion de concentrés érythrocytaires, ce qui limite l’hyperviscosité sanguine ainsi que la surcharge martiale chez les transfusés chroniques.

→ Hydroxycarbamide : le mécanisme d’action de l’hydroxycarbamide, un antinéoplasique, dans la drépanocytose n’est pas complètement élucidé. Il entraîne une augmentation de l’hémoglobine fœtale (HbF), qui empêche la falciformation du globule rouge. Il pourrait aussi augmenter la teneur en eau des hématies et leur déformabilité. Ce traitement de fond (Siklos, Hydrea, hors AMM) est indiqué lorsque les crises douloureuses vaso-occlusives se répètent fréquemment (plus de trois hospitalisations par an et/ou plus de deux syndromes thoraciques aigus par an). Il est réservé à l’adulte et à l’enfant de plus de 2 ans (15 à 30 mg/kg/jour habituellement, en une prise le matin, avant le petit-déjeuner). Chez les patients qui répondent bien au traitement, la fréquence des crises diminue. Le besoin de transfusion et le risque de survenue d’un syndrome thoracique sont également diminués. Un bilan hématologique, rénal et hépatique est effectué avant la mise en route du traitement, puis régulièrement par la suite. Une contraception efficace est recommandée.

Il existe certaines contre-indications à ce traitement : les unes, relatives (ulcère de jambe), d’autres, formelles (antécédent d’accident ischémique cérébral).

→ Greffe de cellules souches hématopoïétiques : en raison des complications graves et potentiellement mortelles qu’elle entraîne, la greffe de cellules souches hématopoïétiques est réservée à de jeunes patients présentant une forme très sévère de la maladie, et ayant dans leur famille un donneur compatible.

2. L’ACCOMPAGNEMENT DES PATIENTS

Dans la prise en charge de la drépanocytose, l’information des patients sur la prévention, sur la gestion des crises ainsi que sur les signes qui doivent alerter est fondamentale.

Prévention des crises

→ Hydratation : toutes les causes favorisant une perte d’eau (diarrhée, allaitement, coup de chaleur, fièvre) peuvent contribuer au déclenchement de la crise drépanocytaire (voir « L’essentiel » p 34). Le patient doit donc boire beaucoup : environ 3 litres par jour pour un adulte ; 1 à 3 litres par jour pour un enfant, selon son âge. Les quantités doivent être adaptées à l’activité physique, à la température extérieure… Un enfant drépanocytaire doit toujours avoir une bouteille d’eau à sa disposition (à la maison, à l’école…) pour garder la possibilité de boire lorsqu’il en ressent le besoin.

Il est habituellement recommandé d’éviter les boissons acides (type soda), pour ne pas risquer de déclencher une acidose (susceptible de favoriser la survenue d’une crise). La consommation de jus de fruits en quantité raisonnable ne pose pas de problèmes. En revanche, la consommation d’alcool (qui déshydrate) est à proscrire.

→ Prévention de l’hypoxie : les globules rouges drépanocytaires sont sensibles à toute baisse de la pression partielle en oxygène. Ainsi, un trouble ventilatoire quelconque, permanent ou occasionnel, peut déclencher une crise : ronflement, apnées du sommeil, prise de benzodiazépines, crise d’asthme, insuffisance respiratoire ; et tout obstacle à la respiration, telles une hypertrophie amygdalienne, une rhinopharyngite, une rhinite allergique, une angine… Ces infections doivent donc être traitées sans délai.

Par ailleurs, une altitude supérieure à 1 500 mètres est généralement mal tolérée.

→ Prévenir les infections :

- Le patient doit apprendre à anticiper les changements brusques de température (passage d’une pièce chaude à l’extérieur en hiver ; ou de l’extérieur au rayon froid des supermarchés en été) : se couvrir (écharpe, bonnet si nécessaire…) en privilégiant de multiples épaisseurs plutôt qu’un seul vêtement très épais.

- Une bonne hygiène corporelle (lavage fréquent des mains, brossage des dents) est essentielle. Les éventuels foyers infectieux ORL ou dentaires doivent être recherchés, car une inflammation provoque la recrudescence des crises (suivi dentaire systématique, au moins une fois par an).

- Le dépistage de la lithiase biliaire (très fréquente) est proposé (cholécystectomie par cœlioscopie), avant la survenue de complications infectieuses.

- Les infections urinaires, très fréquentes chez les femmes, nécessitent une antibiothérapie longue : les traitements minute (Monuril ou fluoroquinolones sur 3 jours) sont proscrits, en raison de la fréquence des récidives, du risque de pyélonéphrite et d’infections à germes résistants.

- Aux vaccinations habituelles s’ajoutent les injections antigrippale, à réaliser chaque année (voir p. 37), anti-hépatite B et anti-pneumococcique. À ce jour, chez l’adulte et l’enfant de plus de 5 ans, un rappel anti-pneumococcique (Pneumo 23) est recommandé tous les cinq ans.

→ Éviter toute vasoconstriction :

- En règle générale, le sujet drépanocytaire doit éviter le froid (risque de vasoconstriction) et l’excès de chaleur (risque de déshydratation). En cas d’hématome, les applications de froid (classiquement recommandées pour limiter l’œdème et l’inflammation) sont à proscrire.

- Il faut également penser à éviter tout ce qui peut bloquer la circulation (port de vêtements serrés, position jambes croisées…).

- Le tabagisme et l’usage de drogues (notamment chez les adolescents), l’HTA, les contractures musculaires entraînent également une hypoxie locale par vasoconstriction.

→ Les voyages sont déconseillés en cas de déstabilisation récente de la maladie et au cours de la grossesse. Si un déplacement en zone d’endémie du paludisme est prévu, une prophylaxie antipaludéenne doit être mise en place (même s’il existe une certaine protection vis-à-vis du paludisme chez les hétérozygotes). En effet, cette maladie est l’une des premières causes de mortalité chez les patients qui effectuent un voyage en zone d’endémie. En avion, le patient doit penser à boire beaucoup et, si besoin, à se couvrir : l’air y est frais et déshydraté. Les voyages en avion non pressurisé (vols locaux) ne sont pas recommandés, en raison du risque d’hypoxie.

→ Le stress, le surmenage, le manque de sommeil ou encore les excitants favorisent la survenue des crises (le plus souvent par des mécanismes de vasoconstriction et/ou d’hypoxie). Les hospitalisations pour crise vaso-occlusive sont plus fréquentes lors d’un choc émotionnel ou chez les patients dépressifs.

→ L’activité physique est tout à fait possible et même recommandée (pour des raisons de santé publique et, notamment, chez l’enfant drépanocytaire, qui ne doit pas se sentir exclu), mais elle doit être modérée et adaptée : boire pendant et après l’effort ; s’arrêter en cas d’essoufflement, de fatigue ; changer de vêtement lorsqu’on a transpiré… Pas d’effort violent, d’apnée (plongée sous-marine…), ni de sport en altitude.

Chez les enfants, la piscine est autorisée, mais les baignades à une température de moins de 25 °C sont généralement déconseillées.

Gestion de la crise au domicile

La crise douloureuse est l’événement clinique le plus fréquemment rencontré chez le patient drépanocytaire. Elle ne doit jamais être banalisée car elle peut vite évoluer vers une forme grave. La prise en charge à domicile comporte une augmentation de l’hydratation habituelle (au moins 3 litres d’eau par jour) ; il est parfois proposé d’y ajouter 0,5 litre d’eau de Vichy pour favoriser une alcalinisation) ; le repos au calme et au chaud ; l’arrêt de toute activité.

Il faut réexpliquer le bon usage des médicaments antalgiques prescrits : recourir d’abord au paracétamol (maximum 4 gr/jour) ; ne prendre les antalgiques de palier 2 qu’en cas de persistance de la douleur sous antalgiques de palier 1 ; les anti-inflammatoires peuvent être utilisés en complément (en l’absence d’antécédents d’ulcère, de grossesse…).

Signes d’alerte nécessitant une hospitalisation

→ Certaines situations nécessitent une consultation en urgence à l’hôpital :

- une fièvre supérieure à 38,5 °C chez l’enfant de moins de 3 ans ou supérieure à 39 °C chez l’adulte et l’enfant plus grand. Un médecin doit être consulté pour toute fièvre supérieure à 38 °C chez l’enfant de moins de 3 ans ;

- l’apparition brutale d’une asthénie, d’un ictère conjonctival, ou si les urines deviennent foncées (suspicion d’anémie hémolytique aiguë) ;

- un priapisme ne cédant pas aux mesures initiales (augmentation de l’hydratation, antalgiques) et/ou se prolongeant plus d’une heure ;

- une détresse respiratoire, une douleur thoracique (suspicion de syndrome thoracique aigu), ou abdominale (crise vaso-occlusive ou pyélonéphrite ou cholécystite…) ;

- toute anomalie neurologique ou altération de la conscience d’apparition brutale (suspicion d’AVC) ;

- une crise douloureuse ne cédant pas aux antalgiques prescrits à dose optimale ;

- en cas d’apparition d’urines très foncées après une transfusion (jusqu’à quinze jours après) : il faut alors faire appel au médecin (risque d’accident hémolytique par allo-immunisation).

→ Repérer une crise douloureuse chez l’enfant : avant 3 ans, tout changement de comportement (pleurs inexpliqués…) doit alerter. Il faut rechercher un syndrome main-pied, prendre la température de l’enfant, le faire boire à la moindre suspicion de douleur et lui administrer les antalgiques prévus par le médecin.

Dépistage du trait drépanocytaire

Le dépistage du trait drépanocytaire, c’est-à-dire le dépistage des sujets porteurs sains, peut être fait très facilement en réalisant un hémogramme et une étude de l’hémoglobine. Des examens biologiques qui peuvent être pratiqués dans tous les laboratoires d’analyse médicale. Les patients à risque, susceptibles d’être porteurs du trait drépanocytaire, sont originaires des départements français d’outre-mer, d’Afrique subsaharienne, d’Amérique du Sud (Brésil), d’Inde, du Moyen-Orient et du bassin méditerranéen (notamment Grèce, Italie). Une consultation de conseil génétique est proposée aux patients porteurs. Si une grossesse est envisagée, et selon le risque qu’a l’enfant d’être atteint d’une forme grave de la maladie, un diagnostic prénatal, voire pré-implantatoire, peut être proposé :

- le diagnostic prénatal consiste à rechercher l’anomalie génétique sur l’ADN du fœtus entre la 10e et la 12e semaine d’aménorrhée. Si le fœtus est porteur de l’anomalie, une interruption de grossesse peut être demandée ;

- le diagnostic pré-implantatoire (très encadré en France, et proposé uniquement à certains couples) consiste à rechercher l’anomalie génétique sur des embryons obtenus par fécondation in vitro, de manière à transplanter dans l’utérus des embryons non porteurs de l’anomalie.

Suivi

Un suivi régulier chez le médecin traitant ou le médecin spécialiste de la drépanocytose est à prévoir. Un traitement de fond ne doit pas être interrompu sans l’avis du médecin. Le patient (ou les parents) doit avoir sur lui sa carte de groupe sanguin, le carnet de vaccination et la carte spécifique « drépanocytose ». Cette dernière comporte deux volets : l’un concernant les professionnels de santé et qui contient des informations médicales personnelles sur le malade ; l’autre, destiné au malade et à ses proches, qui comporte des informations pratiques.

MÉDICAMENTS

Sous haute surveillance

Certains traitements doivent être évités chez les patients drépanocytaires.

→ Les corticoïdes sont susceptibles de déclencher des crises vaso-occlusives. Si leur prescription s’avère nécessaire, elle s’effectue sous surveillance étroite du patient, et un échange transfusionnel est préalablement effectué.

→ Les diurétiques augmentent la viscosité sanguine et sont susceptibles de provoquer une déshydratation.

→ Les benzodiazépines peuvent favoriser une hypoventilation. En cas d’insomnie ou d’anxiété, les antihistaminiques (type Atarax) sont préférés.

→ Les morphiniques sont évités en ambulatoire, notamment pour éviter tout abus dans le but de calmer rapidement une crise douloureuse : en les prenant, le patient cherche à préserver son rythme de vie afin de répondre à des contraintes professionnelles et familiales, ce qui aggrave le phénomène vaso-occlusif. Autre risque : le mésusage et la dépendance aux opioïdes.

COMPLICATIONS

L’hémochromatose post-transfusionnelle

La surcharge en fer post-transfusionnelle est inéluctable lors des transfusions au long cours. Les principales complications sont : les atteintes cardiaques, hépatiques et endocriniennes (puberté retardée, aménorrhée secondaire, retard statural, hypothyroïdie…).

Dans les programmes transfusionnels au long cours, une surveillance du bilan martial est instituée tous les 4 à 6 mois, avec dosage du fer sérique, du coefficient de saturation et de la ferritine. Un traitement chélateur (déferoxamine, Desferal) ; ou par voie orale (défériprone, Ferriprox, et déférasirox, Exjade) est mis en place si la ferritine augmente au-delà de 1 000 mg/L sur deux contrôles.

GROSSESSE

Davantage de risques

La grossesse nécessite un suivi rapproché, car c’est une période à haut risque pour la mère et pour le fœtus. En effet, d’une part, la drépanocytose augmente le risque de survenue de complications de la grossesse (HTA, pré-éclampsie, accident thrombo-embolique…) et, d’autre part, la grossesse favorise la survenue de complications drépanocytaires (aggravation de l’anémie, crises vaso-occlusives…).

→ Le risque fœtal est important : retard de croissance intra-utérin, prématurité…

→ La future maman doit être très vigilante, afin d’éviter tout facteur déclenchant une crise (repos, hydratation, prévention des infections, anticipation des changements brutaux de température…).

→ Les transfusions ou les échanges transfusionnels sont proposés, selon les équipes, soit de manière systématique (pour éviter les complications maternelles et fœtales), soit seulement en cas de complications (anémie sévère, augmentation de la fréquence des crises vaso-occlusives…).

RECOMMANDATIONS

Apports alimentaires

→ L’alimentation du patient drépanocytaire doit être suffisamment calorique et riche en protéines. En effet, des carences sont souvent constatées. Elles sont dues à un défaut d’apport (à relier aux habitudes alimentaires) mais aussi à une sur-utilisation des nutriments liée à l’hypercatabolisme et à l’hémolyse chronique.

Il est recommandé aux patients drépanocytaires d’augmenter leur apport calcique (laitages, fromages, fruits secs, eaux riches en calcium type Hépar, Vittel, Contrex…) ainsi qu’en vitamines (fruits, légumes, huiles végétales…). Une supplémentation en zinc est proposée (hors AMM) en cas d’ulcère cutané.

INTERVIEW
ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE

FAVORISER L’ADHÉSION LIBRE ET VOLONTAIRE

AMÉLIE PERRIN CHARGÉE DE L’ÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE DES JEUNES PATIENTS

Infirmière formatrice au sein du Rofsed(1), Amélie Perrin est, notamment, chargée de l’éducation thérapeutique des jeunes patients. Entretien.

L’INFIRMIÈRE MAGAZINE : Quel est l’objectif de l’éducation thérapeutique chez l’enfant et l’adolescent drépanocytaires ?

AMÉLIE PERRIN : Son but est de permettre aux patients et à leur famille de mieux comprendre la maladie et de mettre en place une stratégie d’observance au traitement sur le long terme. Cette démarche permet également, grâce à des mesures de prévention simples, d’agir et de réagir au quotidien face à des situations particulières et d’éviter ainsi des complications, voire une hospitalisation.

Dans ce cadre, le rôle du soignant est d’accompagner et de soutenir le patient dans la démarche d’ETP. Pour ma part, je travaille en étroite collaboration avec une équipe pluriprofessionnelle et je participe à la conception du programme. Mon principal travail consiste ensuite à créer des outils et des supports d’information et d’éducation afin d’évaluer et d’accroître la connaissance de la maladie chez les patients et leur entourage.

L’I. M. : De quelle façon l’ETP est-elle mise en œuvre ?

A. P. : Actuellement nous disposons d’un éventail diversifié : classeur imagier, brochures, Cdrom, BD, jeu du Pr Drépano®, cartes médicaments, jeu de la transmission génétique… Tous ces outils(2) sont bien sûr adaptés à l’âge des jeunes patients et à l’évolution de leur maladie, mais également au contexte psychosocial et culturel dans lequel ils évoluent.

Nous organisons des consultations individuelles ou des ateliers collectifs d’information, par tranches d’âge, dédiés soit aux jeunes, soit aux parents. Les questions ne sont pas les mêmes, en effet, chez l’enfant et l’adolescent, et la maman d’un bébé de 6 mois n’a pas les mêmes préoccupations que celle d’un enfant de 6 ans. Il faut également prendre en compte l’évolution de la maladie et des traitements. L’intérêt de ces rendez-vous est que les patients peuvent aussi échanger sur leur vécu de la maladie, se transmettre des « petits trucs ». Ces rencontres sont souvent proposées au sein de l’hôpital où ils sont suivis, mais, à la demande, je me déplace aussi au domicile. L’objectif de nos interventions est d’expliquer l’importance des consignes et les conséquences sur la santé si elles ne sont pas observées.

L’I. M. : Quels sont les obstacles qui obèrent l’observance thérapeutique et préventive ?

A. P. : Les traitements thérapeutiques et préventifs, les comportements de prévention sont relativement contraignants pour des jeunes. Au quotidien, par exemple, ils doivent s’hydrater abondamment, même quand ils n’ont pas soif (lire p. 39). L’âge est aussi un facteur de bonne observance. Un enfant de 6 ans prend plus facilement son traitement qu’un adolescent. Bien entendu, on essaie de faire en sorte que les comportement préventifs s’adaptent à leur rythme et à leur environnement, afin qu’ils aient la vie la plus normale possible.

Par ailleurs, nombre de familles de notre file active sont confrontées à la précarité : pas de logement, pas ou peu de revenus… Dans ces conditions, il n’est pas toujours aisé de faire passer le message de prévention auprès d’elles, même si l’on peut les orienter vers les assistantes sociales. L’état psychologique compte aussi beaucoup. Les patients qui n’acceptent pas la maladie ont des difficultés de compliance. Nous leur proposons alors de rencontrer un psychologue du réseau ou de ville. Enfin, « le déclic » de la nécessité d’une éducation thérapeutique est parfois long à se déclencher. Mais, lorsqu’il se produit, patients et parents sont très demandeurs d’aide et d’information. Plus de 50 % de notre file active a déjà participé à des actions d’éducation thérapeutique.

PROPOS RECUEILLIS PAR FRANÇOISE VLAEMŸNCK

1- Le Rofsed (Réseau ouest francilien de soins aux enfants drépanocytaires), créé en 2005, coordonne le suivi des 0-18 ans entre la ville et l’hôpital.

2- Par ailleurs, le Rofsed anime un site Internet, qui s’adresse aussi aux professionnels de santé. Ils peuvent y retrouver informations, conseils et outils : www.rofsed.fr