Des allers-retours « protégés » - L'Infirmière Magazine n° 306 du 01/09/2012 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 306 du 01/09/2012

 

ACCIDENT DE TRAJET

JURIDIQUE

Une infirmière peut être victime d’un accident de service, survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions. Dans cet article, nous évoquerons le seul accident de trajet, dont la définition et les contours ont été récemment précisés par la jurisprudence.

Rappelons au préalable que l’on parle d’accident du travail lorsque celui-ci est survenu sur le lieu même du travail et pendant les heures de travail ; ou d’accident de trajet lorsque ce dernier se produit pendant le trajet aller et retour de la professionnelle, soit entre son lieu de travail et sa résidence principale (ou une résidence secondaire présentant un caractère de stabilité, ainsi que tout autre lieu de résidence où elle se rend de façon habituelle pour des raisons d’ordre familial), soit entre le lieu de travail et le restaurant, la cantine ou tout autre lieu où elle prend habituellement et régulièrement ses repas.

Définition

En principe, le trajet doit être direct, le plus habituel possible, ne pas avoir été interrompu ou détourné pour un motif d’ordre personnel, indépendant de l’emploi ou étranger aux nécessités essentielles de la vie courante (aller chercher un enfant à l’école ou chez sa nourrice, s’arrêter acheter du pain). La jurisprudence prend en compte des situations extrêmement diverses pour qualifier un accident d’accident de trajet. Ainsi, un trajet peut ne pas être direct dans une situation de covoiturage régulier rendant un détour nécessaire. Citons également, au titre des illustrations jurisprudentielles, l’arrêt du Conseil d’État du 29 janvier 2010. M. B., infirmier, est victime d’un accident mortel dans une gare alors qu’il rentrait par le train à son domicile. Pour décider que l’accident à l’origine du décès de M. B. ne revêtait pas le caractère d’un accident de service, une cour administrative d’appel a relevé que la gare où il était descendu se trouvait en dehors de son itinéraire normal, et qu’en tout état de cause, ce détour, alors même que M. B. se serait endormi dans le train et réveillé à ladite gare, n’était ni lié aux nécessités de la vie courante ni en relation avec l’exercice de ses fonctions. Le Conseil d’État annule ce jugement, soulignant que « l’accident est survenu sur la ligne de chemin de fer qu’empruntait habituellement M. B. pour se rendre de son travail à son domicile, dans une gare située juste après celle où il devait prendre une correspondance. Il résulte de l’instruction que cet écart par rapport au trajet habituel de l’intéressé est dû à l’assoupissement de ce dernier et ne traduit aucune intention de sa part de ne pas rejoindre directement son domicile dans un délai habituel. Ainsi, et alors même que l’accident serait imputable à une faute de l’intéressé, M. B. doit être regardé comme n’ayant pas quitté son itinéraire normal. L’accident dont il a été victime a, par suite, le caractère d’un accident de service. »

Reconnaissance comme accident de service

Si l’infirmière travaille dans le secteur privé, et qu’elle est victime d’un accident survenu sur le trajet « protégé » (qui répond strictement aux critères, ndlr), elle bénéficie de la présomption d’imputabilité, et le caractère professionnel de l’accident sera, en principe, reconnu. Ce bénéfice disparaît si l’accident survient en dehors de ce parcours, et il appartiendra alors à la praticienne d’apporter la preuve qu’il existe bien un lien entre l’accident et l’activité professionnelle (travaux sur le trajet habituel par exemple, mise en place d’une déviation, impraticabilité des chemins habituels pour cause d’intempéries).

Dans la fonction publique, et contrairement, donc, aux conditions du régime général évoqué ci-dessus, c’est au fonctionnaire, qu’il soit titulaire ou stagiaire, d’apporter la preuve de la survenue de l’accident et de sa relation directe et exclusive avec le service ou avec l’exercice de ses fonctions. La présomption d’imputabilité ne joue que pour l’accident de travail, sous réserve, cependant, que l’agent soit en mesure d’apporter la preuve que l’accident est survenu au temps et au lieu du travail.

TEXTES DE RÉFÉRENCE

Articles L.411-1 et 2 du Code de la Sécurité sociale sur les accidents de trajet.

Articles L.1226-6 et suivants du Code du travail.

Circulaire n° 1711 du 30 janvier 1989 sur la protection sociale des fonctionnaires et stagiaires de l’État contre les risques maladies et accidents de service.

Circulaire n° DGOS/RH3/2012/102 du 5 mars 2012 relative à la déclaration des maladies professionnelles et des accidents de travail dans la fonction publique hospitalière.