La responsabilité civile - L'Infirmière Magazine n° 287 du 15/10/2011 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 287 du 15/10/2011

 

RISQUES

JURIDIQUE

Les infirmières fonctionnaires ou salariées du privé sont couvertes en responsabilité civile par leur établissement pour leur activité professionnelle. Sauf dans certaines situations, qui peuvent justifier le recours à une assurance.

Les infirmières, comme tous les autres professionnels de santé, ne sont pas à l’abri de poursuites engagées à leur encontre par des patients mécontents de la prise en charge dispensée. Mais leur statut de salarié du privé ou d’agent de la fonction publique les met à l’abri de toute responsabilité indemnitaire. Même reconnues responsables du préjudice, elles n’auront pas à verser de dommages et intérêts au plaignant. Leur paiement sera directement assuré par leur employeur, ou, plus exactement, par l’assureur de ce dernier. Une jurisprudence récente a reconnu qu’il en était ainsi pour un médecin ou une sage-femme, même s’ils exercent leur profession avec une certaine indépendance. Mais cette prise en charge a des limites.

Activité privée, ou à l’extérieur de l’établissement

Un salarié du privé ou un agent public n’engagera pas sa propre responsabilité civile, à condition néanmoins qu’il ait agi dans le cadre des fonctions qu’il exerce pour le compte de son employeur. Ainsi, un praticien hospitalier qui intervient dans le cadre d’une activité privée au sein d’un établissement public reste seul responsable vis-à-vis de son patient. Il devra l’indemniser en cas de faute commise.

Son statut d’agent hospitalier ou de salarié ne le protégera pas non plus dans le cadre d’actes pratiqués en dehors de son lieu de travail. Il en sera ainsi pour des soins, même donnés à titre gracieux, à des proches, parents ou amis, ou au titre de son devoir d’assistance à personne en péril.

Abus de fonction et faute détachable du service

Le principe selon lequel la responsabilité de l’employeur, entreprise privée ou hôpital public, se substitue à celle du salarié préposé ou de l’agent comporte une autre exception, constituée par l’abus de fonction (dans le privé) ou la faute détachable du service (dans le public), « celle qui révèle l’homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences »(1).

L’abus de fonction est constitué, selon la jurisprudence, quand le salarié réalise une intervention « en dehors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions ».

La faute personnelle de l’agent se définit comme « un manquement volontaire et inexcusable à des obligations d’ordre professionnel et déontologique »(2). Ce sera le cas, par exemple, du praticien qui refuse de se déplacer alors qu’il est d’astreinte ; de celui qui tarde à venir à l’appel d’une sage-femme malgré la conscience du danger et la nécessité de pratiquer une césarienne en urgence(3) ; de celui qui « oublie » une patiente incapable de se déplacer alors que le feu s’est déclenché dans son service ; du chef de service informé d’une erreur d’injection à l’origine d’un choc septique chez un patient et qui garde le silence malgré les recherches entreprises par ses confrères pour déterminer l’origine de la dégradation de l’état de santé du malade(4) ; ou bien encore de l’agent qui, durant son service, conduit un véhicule administratif en état d’ébriété(5).

Dans ces situations, si les professionnels ne sont pas assurés, ils seront redevables sur leurs deniers personnels. Toute structure condamnée peut exercer une action récursoire et se retourner contre le professionnel qui aurait commis ce type de faute. Enfin, rappelons qu’aucun contrat d’assurance ne peut prendre en charge les conséquences d’une faute pénale intentionnelle.

1– Concl. sur TC, 5 mai 1877, Laumonnier-Carriol, Rec. Lebon, p. 437.

2– Cass. Crim. 2 avril 1992 n° 90-87579.

3– Cass. Crim. 2 avril 1992 n° 90-85579.

4– CE 28 décembre 2001 n° 213931.

5– CAA Bordeaux 21 mars 2006 n° 03BX00225.

EN SAVOIR PLUS

Quelles sont les conséquences d’un défaut d’inscription à l’Ordre infirmier sur le contrat ­d’assurance de ­responsabilité ?

Selon l’article L. 4311-15 du Code de la santé publique, une infirmière ne peut exercer légalement sa profession que si elle est inscrite à l’Ordre. En conséquence, si, lors d’une procédure mettant en cause une infirmière, un tribunal relevait que cette dernière n’était pas inscrite et que, de ce fait, son exercice professionnel était illicite, son assureur ou celui de son employeur serait en droit de refuser de garantir les dommages causés, la loi ne permettant pas de garantir une activité illégale.