L’accompagnement paramédical - L'Infirmière Magazine n° 276 du 01/04/2011 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 276 du 01/04/2011

 

DOSSIER

PRISE EN CHARGE

La prise en charge du parkinsonien ne peut se résumer aux seuls médicaments. Aussi efficaces soient-ils, ceux-ci sont rarement suffisants et doivent être associés à un accompagnement paramédical pour améliorer la qualité de vie des patients. « Au stade des fluctuations dites “wearing off” (blocage et déclin d’activité en fin de matinée ou de journée), l’intervention non médicale devient indispensable, et au stade des fluctuations sévères (“on/off”), la prise en charge paramédicale est primordiale », indique le Pr Césaro. Le kinésithérapeute et le psychologue peuvent intervenir de manière précoce mais, progressivement, l’infirmier, l’orthophoniste et l’ergothérapeute sont également associés à la prise en charge du patient.

La kinésithérapie

Elle peut débuter dès l’apparition des troubles de la marche et de la posture pour prévenir l’aggravation de la perte du tonus et les difficultés posturales liées à l’évolution de la maladie. Elle permet d’améliorer l’autonomie en limitant la gêne motrice et les complications orthopédiques grâce à la mobilisation des articulations des membres et du rachis. Elle lutte contre les difficultés respiratoires consécutives à la rigidité et à l’akinésie des muscles. « En outre, ajoute le Pr Césaro, lorsque les gestes automatiques (marche, usage des mains) deviennent difficiles ou sont bloqués, le malade peut apprendre à réaliser des gestes volontaires par des exercices de coordination des gestes, de contrôle postural par anticipation des changements de posture et de coordination de la posture et du geste. Par exemple, lorsque le patient piétine sur place parce qu’il est bloqué pour marcher, le fait de lui donner une cible visuelle en lui commandant de franchir le seuil de la porte ou d’enjamber un obstacle va lui permettre d’avancer. C’est spectaculaire ! » Le rythme des séances peut être de une à trois par semaine avec aménagement de périodes de repos.

L’accompagnement psychologique

Il peut être utile pour aider le malade à passer les caps d’acceptation difficiles : l’annonce du diagnostic, l’évolution de la maladie ou la survenue de handicaps physiques. Certains services hospitaliers développent des consultations multi-disciplinaires associant à l’équipe pluridisciplinaire un psychologue ou un psychiatre. Par ailleurs, des recherches ont montré que plus la personne est consciente de sa maladie et de ses répercussions sur elle-même et ses proches, plus elle peut exercer une action thérapeutique indirecte sur les symptômes grâce à la mise en œuvre de techniques psychoéducatives (éducation attentionnelle, gestion du stress et des réactions émotionnelles) lui permettant de « contrôler » la maladie.

Les soins infirmiers

À l’hôpital, en institution ou à domicile, les infirmiers interviennent lorsque la maladie s’aggrave et que l’autonomie du patient se dégrade. « En général, la prise en charge infirmière coïncide avec une hospitalisation destinée à rééquilibrer le traitement du patient confronté à des périodes “off” de plus en plus fréquentes et invalidantes, qui nécessitent une aide pour les soins d’hygiène et l’alimentation, explique Joëlle Proust, ancienne infirmière référente Parkinson au CHU de Poitiers, aujourd’hui animatrice régionale et responsable adjointe du Comité France Parkinson de la Vienne. « Certaines formes avancées de la maladie nécessitent des soins spécifiques, notamment pour assurer les soins de sonde de stomie dans l’alimentation entérale en cas de troubles de la déglutition, ou encore pour la mise en place et la surveillance du traitement sous-cutané par pompe d’apomorphine. » Ce traitement nécessite, en effet, d’être délivré en continu sur une durée progressivement affinée par le neurologue pour optimiser l’état du malade et limiter les effets secondaires du médicament. « Au-delà des soins, les infirmiers doivent être formés aux spécificités des troubles psychiques des parkinsoniens, insiste Joëlle Proust. Il est important de pouvoir détecter et différencier les troubles comportementaux en lien avec la maladie, les effets indésirables des traitements ou un éventuel surdosage de médicament souvent lié à un non-respect de la prescription. »

Quand les malades se sentent « emprisonnés dans leur corps » et savent que les traitements peuvent les libérer, ils ont tendance à s’automédiquer, ce qui peut avoir de lourds retentissements (comportements addictifs ou compulsifs, par exemple). Il est donc important que les infirmiers insistent auprès du patient et de son entourage sur la nécessité de respecter très attentivement la prescription et de signaler rapidement tout comportement qui ne semble pas habituel. C’est d’autant plus indispensable que les doses et les heures de prise des médicaments sont déterminées par la fréquence et l’intensité des périodes « on, off ». « Décaler d’un quart d’heure la prise du médicament peut avoir des effets très délétères chez certains patients, ajoute l’infirmière. De même, pour certains malades, le neurologue conseillera une prise des médicaments à distance des repas, afin d’obtenir une meilleure absorption du traitement et un meilleur résultat. L’infirmière est également sollicitée dans la prise en charge des patients relevant de la neurostimulation. Ces interventions font appel à son rôle technique dans le cadre du, bilan préopératoire et des soins post-opératoires et à son rôle propre (écoute, éducation) dans l’accompagnement du malade et de l’aidant. »

Enfin, le rôle des infirmiers doit prendre en compte l’accompagnement des aidants car ces derniers s’épuisent et ont besoin d’être soutenus psychologiquement. Au-delà des conseils susceptibles d’améliorer la qualité de vie des patients (alimentation facilitant le transit, éviter les siestes pour faciliter l’endormissement, privilégier les déplacements courts et rapides, s’assurer que les lieux de séjour sont faciles d’accès, sans escaliers ou avec ascenseur…), les infirmiers peuvent apporter du réconfort aux aidants en les orientant vers les associations très actives dans l’accompagnement et le soutien des malades et de leur entourage. En milieu hospitalier, l’infirmière reste le lien entre le neurologue et le malade et peut être d’une aide précieuse pour l’aidant quand ce dernier est en difficulté avec le malade.

→ La rééducation orthophonique : lorsque la MP atteint le langage (dysarthrie, tachyphémie) et l’expression faciale (figée par l’akinésie), la rééducation orthophonique a pour but de combattre ces effets pour faciliter la communication et éviter l’enfermement et la rupture sociale. Elle permet également de combattre les troubles de la déglutition par un entraînement spécifique.

→ L’ergothérapie : elle permet, par l’exécution d’un travail manuel ou grâce à l’aménagement du domicile, notamment, d’aider à maintenir les activités de la vie quotidienne et domestique et de favoriser le maintien à domicile.

→ Les cures thermales : il existe actuellement trois stations thermales accessibles aux malades atteints de MP : Néris-les-bains (Allier), Lamalou-les-bains (Hérault), Ussat-les-bains (Ariège). « Les patients ressortent des cures rechargés pour quelques mois, ils en retirent un bénéfice important et l’impression d’avoir recouvré pas mal de capacités, constate le Pr Césaro. C’est un concentré de travail soignant associé à une ambiance très positive du fait de l’entraînement induit par les activités de groupe. Ces cures relèvent d’une prescription médicale, et les soins sont pris en charge à 100 % au titre de l’ALD (affection de longue durée). En revanche, le séjour reste à la charge du patient, ce qui limite les cures à ceux qui sont peu dépendants ou bien accompagnés. »

TÉMOIGNAGE

« J’ai caché mes mains qui tremblaient… »

CORINNE BELMUDES, 52 ANS, ATTEINTE DE LA MALADIE DE PARKINSON DEPUIS ONZE ANS

« À l’époque, j’ai été soulagée de mettre enfin un nom sur mes maux, mais aussi très accablée par ce diagnostic. Les jeunes parkinsoniens rencontrent des difficultés spécifiques liées à l’image et à l’isolement induit par les clichés associés à cette maladie, à la vie du couple dans la force de l’âge, à l’éducation des enfants, à leur activité professionnelle, à leur vie sociale et à la difficulté à trouver les mots pour expliquer la maladie. Paradoxalement, ainsi que l’a clairement exprimé le Dr Christine Brefel-Courbon, du CHU Purpan de Toulouse, lors de la journée consacrée aux jeunes parkinsoniens le 4 novembre 2010 à Toulouse, « si la maladie de Parkinson évolue plus lentement chez les jeunes parkinsoniens, pour la majorité d’entre eux, et si la forme de leur maladie est, en général, moins grave, elle est très souvent aggravée par l’impact psychologique du diagnostic et ses répercussions sur la qualité de vie des malades ». On ne le dira jamais assez, l’image de cette maladie est démoralisante pour un nouveau diagnostiqué, surtout jeune ! Tous les malades en subissent les conséquences, ont honte de leur maladie, la cachent et s’isolent. Je l’ai moi-même cachée, et mes mains qui tremblaient, pendant un an… De plus, les médecins du travail connaissent mal la maladie de Parkinson car elle touche plutôt les personnes retraitées ou n’est pas révélée par crainte d’une perte d’emploi et de ressources… C’est la raison pour laquelle, après une période dépressive consécutive au diagnostic, j’ai décidé, encouragée par ma neurologue, de mieux connaître cette pathologie pour en parler autour de moi et me suis rapprochée de l’Association France Parkinson, afin d’aider à mon tour les jeunes parkinsoniens à mieux cohabiter avec leur maladie et à ne pas perdre espoir.

CHIRURGIE

Maladie reconnue ALD

→ Suite au décret n° 2011-77 du 19 janvier 2011 portant actualisation de la liste et des critères médicaux utilisés pour la définition des affections de longue durée, l’exonération du ticket modérateur s’applique désormais à toute affection comportant un syndrome parkinsonien non réversible (maladie de Parkinson et syndromes parkinsoniens atypiques) nécessitant un traitement antiparkinsonien pendant au moins six mois.

→ Cette exonération est accordée pour une durée de cinq ans, renouvelable.

→ C’est une victoire pour les malades et les associations qui se sont investies dans les négociations pour obtenir cette reconnaissance.