Les MICI - L'Infirmière Magazine n° 264 du 01/10/2010 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 264 du 01/10/2010

 

FORMATION CONTINUE

LE POINT SUR…

Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin évoluent par poussées. Traiter ces dernières et prévenir les rechutes constitue l’essentiel des thérapeutiques.

LA MALADIE

Les MICI regroupent la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique (RCH). Elles se caractérisent par une inflammation du tube digestif, qui peut se localiser à divers endroits. On ne connaît pas précisément les causes de ces maladies, mais il semble que l’inflammation soit liée à une hyperactivité du système immunitaire digestif. Les MICI évoluent généralement par poussées, entrecoupées de phases de rémission. L’inflammation chronique provoque des ulcérations larges et profondes de la paroi digestive, qui peuvent s’atténuer entre les crises, mais qui laissent des cicatrices. La RCH ne touche que le côlon et le rectum, alors que la maladie de Crohn s’étend parfois à l’ensemble du tube digestif. Les deux pathologies se caractérisent par des diarrhées et des douleurs abdominales, survenant surtout après les repas. Si les symptômes digestifs sont au premier plan, des symptômes extradigestifs peuvent se manifester.

Les symptômes digestifs

La maladie de Crohn se caractérise par des douleurs abdominales (spasmes, syndrome d’obstruction intestinale), des diarrhées, des nausées et des vomissements. On rencontre parfois un syndrome abdominal aigu, comme un tableau de pseudo-appendicite. Les symptômes varient selon la localisation des lésions.

La RCH, quant à elle, associe souvent ténesmes, rectorragie, épreintes, faux besoins et émissions glairosanglantes afécales ou diarrhées sanglantes ou syndrome dysentérique. En cas de forte poussée, des douleurs abdominales et des signes généraux (fièvre, altération de l’état général, amaigrissement) peuvent être observés. Chez l’enfant et l’adolescent, une cassure des courbes staturo-pondérales et/ou un retard pubertaire sont parfois notés.

Les symptômes extradigestifs

Si ces symptômes sont rarement au premier plan, ils sont parfois révélateurs. Ils sont communs aux deux pathologies. Il s’agit principalement de symptômes rhumatologiques, dermatologiques, oculaires, et hépatobiliaires.

LES COMPLICATIONS

La RCH

elle peut évoluer vers une colite aiguë grave, qui se caractérise par un nombre élevé d’évacuations sanglantes (plus de 6 par jour) et une dégradation de l’état général. Il s’agit d’une urgence thérapeutique.

La maladie de Crohn

les complications possibles sont nombreuses : occlusion intestinale, fistule, fissure anopérinéale, abcès anopérinéal ou intra-abdominal, perforation intestinale, hémorragie, dénutrition.

Pour les deux maladies

l’augmentation du risque de cancérisation du côlon est reconnue, surtout en cas de forme étendue. L’augmentation du risque apparaît sept à dix ans après le diagnostic de RCH, et d’emblée en cas de cholangite sclérosante associée.

LES TRAITEMENTS

Le but est de traiter les poussées et de prévenir les rechutes. Il n’existe pas de traitement médical curatif, mais les protocoles actuels permettent souvent un contrôle durable de la maladie et une qualité de vie satisfaisante. Le traitement utilisé dépend de l’intensité des poussées et de leur topographie. Il repose sur l’utilisation des aminosalicylés, des corticoïdes, des immunosuppresseurs et des anti-TNF-alpha.

Le traitement des poussées

Dans le cas de la RCH

ce sont les aminosalicylés (5-ASA le plus souvent) qui sont indiqués en cas de poussées d’intensité faible à moyenne. Ils sont prescrits par voie locale et/ou orale selon les localisations de l’inflammation. En cas d’échec ou d’intolérance, on a recours à la corticothérapie par voie orale et/ou en lavement dans les formes distales. Les aminosalicylés locaux doivent être prescrits préférentiellement aux corticoïdes locaux en raison de leur efficacité plus rapide et de leur meilleur profil de tolérance.

En cas de poussées de forte intensité, les corticoïdes sont prescrits d’emblée par voie orale, ou, en cas de colite grave, en I.V. en milieu hospitalier. La prednisone et la prednisolone par voie orale sont adaptées aux poussées d’intensité moyenne à sévère. Si ce n’est pas suffisant, on utilise des immunomodulateurs, comme les anti-TNF-alpha (infliximab), la ciclosporine (hors AMM) ou l’azathioprine.

Dans la maladie de Crohn

les aminosalicylés sont employés à forte dose en cas de poussées d’intensité faible. En cas d’échec et d’emblée en cas de poussée d’intensité moyenne à forte, on utilise des corticoïdes par voie orale. Le traitement par budésonide peut être utilisé en première intention en cas d’atteinte de l’iléon ou du colon ascendant. En cas d’échec des corticoïdes ou en cas de poussées d’intensité sévère, on a recours aux corticoïdes par voie IV ou aux anti-TNF-alpha (infliximab, adalimumab), ou à la chirurgie.

Le traitement d’entretien

Il n’est pas systématique et se fait en fonction du nombre des poussées, de leur rythme et de leur intensité.

La chirurgie

On a recours à la chirurgie en cas d’échec du traitement médical bien conduit, de contre-indication à celui-ci, ou d’urgence chirurgicale (colite grave, péritonite…). Entre 60 et 70 % des patients porteurs de la maladie de Crohn et 30 % pour la RCH seront un jour opérés. Le geste chirurgical consiste en l’exérèse des lésions inflammatoires. Dans la maladie de Crohn, comme la chirurgie ne guérit pas la maladie, l’étendue de la résection digestive doit être le plus limité possible. Dans la rectocolite hémorragique, l’ablation de l’ensemble du côlon et du rectum et la réalisation d’une anastomose iléoanale guérissent la maladie tout en conservant la fonction sphinctérienne.

LE SUIVI DU PATIENT

Le suivi nutritionnel est primordial. Aucun aliment ne peut être considéré comme responsable des poussées de la maladie de Crohn ou de la rectocolite hémorragique et aucun ne peut prévenir la survenue des poussées. En revanche, un régime adapté aux symptômes doit être suivi. Il se fait toujours sur prescription médicale. L’alimentation doit permettre d’éviter une dénutrition, due au manque d’appétit du fait de la maladie, ou à la peur de voir les symptômes réapparaître suite aux repas. La nutrition, pour les patients atteints de MICI, est une source de stress. Il est indispensable de leur donner des conseils diététiques clairs et de les soutenir psychologiquement. En période de crise, le patient doit suivre un régime appauvri en fibres. En dehors des poussées, aucun aliment n’est à bannir de l’alimentation.

TOUS MES REMERCIEMENTS AU PROFESSEUR YVES PANIS, SERVICE DE CHIRURGIE COLORECTALE, PÔLE DES MALADIES DE L’APPAREIL DIGESTIF (PMAD) – HÔPITAL BEAUJON.

Épidémiologie

• En France, les MICI touchent environ 2 personnes sur 1 000, soit entre 100 et 150 000 personnes.

• L’âge, au moment du pronostic, se situe entre 20 et 30 ans pour la maladie de Crohn, et vers 35 ans pour la rectocolite hémorragique.

• Il y a moins de 10 % de formes pédiatriques (survenant avant 17 ans).

QUESTION DE PATIENT

Je suis un régime sans résidus pour une poussée de ma maladie de Crohn. Je vais mieux et je dois maintenant passer à un régime sans fibres. Que dois-je manger ?

Indiquer à ce patient dans quel ordre les aliments doivent être réintroduits : d’abord des fruits en compote et certains légumes cuits (carotte, courgette épépinée). Ensuite, avec quelques jours entre chaque étape, du pain blanc et d’autres légumes cuits (sauf choux, oignons, ail, légumes secs, légumes à fibres dures), puis des fruits bien mûrs, ensuite des crudités et, enfin, des produits laitiers.