Dehors, les bijoux ! - L'Infirmière Magazine n° 247 du 01/03/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 247 du 01/03/2009

 

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Les bagues, montres et accessoires de beauté favorisent les infections à l'hôpital, mais les renvoyer au vestiaire n'est pas toujours évident...

« On maîtrise les technologies les plus sophistiquées, on n'arrête plus le progrès, et c'est un simple lavage de mains qui va mettre la vie du patient en danger ! À quoi bon ? » Nous sommes aux 2es États généraux des infections nosocomiales et de la sécurité du patient (1). Ce paradoxe, c'est une directrice adjointe de CHU qui le relève après avoir visionné Haut les bijoux, un court-métrage qui traite du port de bagues par le personnel soignant, et de l'hygiène manuelle.

Doigts enflés

Des prélèvements l'ont montré : les micro-organismes qui se développent autour des bijoux peuvent provoquer des infections associées aux soins et s'avérer dangereux pour le patient. Malgré tout, alliances et montres sont encore difficiles à chasser des salles d'opération. Le film cherche à comprendre pourquoi.

Pris au hasard dans les couloirs d'un hôpital, certains des contrevenants s'expliquent. « Je préfère garder mon alliance, j'ai peur de la perdre », argue celui-ci. « Moi j'ai le doigt enflé, je ne peux plus l'enlever », raconte celle-là. « Moi je ne la porte plus... ». Ouf ! Enfin une personne qui respecte la recommandation. « C'est qu'en fait, je viens de divorcer », dit-elle. Fausse joie.

Autre problème, celui des faux ongles, très en vogue en ce moment. « Ce sont de véritables nids à microbes ! », s'inquiète Claude Rambaud, présidente du Lien (2), association d'aide aux victimes des infections associées aux soins, à l'origine du congrès. « Et allez demander à une femme de les enlever quand ils sont collés ! »

Intérim à l'index

Au fil du débat, dans la salle, c'est tout un système qui est mis en cause. Au-delà de l'erreur individuelle, certains pointent un problème de management. « On a de plus en plus recours à l'intérim, on travaille avec des gens qui sont trop peu impliqués dans le parcours de soin », fait remarquer un médecin. « Cela favorise le survol des normes, les erreurs, et donc le risque infectieux. On est bien plus efficace quand on travaille avec des gens auxquels on est habitué. »

Difficile en effet de faire remarquer à une collègue qu'elle n'a pas fait sa friction ou qu'elle n'a pas ôté sa montre quand on la connaît depuis une heure... Même si l'on sait que ne pas le faire peut avoir des conséquences tragiques.

1- Les 2 et 3 février 2009, à Paris.

2- Lien : Lutte, information, étude des infections nosocomiales.

Le zéro « bling-bling » paie

Le centre hospitalier de Montluçon, dans l'Allier, a été distingué dans le palmarès 2009 du Lien pour « l'exemplarité d'un hôpital sans bijoux ». Il y a dix-huit mois, après un audit qui avait révélé des dérives concernant l'hygiène des mains, l'hôpital entier a suivi une formation d'une demi-journée par groupe de quinze. Médecins, personnel soignant, mais aussi agents administratifs et techniques ont joué le jeu. En à peine un an, la démarche a porté ses fruits : alliances, bracelets et montres ont déserté les lieux. « Les habitudes se sont prises très vite, se félicite le directeur. Des oublis arrivent parfois, mais nous sommes très proches du zéro bijou à présent. »