Écran traitant - L'Infirmière Libérale Magazine n° 357 du 01/04/2019 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 357 du 01/04/2019

 

TÉLÉCONSULTATION

L’EXERCICE AU QUOTIDIEN

Caroline Coq-Chodorge  

Une commune de la Manche teste une téléconsultation de médecine générale. Le patient est reçu par une Idel, dans une maison de santé sans généraliste. Explications de Chantal Mulo.

« Depuis le 28 novembre 2018, nous sommes treize Idels volontaires à participer à une expérience de téléconsultation de médecine générale. La seule différence avec une consultation classique est que le médecin est présent sur un grand écran de télévision. La téléconsultation a lieu dans une maison de santé de Saint-Georges-de-Rouelley, dans la Manche, une petite commune touchée par une pénurie de médecins généralistes. Le maire de la commune, un cardiologue du CHU de Caen, et un urgentiste spécialiste en télémédecine, le Dr Szwarc, en sont à l’initiative. Cette téléconsultation s’adresse à des patients qui n’ont pas de médecin traitant, il y en a beaucoup dans la commune. Ils sont informés par leur caisse d’assurance maladie qu’ils sont éligibles à cette nouvelle offre de soins et prennent rendez-vous avec un secrétariat médical, installé à Caen. La salle de téléconsultation est équipée d’un stéthoscope et d’une caméra connectés, ainsi que d’un électrocardiogramme. Nous commençons seules la consultation, afin de recueillir le consentement du patient, prendre sa carte Vitale, ouvrir un dossier médical. Nous prenons ses constantes et l’interrogeons sur le motif de la consultation.

Puis nous nous connectons, par visioconférence, avec l’un des sept médecins généralistes qui participent à l’expérience. Tous sont issus du département. À la fin de la consultation, nous imprimons l’ordonnance du médecin, nous réexpliquons, reformulons si nécessaire. Notre motivation n’est pas financière : nous sommes rémunérées 18 euros pour quarante-cinq minutes de consultation. Mais nous comptons sur la reconnaissance à terme de la consultation infirmière. Je suis infirmière depuis 1989, j’ai longtemps exercé à l’hôpital que j’ai quitté à cause du manque de moyens. Je travaille en libéral depuis 2011, car le domicile est un lieu où l’on peut encore avoir des valeurs humaines. Mais nous sommes seules. Cette expérience de télémédecine nous permet de retrouver des échanges interprofessionnels, avec des médecins, qui enrichissent notre pratique. Cela nous aide à mieux cerner des situations au domicile. Nous avons aussi des choses à apporter aux médecins, en particulier notre connaissance des maladies chroniques. »

Grégory Szwarc, médecin urgentiste et consultant en télémédecine

« Nous avons commencé par réaliser un diagnostic du territoire de santé : Saint-Georges-de-Rouelley est un village au cœurd’un territoire sous-dense, qui est en train de se transformer en zone médicale blanche. Une forte proportion de la population est âgée, en perte d’autonomie. La situation pourrait empirer mais, heureusement, il reste des généralisteset des Idels motivés. Cette téléconsultation, qui est une première en France, démarre fort. Les caisses ont envoyé des courriers à trois cents patientssans médecin traitant. En janvier, nous avons reçu des centaines d’appelset réalisé quatorze consultations. C’est un plus dans l’offre de soins, adaptéeà un territoire spécifique. Cette téléconsultation pourrait aussi être utile aux médecins de la commune pour voir des patients qui ont du mal à se déplacer. L’application est aussi évidente en maison de retraite. »