Les visites médicales d’aptitude à la conduite - L'Infirmière Libérale Magazine n° 355 du 01/02/2019 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 355 du 01/02/2019

 

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Lisette Gries  

Chauffeurs de poids lourds, personnes âgées malades chroniques ou encore patients contrôlés positifs pour l’alcool ou la prise de stupéfiants : dans la patientèle d’une Idel, les cas relevant des visites médicales d’aptitude à la conduite ne sont pas rares. Petit point sur la réglementation en vigueur, pour répondre aux questions des patients.

Les visites médicales du permis de conduire se divisent en deux grandes catégories : celles faisant suite à une infraction et celles liées à une pathologie ou à certains permis.

Alcoolémie et stupéfiants

Dans la première catégorie, il s’agit de conducteurs dont le permis a été suspendu, invalidé ou annulé suite à un contrôle faisant apparaître des taux d’alcoolémie supérieurs aux seuils autorisés ou la présence de stupéfiants, ou encore suite à un refus de se soumettre à ces contrôles. Une visite auprès d’une commission médicale primaire composée de deux médecins, dans un centre médical de la préfecture, est alors nécessaire pour récupérer son permis (en plus d’autres modalités, selon les cas : examen du code, tests psychotechniques…). Non pris en charge par l’Assurance maladie, ce rendez-vous coûte 50 euros.

Le conducteur qui a commis l’infraction doit faire la démarche de prendre rendez-vous auprès de la commission médicale et tenir compte des délais. Des résultats d’examens lui seront demandés, en lien avec sa situation. Par exemple, pour une infraction liée à la consommation d’alcool, un dosage des gamma-GT et des CDT ainsi que l’évaluation du VGM s’imposeront. Là encore, c’est à lui de se rendre au laboratoire pour les passer. « Ces examens ne sont pas remboursés par l’Assurance maladie, puisqu’il ne s’agit pas d’un suivi médical classique. On peut être tenté de les inclure dans une prescription d’analyses plus large, délivrée par son médecin traitant : certaines commissions refusent alors de les prendre en compte », avertit le Dr Marie-Thérèse Giorgio, médecin spécialisée en santé au travail, responsable de la rédaction du site visite-medicale-permis-conduire.org.

Permis nécessitant une visite médicale

Depuis 2012, une partie des visites n’a plus lieu auprès de la commission primaire, mais au cabinet d’un médecin libéral (généraliste ou spécialiste) agréé par le préfet. C’est le cas notamment des consultations nécessaires à l’obtention et au renouvellement de certaines catégories de permis : C (poids lourds), D (transport en commun), E (C) et E (D) (remorques). De même, si le candidat souhaite conduire un taxi, une ambulance, un véhicule de transport scolaire ou public, enseigner la conduite, ou encore être dispensé du port de la ceinture de sécurité, il devra se soumettre à un examen médical. Ces rendez-vous ne sont pas non plus remboursés par l’Assurance maladie et sont facturés 36 euros, sans possibilité de dépassement d’honoraire.

La liste des médecins agréés est disponible en ligne, sur le site de la préfecture. « Ces praticiens ont l’obligation de suivre une formation spécifique tous les cinq ans », précise Marie-Thérèse Giorgio. On prend alors rendez-vous directement auprès du cabinet choisi. Attention, le médecin qui réalise cette visite ne peut pas être le médecin traitant du conducteur. Si le médecin ne parvient pas à statuer, il peut adresser le conducteur à un spécialiste agréé ou à la commission médicale primaire.

Maladies chroniques interdisant le volant

De nombreuses maladies chroniques peuvent être un motif de restrictions à la conduite, comme le diabète, l’épilepsie, des pathologies cardiovasculaires, respiratoires, neurologiques ou encore des déficiences visuelles et auditives. Il est interdit de reprendre le volant sans avis médical après certains événements, comme un AVC ou la perte de vision d’un œil. « Dès qu’un soignant a un doute sur la pleine capacité de son patient à conduire, en raison d’une pathologie ou de son traitement, il devrait lui conseiller d’aller voir un médecin agréé », remarque Marie-Thérèse Giorgio.

Afin de préserver au maximum la mobilité des personnes, le médecin pourra trancher en faveur d’une ou plusieurs mentions restrictives sur le permis plutôt que d’une suspension totale. Ainsi, quelqu’un qui ne voit plus bien la nuit pourra être autorisé à conduire uniquement de jour. D’autres se verront imposer un périmètre restreint autour de leur domicile, l’interdiction d’avoir des passagers ou encore l’obligation d’une boîte automatique. Ces restrictions peuvent être temporaires ou faire l’objet d’une réévaluation obligatoire à une date donnée.

Est-il possible de prendre le volant en attendant ?

En commission médicale primaire ou dans leur cabinet, les médecins agréés remplissent un formulaire Cerfa à l’issue du rendez-vous, sur lequel ils notifient leur décision. Le conducteur doit ensuite le télécharger sur le site de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), et si l’avis est positif faire sa demande de permis en ligne. Cette démarche peut prendre plusieurs semaines. « Le Cerfa ne constitue pas un document suffisant pour conduire : seul le préfet est habilité à prendre la décision de délivrer ou de restituer un permis, souligne le Dr Giorgio. Cela vaut aussi pour les renouvellements de permis (poids lourds, taxi, etc.), obligatoires tous les cinq ans au minimum. Conduire avec un permis expiré revient à conduire sans permis : en cas d’accident, les conséquences peuvent être très sérieuses. »

Convaincre ses patients… ou les signaler

Les Idels rencontrent aussi des cas, nombreux, où il n’y a pas d’événement qui déclenche une interdiction de conduire mais où elles estiment qu’une visite s’impose. Convaincre le patient peut alors être complexe, puisque tant qu’il ne se présente pas à un médecin agréé, il peut continuer à prendre le volant sans restriction. « On peut mettre en avant l’argument de l’assurance, qui ne couvrira pas les frais liés à un accident s’il est prouvé que l’état de santé du conducteur pouvait être incompatible avec la conduite  », suggère Marie-Thérèse Giorgio.

En cas de refus, une dernière carte reste à jouer. « Idels, médecins, entourage, voisins, victimes d’accidents : tout le monde peut signaler une personne au préfet pour son caractère supposé dangereux sur la route. Celui-ci adresse alors un courrier au conducteur, sans mentionner la personne qui l’a averti, pour lui demander de se soumettre à une visite médicale », explique le Dr Giorgio. Dans le délai entre la réception du courrier et la visite, le conducteur n’a pas de restriction. « Pour les troubles cognitifs, des tests de conduite en auto-école, encore trop rares, peuvent être demandés par le médecin », conclut Marie-Thérèse Giorgio.

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