Un Idel s’enchaîne dans sa Caisse - L'Infirmière Libérale Magazine n° 346 du 01/04/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 346 du 01/04/2018

 

RELATIONS À L’ASSURANCE MALADIE

Actualité

Laure Martin  

Un infirmier libéral de Cherbourg (Manche) s’est enchaîné, le 20 mars, au bureau de la responsable frais de santé de sa caisse primaire d’Assurance maladie (CPAM). L’annonce d’un éventuel trop-perçu d’environ 15 500 €, l’a conduit à dénoncer sa situation et les conditions de travail des Idels.

« Nous ne nous laisserons pas faire face à cette politique de harcèlement et de répression de notre caisse, lance Florent Regal, Idel à Cherbourg et co-fondateur de l’Union nationale des infirmiers diplômés d’État libéraux (Unidel)*. Nous sommes prêts à faire des coups d’actions, des grèves de la faim s’il le faut. »

L’infirmier a reçu le 19 mars, un courrier de sa caisse d’Assurance maladie, l’informant d’une anomalie de facturation qui pourrait donner lieu à un trop-perçu de 15 537 euros. Avec ce courrier, une liasse de feuilles A4, recto-verso, sur lesquelles sont inscrites des lignes d’actes effectués par l’infirmier en 2016 et payés par l’Assurance maladie.

Deux mois pour pointer les actes sinon…

« Deux ans plus tard, la CPAM me reproche des libellés d’ordonnances qui ne seraient pas bons, des demandes d’ententes préalables manquantes. » L’infirmier dispose de deux mois pour pointer les actes et y répondre. Sinon, « on me réclamera le remboursement des 15 537 € », dénonce-t-il, précisant ne pas vouloir céder.

Malgré un rendez-vous fixé le 22 mars avec le directeur régional de la CPAM de la Manche, Florent Regal s’est rendu à sa caisse de Cherbourg le 20 mars. « Lorsque je suis entré dans le bureau de la responsable du service frais de santé, je m’y suis enchaîné », témoigne-t-il. Ses confrères d’Unidel, présents sur le site, ont fait venir la presse. « Je voulais faire un coup d’éclat, faire en sorte que la population soit alertée de la situation des Idels. » Il a contacté le médecin de SOS Médecin, également adjoint au maire en charge des Solidarités, afin qu’il serve de médiateur. De son côté, la responsable de la CPAM, après l’avoir laissé une heure seul dans son bureau, a appelé la police et le directeur régional de l’Assurance maladie. « La police est venue, à la demande de la direction de la caisse, pour sécuriser le site et encadrer la sortie du personnel, puisque un collectif d’une dizaine d’infirmiers a cherché à rentrer dans les locaux », a précisé la CNAM, que nous avons sollicitée.

Négociations à la mairie

À la suite de l’intervention du médiateur, Florent Regal, le directeur régional et les membres d’Unidel ont quitté la CPAM pour discuter à la mairie. « Nous lui avons fait comprendre que nous ne céderions pas aux menaces », raconte l’infirmier. Concernant son dossier, le directeur s’est engagé à le regarder « personnellement », à lui apporter une réponse avant le 15 avril, sans pour autant garantir pouvoir tout arranger. « Je lui ai dit que, dans tous les cas, je ne paierai pas et que je ne fournirai pas de pièces justificatives supplémentaires à celles que j’ai déjà données. » Le risque pour l’infirmier est d’avoir un indu notifié et de devoir aller devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS).

Une plainte déposée par la CPAM

L’association Unidel est d’autant plus déçue que depuis deux ans, ses membres ont entamé des discussions avec la CPAM afin d’éviter ce type de situations. « Nous avons fait des plaquettes pour que les médecins remplissent mieux leurs ordonnances et nous formons, avec la CPAM, les Idels qui s’installent pour éviter les erreurs de facturation », indique Florent Regal. L’association regrette aussi le manque de cohérence nationale dans le fonctionnement des caisses. La direction de la CPAM, qui a déposé plainte car des « insultes ont été proférées et un agent bousculé », souhaite néanmoins « que soit poursuivi un dialogue étroit avec la profession, afin d’améliorer notre compréhension mutuelle d’un sujet complexe ».

De son côté, Unidel conteste ces accusations, et réfléchissait même, à l’heure de notre bouclage, à aussi porter plainte pour diffamation.

* Sur Unidel, lire l’article dans notre numéro 324 d’avril 2016. Dans le même numéro, nous avions aussi parlé de Florent Regal à propos d’une vidéo qu’il avait réalisée sur les difficultés à obtenir le paiement du tiers payant par les mutuelles.

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