De nouveaux dispositifs avec la loi de santé | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 336 du 01/05/2017

 

ORGANISATION TERRITORIALE DES SOINS

Votre cabinet

Laure Martin  

La “loi Touraine” de 2016, dite “de modernisation de notre système de santé” (LMSS), a mis en place trois nouveaux schémas d’organisation des soins, dont les professionnels de santé libéraux, notamment les Idels, peuvent, à différentes échelles du territoire, se saisir.

Les ESP, à l’échelle de la patientèle

Une équipe de soins primaires (ESP) est un mode d’organisation coordonnée, conçu par des professionnels de santé du premier recours, dont au moins un médecin généraliste, qui souhaitent améliorer le parcours de santé de leurs patients. Infirmier, masseur-kinésithérapeute, sage-femme ou encore pharmacien peuvent également en être à l’initiative. Les ESP actuellement formées sont essentiellement issues des maisons de santé pluridisciplinaires, même celles “hors les murs”, et des centres de santé polyvalents, qui, avec la LMSS, sont devenus automatiquement des ESP. « Les professionnels de santé isolés aussi peuvent se constituer en ESP, rapporte la Direction générale de l’offre de soins (DGOS), interrogée par nos soins. Mais ils doivent pouvoir échanger des données au minimum via une messagerie de santé partagée et sécurisée. » Actuellement, il y a encore peu d’ESP avec des professionnels isolés, moins d’une douzaine. Condition sine qua non pour former une ESP, indépendamment du mode d’exercice choisi par les professionnels : un projet de santé. Élaboré par les professionnels, il a notamment pour objets la prévention, l’amélioration et la protection de l’état de santé de la population, ainsi que la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé. Parmi les thématiques possibles, la prise en charge de personnes vulnérables, les soins palliatifs à domicile, les réponses aux demandes de soins non programmés aux heures d’ouverture des cabinets. L’équipe doit ainsi contribuer à structurer le parcours de santé des patients et organiser la continuité des réponses. Ce projet doit être transmis à l’Agence régionale de santé (ARS) en vue d’une contractualisation. Mais l’absence d’engagement contractuel ne fait pas opposition à la création d’une ESP. Néanmoins, dans ce dernier cas, l’équipe ne pourra pas bénéficier de certains avantages, notamment des crédits issus du Fonds d’intervention régional.

Les CPTS, à l’échelle de la population

La communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) s’inscrit dans une approche populationnelle. Elle est organisée à l’échelle du territoire (30 000 à 50 000 personnes). Également créée à l’initiative des acteurs de santé, elle est composée de professionnels de santé (regroupés, le cas échéant, sous la forme d’une ou de plusieurs ESP), d’acteurs assurant des soins de premier ou de deuxième recours et d’acteurs médico-sociaux et sociaux concourant à la réalisation des objectifs du projet régional de santé. La LMSS précise que les regroupements de professionnels répondant à la définition des pôles de santé deviennent automatiquement, sauf opposition de leur part, des CPTS.

La CPTS doit elle aussi élaborer un projet de santé afin d’organiser la réponse à un besoin de santé sur le territoire. L’objectif est notamment de concourir à la structuration des parcours de santé et à la réalisation des objectifs du projet régional de santé. Le projet de santé doit être transmis à l’ARS en vue d’une contractualisation. Il y en a actuellement environ 35 en cours. À défaut d’initiative des professionnels, l’ARS peut prendre, en concertation avec les Unions régionales de professionnels de santé et les représentants d’autres formes d’associations, les initiatives nécessaires à la constitution de CPTS.

Les PTA, pour les parcours complexes

Une plateforme territoriale d’appui (PTA) s’organise à l’échelle du département pour un bassin de population d’environ 500 000 personnes. Elle n’a vocation à intervenir que pour l’appui à la coordination des patients en situations complexes. « Il devrait en avoir une à deux par département », précise la DGOS. Les mécanismes de fonctionnement et les services de la PTA doivent être appropriés pour les professionnels, qui doivent également participer à la gouvernance. Les PTA ont vocation à venir en appui aux professionnels de santé, notamment libéraux. Lorsqu’ils sont confrontés à des patients présentant plusieurs pathologies, elles-mêmes parfois associées à des problèmes sociaux, psychosociaux ou économiques, ils peuvent contacter la PTA qui répond à trois types de missions. Tout d’abord, l’information et l’orientation des professionnels vers les ressources sanitaires, sociales et médico-sociales de leurs territoires. Puis, l’appui à l’organisation des parcours complexes. Enfin, le soutien aux pratiques et aux initiatives professionnelles en matière d’organisation et de sécurité des parcours, d’accès aux soins et de coordination. Le déclenchement des services de la plateforme est activé par le médecin traitant ou par un autre professionnel en lien avec lui.

Aujourd’hui, il y a une cinquantaine de PTA en fonctionnement. Certaines sont issues de l’expérimentation Territoires de soins numérique, d’autres d’anciens réseaux de santé ou encore des Coordinations territoriales d’appui, mises en place dans le cadre de l’expérimentation destinée aux personnes âgées de 75 ans et plus en risque de perte d’autonomie (Paerpa), « après l’élargissement de leur champ d’actions initialement limité aux personnes âgées », rapporte la DGOS.

La mise à disposition des fonctions d’appui et la création de PTA relèvent de la compétence des ARS. Cependant, il est précisé dans les textes qu’elles doivent en priorité tenir compte des initiatives des professionnels de santé. À défaut, l’ARS pourra prendre la main même si « l’objectif n’est en aucun cas de contraindre mais de collaborer », conclut la DGOS.

info +

→ Articles 64, 65 et 74 de la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016.

→ Instruction n° DGOS/R5/2016/392 du 2 décembre 2016 relative aux ESP et aux CPTS.

ET LES GHT ?

Les Groupements hospitaliers de territoire (GHT) sont organisés autour de filières de soins afin de mettre en place une prise en charge coordonnée et graduée. « Les GHT vont s’organiser avec les CPTS au sein des territoires, cela semble évident même si ce n’est pas obligatoire, souligne la Direction générale de l’offre de soins. Notamment sur les sujets qui intéressent à la fois la ville et l’hôpital comme la prise en charge des soins non programmés, la réduction des hospitalisations ou encore la réhabilitation accélérée après chirurgie. » Deux CPTS sont d’ailleurs en projet autour de cette dernière thématique, ce qui concerne directement les Idels puisque, dans ce cadre, elles sont mobilisées pour accueillir le patient.