Les varices - L'Infirmière Libérale Magazine n° 329 du 01/10/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 329 du 01/10/2016

 

Phlébologie

Cahier de formation

Le point sur

Marie Fuks*   Dr Vincent Crebassa**  

En France, 70 % des patients qui nécessiteraient un traitement pour leur maladie veineuse tardent à consulter. Une erreur qui peut les exposer à des complications sévères alors qu’une prise en charge précoce permet de les éviter.

Rappels

Les varices sont des veines qui, sous l’effet d’une enzyme naturelle en excès (la métalloprotéase de type 3) à l’origine de la destruction excessive de l’élastine, se dilatent et perdent leur capacité à remonter le sang vers le cœur (retour veineux). Le sang stagne et provoque une hyperpression qui endommage les tissus avoisinants et aggrave les symptômes à type de lourdeurs, douleurs, œdème, crampes nocturnes, impatiences, démangeaisons. En l’absence de prise en charge, les patients présentant des facteurs de risque (hérédité(1), obésité, sédentarité, grossesse) s’exposent à une évolution plus rapide de leur maladie (pigmentation ocre ou brune, fragilisation de la peau pouvant aller jusqu’à l’ulcère) et à de multiples complications (hémorragie variqueuse, phlébite et embolie pulmonaire)(2). Il faut donc encourager les patients à ne pas attendre pour consulter. D’autant que, si l’on ne sait pas “réparer” les varices, on peut ralentir leur évolution et, plus radicalement, les neutraliser ou les supprimer.

Ralentir l’évolution : l’intérêt de certains veinotoniques

Le déremboursement des veinotoniques est souvent interprété comme un manque d’efficacité de ces médicaments. Pourtant, le comité international qui présidait aux conclusions de la conférence de consensus relative à la prise en charge de la maladie veineuse chronique(3) a attribué une recommandation de grade A à trois traitements veinoactifs, dont un est commercialisé en France : la fraction flavonoïque purifiée micronisée (Daflon 500 mg). En ralentissant la production de métalloprotéase, ce traitement préserve l’élasticité de la paroi veineuse et agit ainsi sur les symptômes. Lorsque la maladie évolue, sont accessibles plusieurs traitements physiques consistant à éliminer chimiquement, thermiquement ou chirurgicalement la varice.

Les traitements

La technique endoveineuse chimique

Les recommandations internationales privilégient la sclérothérapie écho-guidée à la mousse en première intention car elle constitue l’indication de choix dans de nombreuses circonstances. Elle consiste à injecter une mousse sclérosante sous contrôle échographique, ce qui permet d’atteindre l’origine hémodynamique de la varice (elle peut être dans la cuisse ou dans le ventre)(4) pour supprimer la source de l’hyperpression avant de traiter l’ensemble du tronc veineux dilaté. La mousse induit une réaction inflammatoire naturelle qui ferme la varice et la transforme en un cordon fibreux qui disparaît progressivement. Elle peut occasionner des douleurs passagères à type de “bleus”, sans conséquence sur la qualité de vie. Mais elle ne permet pas toujours de traiter les varices d’un diamètre supérieur à 9 mm pour lesquelles on peut avoir recours à des techniques d’ablation thermique ou chirurgicale.

Les techniques endoveineuses thermiques

Il s’agit de brûler la veine à l’aide d’une source de chaleur produite par laser ou radiofréquence. Ces traitements sont réalisés en ambulatoire et ne nécessitent pas d’anesthésie générale.

→ Le laser : technique adaptée à des veines de gros diamètres rectilignes en raison de la semi-rigidité du câble du laser.

→ La radiofréquence : elle consiste à provoquer l’échauffement de la paroi veineuse à l’aide d’une résistance électrique ou d’un courant de radiofréquence qui produit des vibrations ioniques.

→ La vapeur d’eau : cette technique récente, encore marginale, consiste à pulser, via un cathéter, des jets de vapeur d’eau à 120 °C et à une pression de 6 bars.

La chirurgie

La chirurgie classique par “stripping” (arrachage de la veine), coûteuse en temps d’hospitalisation et en arrêt de travail (trois semaines), a aujourd’hui moins sa place dans l’arsenal thérapeutique. Elle est remplacée par la chirurgie “mini-invasive” par ablation sélective des varices sous anesthésie locale ou éventuellement par le stripping court ou la cure conservatrice et hémodynamique de l’insuffisance veineuse en ambulatoire. Il s’agit de phlébectomies en ambulatoire qui consistent à réaliser l’ablation des varices par de multiples micro-incisions sous anesthésie locale.

La compression

Quelle que soit la technique proposée, la compression par bas de compression (chaussette, bas cuisse ou collants) est prescrite dans les suites immédiates du traitement afin de consolider les bienfaits de l’intervention en favorisant un retour veineux efficace aussi bien au repos qu’à l’effort. En l’absence de contre-indication (enfilage impossible, œdème très important par exemple), les bas sont préférés aux bandes et doivent être parfaitement adaptés. Si la primo-prescription de bas relève du médecin, le renouvellement à l’identique (lire aussi notre Mémento livré avec ce numéro) peut être prescrit par l’Idel, qui pourra aussi rappeler les règles d’hygiène de vie à respecter (lire l’encadré) et les astuces pour faciliter l’enfilage des contentions : talquer préalablement le pied, enfiler un bas normal sous la contention, utiliser des gants ménagers en caoutchouc ou des dispositifs d’aide à l’enfilage (comme le Rolly, Sigvaris). Si le poids du patient a changé ou s’il présente un œdème au moment du renouvellement, il est conseillé de reprendre les mesures et de demander au pharmacien ou à l’orthopédiste de les contrôler.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.

(1) L’étude “Hérédité” montre que les hommes transmettent autant la maladie que les femmes, qui sont néanmoins plus touchées du fait de leur statut hormonal. En présence de facteurs héréditaires, la maladie veineuse apparaît plus tôt (fréquence 2,5 fois plus importante en dessous de 35 ans), et est plus grave et plus fréquente à tous les âges.

(2) Les varices jouent un rôle dans la survenue des 300 000 phlébites et 15 000 décès par embolie pulmonaire chaque année en France.

(3) A.N. Nicolaides et col., “Management of chronic venous disorders of the lower limbs : guidelines according to scientific evidence”, International Angiology. 2008 ; Feb ; 27 (1) : 1-59.

(4) Dans 15 % des cas, les varices ont une origine périnéale, ce qui impose de réaliser, en prérequis à tout traitement, un écho-doppler des varices associé à un examen abdomino-pelvien simultané.

Hygiène de vie : les points clés

Les règles d’hygiène de vie consistent à jouer sur les facteurs de risque modifiables en respectant quelques principes simples :

→ marcher activement au moins un quart d’heure par jour, au mieux trente minutes à une heure ;

→ contrôler son poids par une alimentation équilibrée associée à une activité physique choisie en privilégiant les sports d’eau, la marche, les sports à mouvements progressifs et réguliers (vélo…) ;

→ prendre un veinotonique (sur conseil voire prescription médicale) deux mois l’été et un mois l’hiver pour combattre les enzymes surstimulés à ces périodes ;

→ en présence d’œdème, surélever les pieds des lits de 8 à 15 cm ;

→ éviter de croiser les jambes et de porter des vêtements serrés susceptibles de faire garrot. Éviter de s’exposer à une chaleur excessive (bain, sauna, hammam, épilation à la cire chaude, bronzage en cabine ou au soleil prolongé) et passer les jambes régulièrement sous l’eau froide en cas de chaleur ambiante élevée ;

→ réaliser, de façon répétée, des mouvements de flexion dorsale et plantaire du pied en cas de position assise ou debout prolongée ; masser les deux jambes depuis la cheville jusqu’aux genoux, faire des mouvements de pédalage des jambes allongé sur le dos avant le coucher… ;

→ consulter rapidement dès les premiers symptômes. La réalisation du Vein’Score*, dont l’application (www.veinscore.com) est téléchargeable sur smartphone, peut être suggérée par l’Idel afin d’objectiver l’âge veineux du patient, de le sensibiliser à la maladie veineuse et de l’encourager à consulter ;

→ chez les patients à risque, utiliser une compression en prévention primaire en cas de grossesse, de station debout ou assise prolongée, d’immobilisation ou de réduction durable dela mobilité (maladie intercurrente, intervention chirurgicale, voyage en avion…).

* V. Crebassa, F.-A. Allaert, “L’âge veineux et le Vein’Score : un nouvel outil pour sensibiliser les patients à leur pathologie”. Revue de phlébologie n° 3, septembre 2014.