La France doit mieux faire - L'Infirmière Libérale Magazine n° 324 du 01/04/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 324 du 01/04/2016

 

CONFLIT D’INTÉRÊTS

Actualité

Sandra Mignot  

TRANSPARENCE > Un rapport de la Cour des comptes évalue les limites de la loi Bertrand sur la prévention des conflits d’intérêts dans le système sanitaire. Cinq organismes sont étudiés.

Les dispositifs de transparence et de gestion des conflits d’intérêts ne permettent pas de rendre compte de façon simple et directe des liens entre les professionnels de santé et l’industrie et, dès lors, de garantir l’absence de tout conflit d’intérêts susceptible d’affaiblir la décision sanitaire. » Telle est la conclusion de la Cour des comptes, qui s’intéresse, dans un rapport publié le 23?mars, à la prévention des conflits d’intérêts en matière d’expertise sanitaire.

Différentes interprétations

Élaboré à la demande de la commission des affaires sociales du Sénat, le document estime que le dispositif de transparence institué par la loi de 2011, dite “Sunshine Act” ou “loi Bertrand”, présente des failles majeures. Et la liste des reproches est longue. En effet, des vérifications réalisées auprès de cinq administrations* ont révélé nombre de difficultés. Ainsi, près de 8 % des experts échapperaient aux obligations déclaratives strictes de leurs conflits d’intérêts, en fonction de l’interprétation des différents textes régulateurs : c’est le cas des membres des commissions du CEPS, qui bénéficient de la législation antérieure, plus souple, ou des représentants des administrations centrales. La Cour a par ailleurs relevé un taux d’anomalies de 22 % sur les déclarations qu’elle a contrôlées (et près de 40 % en ce qui concerne l’Oniam et le CEPS) : absence de la déclaration ou non-publication de celle-ci, absence de mise à jour annuelle, lacune dans le chiffrage de la rémunération reçue…

Absence de site unique

Enfin, les Sages pointent l’inexistence d’un site Internet unique permettant de publier ces déclarations, pourtant prévu par un décret de 2012, ainsi que l’absence d’une définition précise de l’expert sanitaire, qui permet à certains spécialistes de bénéficier d’un allègement de leurs obligations légales. Des progrès sont néanmoins soulignés comme la mise en œuvre de la publicité des débats d’expertise ou l’analyse des liens d’intérêts réalisée par les administrations contrôlées.

Les auteurs du rapport préconisent donc une intervention plus affirmée du ministère de la Santé sur le déploiement de la politique de prévention des conflits d’intérêts, ainsi que la mise en œuvre urgente du site Internet unique des déclarations individuelles. Ils recommandent l’accélération de la mise en place de déontologues dans chacune des agences concernées, qui pourraient s’organiser en réseau afin d’élaborer une procédure commune de règlement des conflits d’intérêt. Enfin, la création d’un mécanisme de contrôle de la véracité des déclarations d’intérêts est souhaitée.

* Haute Autorité de santé, Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, Institut national du cancer, Comité économique des produits de santé (CEPS) et Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam).