L’occlusion intestinale - L'Infirmière Libérale Magazine n° 321 du 01/01/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 321 du 01/01/2016

 

Urgence digestive

Cahier de formation

Le point sur

Maïtena Teknetzian  

Affection sévère aux complications potentiellement létales, concernant principalement les sujets âgés, l’occlusion intestinale est une des principales urgences digestives.

De quoi s’agit-il ?

→ L’occlusion intestinale correspond à un arrêt complet du transit intestinal.

→ Au plan clinique, une occlusion intestinale se caractérise par des douleurs abdominales, des vomissements bilieux puis fécaloïdes et l’arrêt des matières et des gaz qui constitue le symptôme essentiel.

→ Le siège de l’occlusion peut concerner l’intestin grêle (occlusion dite “haute”, représentant 80 % des cas) ou le côlon/rectum (occlusion basse, 20 % des cas).

→ Une occlusion intestinale a des conséquences locales mais aussi générales, à savoir :

– une dilatation des anses intestinales en amont de l’occlusion,

– des troubles de l’absorption intestinale et une accumulation de liquide dans le tube digestif à l’origine d’une hypovolémie, d’une déshydratation et d’une hypotension,

– une anoxie tissulaire liée à une altération de la circulation sanguine avec un risque de nécrose digestive (notamment en cas d’occlusion par strangulation intestinale) et de perforation,

– des complications infectieuses liées à la stase intestinale à type de péritonite, voire de septicémie, pouvant engager le pronostic vital.

Quels sont les mécanismes de l’occlusion ?

On distingue deux grands types d’occlusion : l’occlusion mécanique (90 à 95 % des occlusions) et l’occlusion fonctionnelle (ou iléus paralytique).

Occlusion mécanique

→ Par strangulation par une bride en rapport avec un antécédent d’intervention chirurgicale (cause la plus fréquente des occlusions hautes représentant environ 75 % des cas), ou du fait d’un volvulus (torsion d’une anse intestinale sur elle-même), d’un étranglement herniaire ou d’une invagination intestinale (principalement chez le nourrisson de 8 à 12 mois, mais possible aussi chez l’adulte).

→ Par obstruction du fait d’un obstacle s’opposant à la progression des matières : tumeur, bézoard (agglutination de fibres végétales dans l’intestin grêle), hématome de la paroi intestinale, lithiase biliaire ayant migré dans le grêle via une fistule, sténose inflammatoire (maladie de Crohn), fécalome morphinique.

Occlusion fonctionnelle

→ Elle est liée à une paralysie intestinale susceptible de concerner les personnes âgées alitées, les patients atteints de troubles neurologiques (complications du diabète, maladie de Parkinson, accident vasculaire cérébral, sclérose en plaques), ou en post-opératoire.

→ Cette paralysie intestinale peut aussi être liée à une hypokalémie ou être d’origine iatrogène (induite par neuroleptiques ou morphiniques en particulier).

Comment est posé le diagnostic ?

Examen clinique

→ Il met en évidence une distension abdominale et un météorisme (ballonnement abdominal visible associé à un tympanisme décelé par la percussion). L’examen clinique recherche aussi une cicatrice abdominale, témoin d’une intervention chirurgicale ancienne, pouvant orienter vers une bride responsable de l’occlusion.

→ L’auscultation retrouve des borborygmes (bruits intestinaux liés à un hyper-péristaltisme en amont de l’obstacle) ou au contraire un silence abdominal (en cas de nécrose ou d’iléus paralytique).

→ L’examen pelvien peut mettre en évidence la cause comme une tumeur ou un fécalome.

→ Le contrôle de certains paramètres comme la pression artérielle, la fréquence cardiaque, la diurèse et la température permet d’évaluer les conséquences de l’occlusion.

Examen biologique

La NFS, les marqueurs de l’inflammation et l’ionogramme sanguin sont contrôlés pour apprécier le retentissement de l’occlusion.

Imagerie

→ La tomodensitométrie est devenue l’examen de référence, du fait de sa performance diagnostique. Elle permet d’établir un bilan lésionnel, de rechercher des signes de strangulation et d’ischémie, mais aussi de visualiser l’obstacle responsable de l’occlusion et donc d’établir le diagnostic étiologique.

→ La radiographie d’abdomen sans préparation, très pratiquée, montre des images typiques de niveaux hydro-aériques dans le tube digestif, traduisant la présence de liquide (opacité à bord supérieur horizontal) surmontée par de l’air (zone claire), dont la forme varie en fonction du siège de l’occlusion (voir tableau).

Quel est le traitement ?

L’hospitalisation est nécessaire. Le traitement associe presque toujours un traitement médical et un traitement chirurgical.

Traitement médical

→ Il repose sur une réhydratation par perfusion, la mise en place d’une sonde naso-gastrique pour aspiration digestive, l’administration d’antalgiques/antispasmodiques par voie intraveineuse, éventuellement une antibiothérapie, des lavements évacuateurs en cas de fécalome morphinique et, si l’occlusion est fonctionnelle, la correction de la cause (arrêt du médicament responsable en cas d’origine iatrogène ou traitement d’une hypokaliémie par exemple).

→ Ce traitement médical peut suffire en cas d’occlusion fonctionnelle qui n’implique pas toujours de geste chirurgical (sauf en présence de foyer septique).

Traitement chirurgical

→ Il dépend du type d’occlusion. Il consiste à lever l’obstacle responsable de l’obstruction, en une détorsion de l’anse intestinale, en une section de bride ou libération de collet herniaire, ou en une résection intestinale si nécrose.

→ L’occlusion mécanique par strangulation est une urgence chirurgicale.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.

Rôles de l’Idel

→ Dépister les patients à risque d’occlusion : patients âgés, sujets alités ou à mobilité réduite, patients ayant subi des interventions chirurgicales avec laparotomie, diabétiques atteints de neuropathie, parkinsoniens, hypothyroïdiens, patients souffrant de sclérose en plaques, ou sous neuroleptiques, anticholinergiques ou morphine.

→ Prévenir une constipation et un fécalome : surveiller le transit, encourager dans la mesure du possible une activité physique et la mobilisation du patient ou, à défaut, des massages du cadre colique, conseiller la consommation de fibres et l’augmentation de l’apport hydrique, s’assurer de l’accessibilité aux toilettes, reconditionner le réflexe de défécation (horaire, position…), s’assurer en cas de traitement morphinique que la prescription comporte aussi un laxatif.

→ Alerter le médecin traitant en cas de douleur abdominale, de constipation, de signes cliniques de déshydratation, de météorismes.

→ Orienter aux urgences en cas de vomissements fécaloïdes, d’apparition brutale d’une douleur intense ou d’hyperthermie.