Ma vie sans l’ONI - L'Infirmière Libérale Magazine n° 312 du 01/03/2015 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 312 du 01/03/2015

 

L’exercice au quotidien

Françoise Vlaemÿnck*   Boris Hurtel**  

Diplômée d’État il y a près de trente ans, Laurence est installée comme libérale dans la banlieue de Toulouse (Haute-Garonne). Depuis toujours, elle refuse, par conviction, d’adhérer à l’Ordre national. Témoignage.

« J’étais favorable à l’idée de création d’un Ordre infirmier puisque cela permettait à notre profession de se regrouper et lui offrait une visibilité nationale. Mais, en me renseignant, je me suis rapidement aperçue que la plupart des syndicaux libéraux étaient à l’origine de l’Ordre. D’emblée, je me suis sentie “grugée” car, avant même de naître, l’Ordre était déjà phagocyté par les syndicats qui ne représentent qu’une minorité de libérales. Mon impression s’est confirmée puisque nombre d’élus de l’Ordre sont également des élus syndicaux… J’ai découvert également un sondage* – sur lequel s’étaient largement appuyés les tenants de l’Ordre pour promouvoir sa création, notamment auprès des politiques – qui annonçait que près de 92 % des infirmières étaient favorables à la création d’un Ordre infirmier. Mais seules 2 200 infirmières avaient répondu à ce sondage sur Internet (dont plus de 680 étudiants en soins infirmiers) auquel on pouvait participer plusieurs fois, rendant ce panel loin d’être représentatif de notre profession ! Après l’installation de l’Ordre et les “affaires” qui ont suivi, je suis donc définitivement devenue anti-Ordre. À l’automne 2009, l’Ordre m’a adressé un dossier d’inscription de huit pages qui a fini à la corbeille. Plus d’un an après, j’ai reçu un courrier de menaces de déconventionnement de la CPAM si je ne m’inscrivais pas à l’Ordre ; la lettre a pris le même trajet que le dossier. Et depuis… Rien. Je poursuis mon activité sans aucune contrainte. Par peur du déconventionnement, mes deux collègues se sont inscrites. Je reste persuadée que nombre de libérales adhèrent par obligation et non par conviction. Je suis consciente cependant d’avoir une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Je peux être inquiétée pour exercice illégal de la profession. Si demain je recevais de nouvelles menaces de la CPAM, je jouerais la montre comme je le fais depuis plus de cinq ans. Comme près de 75 % des infirmières qui ne se sont toujours pas inscrites, je veux rester non-adhérente à l’Ordre le plus longtemps possible. »

* Sondage réalisé par l’Association pour l’Ordre des infirmiers et infirmières de France en partenariat avec infirmiers.com et publié sur son site le 12?novembre 2005.

Dans un prochain numéro, nous donnerons la parole à une Idel adhérente de l’ONI.

Contrepoint

Quand la non-inscription est le fait de l’ONI…

Yann de Kerguenec, directeur des affaires juridiques de l’ONI

« L’ONI peut refuser d’inscrire une infirmière au tableau ordinal. L’article R. 4112-2 du Code de la santé publique?, commun aux ordres médicaux et paramédicaux, prévoit plusieurs cas. Sur les 163 000 membres que comptent l’ONI, seuls 49 infirmiers se sont vu refuser leur demande inscription au tableau à ce jour. Parmi ces derniers, une seule a épuisé l’ensemble des recours et le Conseil d’État a finalement validé la décision du Conseil national de l’Ordre. En l’espèce, l’infirmière avait été condamnée pour des violences envers des enfants. L’Ordre peut aussi être amené à prendre des mesures disciplinaires, voire à prononcer une radiation, s’il a connaissance d’une condamnation grave a posteriori d’une inscription. Les tribunaux ont d’ailleurs l’obligation de transmettre à l’Ordre toute condamnation impliquant un infirmier. Bien entendu, toutes les situations sont examinées au cas par cas. »