Détecter une difficulté d’observance - L'Infirmière Libérale Magazine n° 310 du 01/01/2015 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 310 du 01/01/2015

 

Cahier de formation

Savoir faire

Face à un patient chronique, il est important de détecter les signes d’une rupture d’observance, d’en explorer les causes et d’adapter son intervention en conséquence.

Monsieur D., 67 ans, diabétique de type 2, se plaint de ses résultats de glycémie qui sont élevés. Alors que vous le vaccinez contre la grippe, vous lui demandez s’il rencontre des difficultés avec son traitement…

Il dit n’en rencontrer aucune, si ce n’est sa glycémie, élevée malgré ses efforts alimentaires. Il a juste des insomnies chroniques mais ce n’est pas grave, il se lève à 11 heures en ce moment. Cette dernière information vous interpelle et vous faites reformuler au patient : vous identifiez qu’il saute son petit-déjeuner, donc une prise de metformine chaque jour… Vous lui proposez d’appeler le médecin pour adapter la prise de metformine au regard de ses récentes insomnies.

REPÉRER LES SIGNES D’ALERTE

→ Des signes cliniques : non-amélioration des symptômes ou constantes biologiques (hypertension, hyperglycémie, INR…), apparition d’œdèmes, maux de tête…

→ Des boîtes de médicaments non entamées (ou trop vite terminées).

→ Des sacs entiers prêts à être rapportés à la pharmacie pour recyclage.

→ Une ordonnance qui s’avère non délivrée dans sa totalité.

→ Une armoire à pharmacie trop pleine (notamment de produits sur prescription).

→ Une ordonnance mensuelle non délivrée en intégralité.

→ Le refus exprimé de prendre un médicament.

→ L’expression d’un certain “ras-le-bol” du traitement (« un jour je vais tout arrêter », « j’en prends tellement »…), d’une confusion (« je suis un peu perdu avec tous ces médicaments ») ou d’une méfiance (« ça ne sert pas à grand-chose… »).

→ La plainte d’effets indésirables (« je crois que celui-ci je ne le supporte pas bien », « les maux de tête, ce ne serait pas tous ces médicaments… »).

→ Les dires d’un proche ou d’un aidant (« il ne veut pas le prendre »).

DÉCULPABILISER

Le questionnement direct est la façon la plus simple de mettre la personne en confiance pour verbaliser ses difficultés d’observance. Utiliser de préférence des questions ouvertes (« Comment se passe votre traitement ? », « Quelles difficultés rencontrez-vous ? ») qui appellent au dialogue. Attention à la manière : obtenir du patient qu’il confie ses difficultés implique de “casser” la relation paternaliste, souvent perçue par le patient comme culpabilisante :

→ éviter les tournures qui traduisent un jugement : « Vous prenez bien votre traitement au moins ? », « Voyons si vous êtes sérieux avec vos médicaments », etc. ;

→ replacer l’inobservance dans la normalité au regard de la maladie chronique : « Suivre un traitement au long cours est difficile pour la majorité des malades » ;

→ quitter le costume de “gendarme” : « Ne pas prendre votre traitement reste votre droit » ;

→ valoriser le savoir du patient : « La façon dont vous gérez votre traitement m’intéresse » ;

→ insister sur l’intérêt d’aborder le sujet : « Ne pas prendre correctement son traitement peut avoir des conséquences dont nous pouvons rediscuter. Peut-être pouvons-nous trouver ensemble une solution à vos difficultés. »

ÉVALUER

Le test de Girerd*, le seul scientifiquement validé, est un exemple d’outil à utiliser en cas de difficulté d’observance suspectée.

* À télécharger sur le site de l’Assurance maladie (via bit.ly/1wVOB75).