« Un cabinet d’Idels, quelle entreprise ! » - L'Infirmière Libérale Magazine n° 309 du 01/12/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 309 du 01/12/2014

 

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CHANTAL BÉRAUD  

GESTION > En 2012, six cabinets d’Idels ont été en cessation de paiement en Bourgogne. Du jamais-vu, qui a engendré une action originale de la part de l’URPS-infirmiers.

« C’est trop moche de déposer le bilan alors qu’avec plus de rigueur, un cabinet d’Idel peut tourner. »

Des plaques posées n’importe où

C’est le cri du cœur de Véronique Fagot, présidente de l’Union régionale des professionnels de santé (URPS)- infirmiers de Bourgogne. Et de poursuivre avec conviction : « Si notre profession n’est pas un commerce, le cabinet reste une entreprise ! Ces dernières années, nous avons été étonnés de voir des consœurs s’installer en libéral, en posant leur plaque un peu n’importe où. Sans aucune étude de marché. » Comment expliquer ce phénomène ? « D’abord, la formation en Ifsi ne comprend malheureusement aucun module spécifique à l’exercice en libéral. Du coup, après avoir accompli leurs 3 200 heures en milieu hospitalier, il y a des jeunes qui s’installent sans rien connaître des contraintes de gestion. Il en va parfois de même pour des infirmières hospitalières plus âgées. En raison de la détérioration de leurs conditions de travail, on constate leur arrivée massive sur le terrain. »

Résultat : ces dernières années, à la suite de négligences administratives (tels une non-déclaration à l’Urssaf ou un non-paiement des cotisations à l’Assurance maladie), plusieurs procédures judiciaires se sont enclenchées. « Comme le processus prend parfois des années, des Idels se sont retrouvées avec des montants colossaux à rembourser, de l’ordre de 50 000 à 60 000 euros ! C’est donc le dépôt de bilan. »

Une formation en DPC

Face à cette situation, l’URPS a réagi. « Nous voulions intervenir en amont mais c’est impossible car notre convention nationale ne prévoit pas de formule de tutorat. Nous avons donc ciblé les Idels ayant moins de deux ans d’installation ainsi que les remplaçants. Cinquante personnes ont participé à deux séminaires de gestion de deux jours, payés par l’ARS, avec une participation financière de l’URPS. » Il est déjà acquis que la formation en 2015 passera en DPC validante. Si tout fonctionne bien, elle devrait par la suite s’étendre à toute la France.

« Une nomenclature pas simple à maîtriser »

« La nomenclature, affirme Véronique Fagot, est très codifiée mais pas simple à maîtriser ! Des débutants peuvent donc se sous-payer ou sur-coter, ce qui donne naissance à des indus financiers à rembourser après contrôle des caisses. Par exemple, la tarification de nuit ou la manière de facturer les indemnités de déplacements kilométriques posent parfois problème. » Côté comptabilité, si l’on peut déduire certains achats (comme le matériel médical, une blouse, quelques repas au restaurant au titre de réunions de travail), il est impossible de déduire « les chaussures ni les vêtements du civil, et encore moins le coiffeur ». Certains débutants confondent aussi chiffre d’affaires et bénéfice… « Au vu des questions posées, je pense que la gestion en libéral devrait être enseignée comme une spécialisation, au même titre qu’infirmière puéricultrice ou Ibode. À défaut, je conseille d’entrer dans le métier avec un contrat de collaboration ou en faisant des remplacements comprenant les actes administratifs. A minima, il faut se faire aider par une connaissance qui assure du tutorat bénévole », commente Véronique Fagot.