Le blues des libérales - L'Infirmière Libérale Magazine n° 304 du 01/06/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 304 du 01/06/2014

 

COOPÉRATION

Actualité

FRANÇOISE VLAEMŸNCK  

TÉMOIGNAGES → La 3e Journée de l’infirmière libérale, organisée par l’URPS-infirmiers de Picardie, a porté sur la collaboration avec Ssiad et HAD. L’harmonie ne semble pas toujours évidente…

Sur le papier, l’invitation de l’URPS (Union régionale des professionnels de santé)-infirmiers de Picardie, le 20 mai à Chamouille (Aisne), lors de la 3e journée de l’infirmière libérale, « à mieux se connaître pour mieux travailler ensemble », était séduisante. Sur le terrain, la réalité d’une telle harmonie entre libérales, hospitalisation à domicile (HAD) et services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) est bien moins évidente… « L’HAD ne devrait prendre en charge que des patients nécessitant une hospitalisation. Le problème aujourd’hui est qu’elle traite des malades qui, hier encore, relevaient de notre activité », lance une infirmière de l’Oise. « J’ai vraiment la sensation qu’on se dispute les patients, mais le combat est inégal et nous n’avons pas les moyens de lutter, de faire entendre notre voix », renchérit une autre. Bref, sur fond d’inquiétude, le ton de la journée fut rapidement donné. Et si seulement une petite centaine d’Idels avaient fait le déplacement dans l’Aisne sur les 1 600 qui exercent en région Picardie, l’unisson de leurs propos traduit un malaise profond.

« L’avenir est devant vous »

Un malaise que n’aura pas dissipé Yves Daudigny, sénateur de l’Aisne qui a ouvert la journée. Rapporteur général de la Commission des affaires sociales et président de la Mission d’évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale, il a pourtant tenu a réaffirmer que, dans le cadre de la stratégie nationale de santé *, priorité serait donnée aux soins de ville, « même si l’hôpital demeure au cœur du système de santé, a-t-il précisé. À l’heure de la promotion de l’ambulatoire, qui mieux que les infirmières libérales peuvent assurer le suivi, la sécurité et la qualité des soins ? » Et de conclure : « L’avenir est devant vous. » « Pour ma part, j’ai le sentiment que nous allons disparaître » a, en aparté, rétorqué une libérale de l’Aisne. « Lorsqu’un patient sort de l’hôpital, ce n’est pas une infirmière libérale que l’on contacte, mais un Ssiad ou une HAD. Nous avons constitué notre patientèle grâce à la qualité de notre travail, nous nous sommes battues pour avoir ce que l’on a. Aujourd’hui, on nous coupe l’herbe sous le pied en prenant le patient à la racine ! », se désespère une autre. « En revanche, lorsque les HAD manquent de lits, elles savent nous appeler pour reprendre le patient alors que les soins sont les mêmes… », glisse l’une de ses collègues. Bref, il faudra sans doute plus d’une journée d’échanges pour « mieux se connaître pour mieux travailler ensemble… ».

* La stratégie nationale de santé doit définir le cadre de l’action publique pour les années à venir afin de combattre les inégalités de santé et réduire les difficultés d’accès au système de soins. Elle s’inscrit dans le droit fil des travaux du Haut Conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie et s’appuie sur les analyses du comité des sages réuni autour d’Alain Cordier (source : Agence régionale de santé).

Combien ça coûte…

Un message d’Idel est parvenu à la rédaction concernant l’organisation de cette journée par l’URPS-infirmiers de Picardie. « Par ces temps difficiles financièrement, note-t-elle, est-il judicieux que cette journée de l’infirmière se paie le luxe d’un superbe lieu avec terrain de golf, piscine, repas gastronomique… Tout cela sans frais pour les participants ? »

Renseignements pris auprès des responsables de l’URPS, c’est « justement le faible coût de la prestation » qui a motivé leur choix. « L’hôtel nous a proposé un tarif très avantageux qui comprenait la mise à disposition d’une salle sonorisée et les repas. Tout compte fait, cette formule revenait moins cher que la location d’une salle seule à laquelle il faut ajouter le prix des équipements de sonorisation et le paiement d’un traiteur. Par ailleurs, nous sommes tous bénévoles et organiser toute cette logistique prend un temps fou. Enfin, nos partenariats permettent de couvrir une large part des frais engagés. » Dont acte !