La sinusite aiguë - L'Infirmière Libérale Magazine n° 301 du 01/03/2014 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 301 du 01/03/2014

 

Inflammation

Cahier de formation

LE POINT SUR

NATHALIE BELIN  

La sinusite ou rhinosinusite aiguë correspond à une atteinte infectieuse des muqueuses naso-sinusiennes. Le plus souvent d’origine virale, elle relève d’un traitement symptomatique. L’antibiothérapie est indiquée en cas d’évolution défavorable, ou d’emblée dans les formes compliquées.

Qu’est-ce que la sinusite aiguë ?

→ La sinusite aiguë est le plus souvent une sinusite maxillaire, dont l’origine est la plupart du temps virale. Elle guérit spontanément ou sous traitement symptomatique en moins de trois semaines.

→ Plus rarement, des sinusites frontales, ethmoïdales ou sphénoïdales peuvent s’observer. Elles nécessitent une prise en charge rapide en raison des complications graves qu’elles peuvent entraîner.

Comment se fait le diagnostic ?

Signes cliniques

→ Les symptômes initiaux ne sont pas spécifiques et ressemblent à ceux d’une rhinopharyngite : obstruction nasale associée souvent à un écoulement nasal (rhinorrhée), des éternuements, une toux ou une gêne pharyngée, des céphalées. Fièvre et fatigue évoquent un syndrome infectieux, viral ou bactérien.

→ Des douleurs faciales renforcent le diagnostic de sinusite. Dans le cas d’une sinusite maxillaire, la douleur sous-orbitaire irradie vers les dents ; un foyer dentaire est systématiquement recherché. La sinusite sphénoïdale induit des douleurs irradiant souvent vers le sommet du crâne ; elle est à l’origine de complications neuro-méningées qui révèlent parfois la sinusite. Dans la sinusite frontale, la douleur est typiquement intense et sus-orbitaire, et irradie vers la tempe et la nuque ; la fièvre est souvent élevée. La sinusite ethmoïdale (ou ethmoïdite) touche surtout l’enfant de moins de 5 ans. Un œdème douloureux de l’angle interne de l’œil et/ou de la paupière supérieure a une forte valeur diagnostique. Les complications orbitaires sont recherchées.

→ En règle générale, une douleur faciale intense et une fièvre très élevée sont en faveur d’une forme compliquée de sinusite.

Origine virale ou bactérienne

→ Il est difficile de distinguer si une rhinosinusite maxillaire est d’origine virale ou bactérienne (ou sinusite purulente). Toutefois, la présence d’au moins deux sur trois des critères suivants est en faveur d’une sinusite bactérienne :

- persistance ou augmentation des douleurs après 72 heures de traitement symptomatique ;

- caractère unilatéral ou pulsatile de la douleur ou augmentation de la douleur si la tête est penchée en avant ;

- augmentation de la rhinorrhée et de sa purulence (d’autant plus si elle est unilatérale).

→ Certains critères mineurs, s’ils sont présents, renforcent aussi la suspicion de sinusite bactérienne : persistance de la fièvre au troisième jour ou persistance des signes de rhinopharyngite (éternuements, obstruction nasale, toux, etc.) plus de dix jours.

Complications

Rares et souvent dues à des sinusites extra-maxillaires, elles sont recherchées systématiquement, d’autant plus qu’il existe un facteur favorisant comme un diabète mal équilibré, une immunodépression (sida, traitements anticancéreux…) : complications méningés ou méningoencéphaliques, orbitaires (œdème des paupières, baisse de l’acuité visuelle, etc.) ou cutanées (rougeur de la peau, œdème sous-cutané). Ces manifestations constituent une urgence thérapeutique.

Examens complémentaires

Ils ne sont recommandés qu’en cas de localisations extra-maxillaires, de suspicion de complication ou d’échec thérapeutique. La tomodensitométrie (scanner) constitue l’examen de référence. L’IRM ou la nécessité d’une endoscopie nasale et de prélèvements bactériologiques sont discutées au cas par cas.

Quelle prise en charge ?

Traitements symptomatiques

→ Désobstruction nasale : le lavage des fosses nasales (sérum physiologique, eau de mer, etc.) et le mouchage du nez aident à lever l’obstruction.

→ Les antalgiques de palier 2 (paracétamol-codéine, tramadol…) sont parfois nécessaires en cas d’échec du paracétamol, voire de l’aspirine. L’utilité des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) à dose anti-inflammatoire n’est pas démontrée.

→ Les vasoconstricteurs peuvent être utiles les premiers jours pour réduire la congestion nasale. Du fait d’effets indésirables graves cardiovasculaires et neurologiques, tous les vasoconstricteurs (voie orale : pseudo-éphédrine dans Actifed, Dolirhume, Sudafed, etc. ; ou nasale : Aturgyl, Dérinox, Déturgylone…) sont contre-indiqués chez les moins de 15 ans, et leur utilisation est limitée à cinq jours.

→ Les corticoïdes locaux sont parfois proposés sur trois à quatre jours pour soulager la douleur. Une corticothérapie orale courte (maximum cinq à sept jours) associée à l’antibiothérapie est discutée dans les sinusites hyperalgiques.

→ Les aérosols sont souvent prescrits, mais leur intérêt n’est pas démontré, tout comme celui des mucolytiques.

Indications de l’antibiothérapie

→ Dans un contexte de sinusite présumée d’origine virale, l’antibiothérapie n’est indiquée qu’en cas d’évolution défavorable : persistance ou aggravation de la fièvre et/ou des douleurs faciales après trois jours de traitement symptomatique ; persistance des autres symptômes (congestion nasale, éternuements, toux…) après dix jours de traitement symptomatique.

→ L’antibiothérapie est justifiée d’emblée dans les sinusites maxillaires aiguës d’origine dentaire ainsi que dans les sinusites compliquées (sinusite hyperalgique, signes neurologiques, complications oculaires…) ou à risque de complications : localisations extra-maxillaires, immunodépression (chimiothérapie, sida, etc.), diabète mal équilibré.

→ La ponction drainage des sinus (rare) est réservée aux situations les plus sévères ou aux cas de résistance aux traitements antibiotiques.

→ En cas de rhinopharyngite, l’antibiothérapie ne prévient pas la survenue d’une sinusite.

Choix de l’antibiotique

→ Sinusite aiguë maxillaire : l’amoxicilline (Clamoxyl…) est recommandée en première intention. En cas d’échec, l’association amoxicilline-acide clavulanique (Augmentin…) est indiquée. En cas d’allergie à l’amoxicilline, d’autres antibiotiques sont recommandés : des céphalosporines (Zinnat, Texodil, Orelox, etc.), éventuellement la pristinamycine, voire la télithromycine (Ketek) en tenant compte de ses effets indésirables (troubles cardiaques, visuels et hépatiques notamment).

→ Autres sinusites : l’association amoxicilline et acide clavulanique est indiquée dans les sinusites d’origine dentaire et les sinusites extra-maxillaires.

→ En cas d’échecs des traitements initiaux ou dans les situations à risque de complications graves, on a recours à la lévofloxacine (Tavanic) ou à la moxifloxacine (Izilox).

→ Les antibiotiques locaux (aérosols…) ne sont pas recommandés.

À dire aux patients

→ Une sinusite aiguë évolue le plus souvent favorablement. L’antibiothérapie n’est pas systématique.

→ En l’absence d’amélioration sous 48 à 72 heures, le traitement prescrit (antibiothérapie ou traitement symptomatique seul) doit être réévalué. Des signes de gravité (œdème des paupières, baisse d’acuité visuelle, syndrome méningé, déficit sensitivo-moteur, etc.) imposent une consultation médicale en urgence.

→ Le patient doit bien respecter la durée du traitement antibiotique prescrit par le médecin. Les vasoconstricteurs (par voie orale ou locale) s’emploient dans tous les cas sur une durée de cinq jours maximum. Il ne faut surtout pas associer un vasoconstricteur local éventuellement prescrit, à un vasoconstricteur oral (type Actifed).

→ Les baignades et les voyages en avion sont contre-indiqués en période de sinusite aiguë.