Autant en emporte l’eau - L'Infirmière Libérale Magazine n° 295 du 01/09/2013 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 295 du 01/09/2013

 

CATASTROPHE

L’exercice au quotidien

Judelle Lauzé effectuait un remplacement à Saint-Béat, en Haute– Garonne, le 18 juin, lorsque la Garonne est subitement sortie de son lit, emportant une partie du village. Retour sur un moment de solitude.

« Je travaille à Saint-Béat depuis avril 2013. Au petit matin du jour de l’inondation, j’ai remarqué que le niveau de la rivière montait alors qu’il continuait de pleuvoir. Mais aucun de mes patients n’avait l’air inquiet : ils me répétaient « qu’ils avaient déjà vu ça » et que « ça ne risquait rien ». Je suis revenue sur le village en fin de matinée et l’eau avait encore monté, ce qui ne semblait affoler encore personne. Mais, quelques minutes après être ressortie du village, j’ai vu la route disparaître sous l’eau. Puis tout s’est passé très vite et je n’ai rien pu faire. J’étais bloquée dans mon village, à Muret, dont tous les accès venaient d’être coupés. J’étais préoccupée pour un patient qui est très dépendant, mais toutes les lignes téléphoniques étaient coupées et les lignes d’urgences complètement saturées. Finalement, c’est à la télévision que j’ai vu qu’il avait été hélitreuillé en urgence de sa maison. Ensuite, avec ma collègue, nous avons cherché à savoir où se trouvaient nos patients : cela nous a pris quatre jours pour les repérer, entre les différents sites d’accueil. Finalement, ce qui m’étonne le plus, c’est surtout que personne n’a cherché à nous joindre… Il n’y a qu’un médecin du village qui m’a appelée pour prendre des nouvelles. Je me suis sentie vraiment seule. Les jours suivants, je suis revenue à Toulouse où ma famille s’était montrée très inquiète avec toutes ces images à la télévision. C’est à ce moment que j’ai réalisé que j’avais failli rester coincée là-bas, dans ma voiture. J’ai tout de même décidé de finir mon remplacement, même si je ne resterai pas à Saint-Béat. Après un mois de vacances, j’ai pris du recul, les patients commencent à moins en parler, la vie reprend son cours et il y a une vraie solidarité dans le village. En revanche, je pense qu’il faudra tirer leçon de ces événements car je ne savais absolument pas quoi faire… Un minimum de formation serait nécessaire pour savoir qui appeler et quoi faire exactement dans ce genre de situation. »

Avis de l’expert

Une réponse de proximité

Contactée par nos soins, la préfecture de la Haute-Garonne fait le point

« La direction des secours était assurée par le préfet, le commandement relevant du directeur départemental des services de secours et d’incendies. Les services territoriaux mobilisent en priorité leurs moyens propres, puis d’autres moyens publics. Le personnel du service départemental d’incendie et de secours et du Samu a donc été mobilisé en priorité. Si la situation le justifie, des moyens privés peuvent être réquisitionnés. Ce jour-là, les besoins portaient sur le soutien psychologique, couverts par la cellule d’urgence médico-psychologique. Par ailleurs, des moyens ont été mis en œuvre pour favoriser la circulation des professionnels médicaux dans le secteur. Enfin, si des Idels veulent apporter leur aide pour les secours, elles peuvent contacter leur commune, l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus) ou l’ARS afin d’intégrer une réserve. »