Gérer les hypo et hyperglycémies - L'Infirmière Libérale Magazine n° 281 du 01/05/2012 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 281 du 01/05/2012

 

Cahier de formation

Savoir faire

Monsieur N. se plaint depuis quelques jours d’une sensation de fatigue en fin de journée. Il a pourtant une glycémie satisfaisante au réveil et prend correctement le Diamicron le matin, tel qu’il est prescrit.

Les sulfamides hypoglycémiants comme le Diamicron occasionnent souvent des hypoglycémies en fin de journée, surtout si le repas de midi est sauté ou s’il n’apporte pas assez de glucides. De même lorsque l’activité physique est plus importante que d’habitude : pratiquée vers 17-18 heures, elle peut provoquer une hypoglycémie, même si la glycémie matinale était à 2 g/l (voir L’ILM n° 280). Si ces activités ou la modification des repas sont prévisibles, la posologie peut être diminuée. Dans tous les cas, monsieur N. doit contrôler sa glycémie au moment du “malaise”, et se resucrer pour une glycémie inférieure à 0,80 g/l ou au moindre doute si le lecteur n’est pas à proximité. Il doit aussi faire le point avec son médecin sur ses habitudes pour adapter la posologie du traitement.

LES HYPOGLYCÉMIES

Selon l’Organisation mondiale de la santé, une hypoglycémie correspond à une glycémie inférieure à 0,50 g/l.

Le plus souvent, l’hypoglycémie est bénigne et elle régresse spontanément entre une demi-heure et plusieurs heures.

Circonstances de survenues

Les accidents hypoglycémiques chez les diabétiques sont dus à des surdosages chez des patients traités par insuline ou sulfamides hypoglycémiants.

Dans le diabète de type 1

Les malaises hypoglycémiques sont très fréquents, dus à un défaut d’apport calorique, à une activité physique plus importante que d’habitude, ou à une action excessive de l’insuline. Le patient doit apprendre à les reconnaître pour se resucrer. Ces malaises sont acceptables durant la journée s’ils ne sont pas trop fréquents (deux à trois par semaine au maximum), mais ils doivent être évités la nuit, car les patients peuvent ne pas être réveillés par les symptômes et passer alors en coma.

Dans le diabète de type 2

Les malaises sont secondaires à la prise de glinides ou de sulfamides hypoglycémiants (le plus souvent). Ces hypoglycémies peuvent être prolongées et graves, exceptionnellement mortelles sur certains terrains : alcoolisme, insuffisance rénale, insuffisance hépato-cellulaire, dénutrition, grand âge. Elles sont évitées en diminuant ou en arrêtant ces médicaments.

Symptômes

Ils doivent être connus de l’entourage qui peut repérer une pâleur, un regard un peu fixe ou une parole ralentie avant la personne diabétique elle-même.

→ Des signes neurovégétatifs, liés à la stimulation du système nerveux autonome apparaissent avec une glycémie autour de 0,60 g/l : mains moites, pâleur des extrémités et du visage, tremblements des extrémités, tachycardie avec palpitations, fatigue et sensation de faim intense.

→ Des signes neuroglycopéniques sont liés à la souffrance du système nerveux central. Ils surviennent avec une glycémie inférieure à 0,50 g/l. Les signes : sensation de malaise avec asthénie importante, difficultés de concentration intellectuelle, sensation de dérobement des jambes, paresthésie des extrémités, céphalées, impressions vertigineuses, troubles de l’humeur et du comportement (confusion aiguë, agitation, agressivité, ébriété…), ainsi que troubles visuels (diplopie ou vision trouble).

Risques de gravité

L’hypoglycémie peut survenir dans un contexte à risque, en conduisant ou lors d’activités professionnelles ou sportives (alpinisme, plongée, conducteur de train…).

En l’absence de resucrage, un coma hypoglycémique peut survenir brutalement. Il s’accompagne alors d’une tachycardie, d’une respiration calme, de sueurs abondantes, de contractures et d’un syndrome pyramidal.

Une hypoglycémie profonde peut s’accompagner, entre autres, de troubles neurologiques sévères (crises convulsives généralisées ou localisées), d’accident vasculaire cérébral, d’arythmie cardiaque, d’ischémie myocardique, d’hémorragie intrarétinienne en présence d’une rétinopathie proliférante non traitée.

Apport immédiat de glucose

Glycémie entre 0,80 et 0,50 g/l

Il est nécessaire de resucrer avec une collation de 15 grammes de glucides très hyperglycémiants (voir l’encadré ci-dessous).

Glycémie inférieure à 0,50 g/l ou impossible à mesurer

Si la personne est capable d’avaler sans fausse route 15 à 20 grammes de glucides hyperglycémiants, suivis d’une collation de 15 à 20 g de glucides d’assimilation “lente” (voir le tableau ci-dessus). Après ce 1er resucrage, faire un contrôle de la glycémie capillaire. Si la glycémie est inférieure à 0,40 g/l, cet apport glucidique doit être répété, et la glycémie sera contrôlée 10 à 15 minutes après.

Si la personne est incapable d’avaler sans fausse route ou a perdu connaissance, quelle que soit la cause de l’hypoglycémie, une injection intraveineuse directe de 2 à 4 ampoules de glucosé hypertonique à 30 % (G30 %) doit entraîner le réveil rapide du patient :

→ patient sous insuline : injecter une ampoule de glucagon (Glucagen) par voie intramusculaire ou sous-cutanée, et au besoin répéter l’injection 10 minutes après. Le réveil est moins rapide, en 5 à 10 minutes. Au réveil, donner une collation pour éviter la récidive ;

→ patient traité par sulfamides hypoglycémiants : jamais de glucagon qui stimule lui-même la sécrétion d’insuline et qui entraîne un risque de rechute de l’hypoglycémie, mais une injection intraveineuse de glucose. Appeler les secours pour une hospitalisation et la mise en place d’une perfusion de G10 %.

Carnet de surveillance

À noter après le malaise :

→ l’heure du malaise, la glycémie, les signes de gravité ;

→ les produits de resucrage utilisés ;

→ les causes possibles du malaise : repas sauté, apport suffisant en glucides, activité physique inhabituelle (jardinage, courses, bricolage…), médicament ajouté à l’ordonnance habituelle, etc.

En cas d’hypoglycémies fréquentes (plusieurs par semaine), le médecin doit être averti pour une éventuelle adaptation du traitement. En cas de modifications du traitement, les glycémies sont contrôlées de façon plus rapprochée pendant environ une semaine.

LES HYPERGLYCÉMIES

Symptômes

L’hyperglycémie est peu symptomatique, mais elle peut se manifester par une soif et des urines abondantes, ainsi qu’une fatigue ou une langue sèche.

Le risque est la survenue rapide d’une déshydratation importante et d’un “coma acidocétosique” (l’expression désigne aussi une acidocétose sévère).

L’acidocétose

Il s’agit d’une décompensation du diabète consécutive à une carence profonde en insuline qui entraîne hyperglycémie et cétose.

Cette complication touche essentiellement le diabète de type 1, mais, dans 10 à 15 % des cas, elle affecte un diabète de type 2 lors d’une infection sévère, un accident cardiovasculaire ou une intervention chirurgicale.

Physiopathologie de l’acidocétose

L’hyperglycémie et la production anormale de corps cétoniques résultent de la carence en insuline qui entraîne :

→ une augmentation de la production hépatique de glucose et une non-utilisation du glucose par les tissus périphériques ;

→ une lipolyse massive qui libère des quantités excessives d’acides gras, entraînant une synthèse accrue de corps cétoniques par le foie ;

→ l’ionisation de ces acides cétoniques entraîne l’accumulation d’ions H+ et une acidose métabolique.

Recherche d’une cétonurie

Elle se fait par une bandelette urinaire réactive sur un échantillon d’urine. En situation normale, il n’y a pas de corps cétoniques dans les urines. Dans tous les cas d’hyperglycémie supérieures ou égales 2,5 g/l, accompagnée de nausées, il faut vérifier la présence de corps cétoniques dans l’urine (cétonurie) ou dans le sang (cétonémie).

Dans le diabète de type 1

La cétonurie doit être recherchée en cas d’hyperglycémie supérieure à 3 g/l, de douleur abdominale, vomissements, crampes musculaires, infection aiguë, perte pondérale rapide, panne de pompe à perfusion sous-cutanée d’insuline. Elle est systématique chez les porteurs de pompe à insuline, les femmes enceintes et les enfants et adolescents jusqu’à 18 ans.

En présence de cétonurie, alerter le médecin.

Dans le diabète de type 2

Une hyperglycémie isolée n’est pas grave en soi, mais peut évoluer de façon grave, notamment lors de situations à risque (fièvre, infection, traumatismes…).

En cas de fatigue, soif, manque d’appétit, nausées ou vomissements, il est nécessaire de rechercher la présence d’acétone.

En présence d’une cétonurie associée à une glycosurie, le médecin doit être alerté. Il peut, selon les cas, intensifier le traitement oral ou passer à une insulinothérapie.

Traitement de l’acidocétose

Le traitement de l’acidocétose repose sur une hydratation et une insulinothérapie en urgence pour un retour progressif à la normale en 8 à 12 heures :

→ traitement de la cétose par insulinothérapie intraveineuses : doses modérées d’insuline de l’ordre de 10 unités par heure ;

→ hydratation de l’ordre de 6 à 8 litres en 24 heures.

Glucides à effet hyperglycémiant

– 3 morceaux de sucre (le plus classique, appelé “n° 4”).

– 1 briquette de jus de fruit sucré glacé (les liquides sucrés et glacés passent très vite dans l’estomac et agissent plus rapidement).

– 1 verre de coca ou limonade ou soda glacé non light.

– 1 berlingot de lait concentré sucré.

– 1 cuillère à soupe de miel ou de confiture.

– 1 pâte de fruit (20 g).

Produits disponibles en pharmacie

– GlucoPulse resucrage rapide, laboratoire Clémascience : prendre 1 sachet dès les premiers signes d’hypoglycémie.

– GlucoDose ultra rapide, laboratoires Expanscience : adulte, 2 sachets dose.

Prescription infirmière

Lancettes et autopiqueurs

Les lancettes pour autopiqueur et les autopiqueurs à usage unique sont des dispositifs médicaux (DM) pouvant être prescrits par les infirmières « sous réserve d’une information du médecin traitant désigné par le patient » et « dans le cadre d’un renouvellement à l’identique ».

Bandelettes et capteurs

Les bandelettes, capteurs ou électrodes pour la lecture de la glycémie au moyen d’un lecteur sont prescrits par les infirmières « sous réserve d’une information du médecin traitant désigné par le patient » et « dans le cadre d’un renouvellement à l’identique ». Pour les diabétiques de type 2, ce nombre est limité à 200 bandelettes ou capteurs par an.

Les infirmières ne sont pas autorisées à prescrire les bandelettes pour le lecteur mixte glucose/corps cétoniques Medisense Optium Xceed (Abbott).