L’info en question - L'Infirmière Libérale Magazine n° 275 du 01/11/2011 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 275 du 01/11/2011

 

SANTÉ PUBLIQUE

Actualité

MÉDICAMENTS →L’affaire du Mediator a posé haut et fort la question de la transparence des liens entre professionnels de santé et industriels du médicament. L’heure de la démocratie sanitaire aurait-elle sonné ?

Alors que l’Assemblée nationale s’employait à adopter le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, les acteurs du secteur ont planché début octobre sur les conflits d’intérêts, la nécessité de transparence et de débat public et la manière de changer les patients en acteurs éclairés de leur propre santé.

Aucun conflit d’intérêts ?

Ainsi le Conseil de l’Ordre des médecins organisait-il le 4 octobre dernier un débat sur ce sujet, invitant aux échanges entre des parlementaires – Yves Bur et Jean-Pierre Door –, Irène Frachon, celle par qui le scandale est arrivé*, Jean-Luc Harousseau, président de la Haute Autorité de santé (HAS), Dominique Maraninchi, directeur général de l’agence du médicament (Afssaps), mais également Christian Lajoux, président des Entreprises du médicament (Leem). « Je me méfie quand on me dit qu’il y aura des experts vierges de tout conflit d’intérêts », a ainsi avancé le député Jean-Pierre Door (UMP, Loiret, 45). D’autant plus si l’on considère, comme Irène Frachon, que « tout lien d’intérêts, aussi ténu soit-il, constitue un conflit d’intérêts. Le médicament est un bien marchand donc, par définition, surgit une tension dans toute collaboration entre un professionnel de santé et un laboratoire ». De quoi heurter Christian Lajoux qui a tenu à rappeler que le Leem avait eu tôt fait d’écarter le laboratoire Servier de son organisation, mais que les industriels « ne peuvent tout de même pas être considérés comme des parias ».

Un accès à l’information

Quant à lui, le député Yves Bur (UMP, Bas-Rhin, 67) estime que, si la France doit accepter une culture de la transparence, « cela n’a de sens que si la population a accès à ces informations ». Et de plaider pour que le site de l’Assurance maladie, www.ameli-direct.fr, qui publie déjà les honoraires des professionnels de santé, affiche également les conflits d’intérêt des professionnels. Cependant, glisse-t-il, « la même obligation devrait naturellement concerner les autres acteurs que sont les associations de patients ou les syndicats de médecins ». Une remarque partagée notamment par le neurologue Claude Degos, qui ajoute que les professeurs d’université ne signalent pas non plus leurs conflits d’intérêts à leurs étudiants.

Vers une démocratie sanitaire ?

Parallèlement, le magazine Prescrire s’est également inscrit dans ce débat autour du médicament et de la nécessité qu’il y a à développer l’esprit critique des patients et à favoriser la démocratie sanitaire. Ainsi, à l’occasion de la remise annuelle des prix de la rédaction, le 6 octobre – Irène Frachon a d’ailleurs remporté un prix –, un échange s’est tenu sur ce sujet, permettant à Hughes Fischer, d’Act-Up Paris, de retracer les grandes lignes de vingt-deux ans de militantisme au sein d’Act-Up. Pour lui, en matière de démocratie sanitaire, « les places que l’on a conquises, il faut qu’on les occupe ». En d’autres termes : plus que jamais, les représentants des patients et des usagers du système de santé doivent profiter de la possibilité qui leur est faite de siéger dans les différentes autorités de santé.

* Pour mémoire, c’est Irène Frachon, pneumologue de Brest, qui a révélé le scandale du Mediator, en publiant Mediator, combien de morts ? (juin 2009, éditions-dialogue.fr).