Infirmières et législatives : « Sortir du médicocentrisme » | Espace Infirmier
 
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08/06/2022

Infirmières et législatives : « Sortir du médicocentrisme »

À quelques jours du premier tour des élections législatives, Espaceinfirmier.fr tend le micro à ces soignants qui se (re)verraient bien au Palais-Bourbon. Rencontre avec Sereine Mauborgne, Idel, députée sortante de la majorité présidentielle dans le Var, et candidate à sa réélection.

6 293. C’est le nombre de candidats qui se présentent aux élections législatives des 12 et 19 juin prochains. Et contrairement à ce que l’on pourrait penser, tant la réputation de dépolitisation des infirmières est forte, on trouve parmi ces aspirants députés bon nombre de représentantes de la profession. Ainsi, sur les huit députés infirmiers sortants (tous issus de la majorité présidentielle), six se représentent. Mais il y a également tous ces candidats, venus de toutes les tendances politiques, qui n’ont jamais été élus et qui voudraient porter la voix des soignants au Palais-Bourbon. Quel est leur parcours ? Quelles sont leurs aspirations ?

Pour mieux connaître ces infirmiers qui, novices ou aguerris, ont choisi de battre la campagne, Espaceinfirmier.fr a interviewé trois d’entre eux, en commençant par Sereine Mauborgne, infirmière libérale (Idel) et députée sortante (majorité présidentielle) du Var. Après un premier mandat où elle a siégé à la commission de la défense, elle se verrait bien rempiler, et se présente de nouveau devant les électeurs.

Durant les cinq années que vous venez de passer à l’Assemblée, avez-vous pu exercer votre métier d’infirmière ?

Pas pendant les deux premières années : j’avais revendu mes parts du cabinet dans lequel j’exerçais. Mais j’ai repris une activité au moment de la crise sanitaire, en mars 2020. J’ai été pendant dix semaines collaboratrice occasionnelle du service public, à disposition du directeur général de l’Agence régionale de santé Paca, où je me suis notamment occupée des relations avec les élus. J’ai aussi appuyé les créations des CPTS (Communautés professionnelles territoriales de santé, NDLR) qui ont émergé durant la crise. Par la suite, j’ai effectué des remplacements en libéral, j’ai fait des vaccinations, j’ai travaillé à l’hôpital, notamment dans le cadre du plan blanc cet hiver…

Si vous êtes réélue, comptez-vous poursuivre ces interventions ?

Oui, sur mes périodes de vacances, car il y a beaucoup de problèmes de remplacement, notamment dans ma circonscription. Même si pour la période estivale qui s’annonce, je réserve encore ma réponse, car l’activité législative risque d’être très soutenue.

Quelle a été, selon vous, votre plus-value de soignante à l’Assemblée au cours de votre mandat ?

Je tiens d’abord à préciser que s’il y a eu autant d’infirmières au sein de notre groupe parlementaire, c’est parce qu’Emmanuel Macron avait souhaité une féminisation des députés, et une ouverture à la société civile. Je pense que nous avons réussi à représenter les infirmières dans leur diversité, et que nous avons notamment réussi à faire comprendre à nos collègues médecins qu’il fallait sortir du médicocentrisme. La coopération interprofessionnelle, c’était encore quasiment un gros mot dans la bouche de certains députés au début de la législature. Aujourd’hui, on parle des infirmières, des aides-soignantes, et plus seulement des médecins. Je pense que nous avons aussi réussi à être un point d’entrée pour nos collègues IDE à l’Assemblée : nous avons été les premiers à parler de la promotion de la pratique avancée, de la reconnaissance du rôle pivot de l’infirmière, etc. Nous avons enfin été un support technique pour nos collègues députés non soignants qui étaient interpellés par des infirmières sur le terrain.

Avez-vous des regrets ?

Il y a certains sujets que nous avions poussés en 2018 lors de la préparation de « Ma santé 2022 », et que nous n’avons pas réussi à suffisamment faire avancer. Je pense qu’on peut mieux utiliser les compétences des Idels pour faire des consultations de spécialité, en téléexpertise et en appui avec les médecins, dans les zones sous-dotées par exemple. Par ailleurs, les certificats de décès ne sont toujours pas ouverts aux infirmières, l’ordre des médecins nous a vraiment mis des bâtons dans les roues à ce sujet, alors qu’il y a des situations dramatiques, des corps qui restent pendant des heures en attendant de trouver un professionnel qui accepte de venir faire le certificat.

Diriez-vous que les infirmières détiennent une partie de la réponse aux crises que connaît actuellement le système de santé, par exemple aux urgences ?

Elles ont une partie de la réponse, mais elles sont submergées. On est en pénurie de médecins, mais aussi en pénurie d’infirmières, ce qui oblige à fermer des lits de médecine et provoque un manque de lits d’aval, et donc des bouchons supplémentaires aux urgences… C’est le serpent qui se mord la queue !

Ne peut-on pas considérer que cette triste situation fait partie du bilan du quinquennat ?

Compte tenu de l’état dans lequel était l’hôpital quand nous sommes arrivés, il ne faut pas s’étonner de voir que les mesures mettent du temps à porter leurs fruits : le rachat de la dette, les investissements, le renforcement des effectifs dans les Ifsi, tout cela n’est pas rien et va produire des effets. Mais je ne suis pas du genre à mettre mon mouchoir sur les problèmes, je les regarde avec sérieux et engagement, et c’est notamment pour cela que je veux que des infirmières continuent de siéger à l’Assemblée.

Propos recueillis par Adrien Renaud

Les dernières réactions

  • 11/06/2022 à 16:32
    Mathias Gibbs
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