Impact du Covid : la santé au travail des soignants dégradée | Espace Infirmier
 
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27/06/2022

Impact du Covid : la santé au travail des soignants dégradée

Plusieurs intervenants du Congrès national de médecine et de santé au travail ont dressé un bilan de la première vague de Covid. Sans surprise, que ce soit en Ehpad, en réanimation ou dans des services de santé au travail (SST) hospitaliers, la crise s’est accompagnée d’une dégradation globale de la santé.

Deux ans après le premier confinement lié au Covid, le Congrès national de médecine et de santé au travail de Strasbourg a choisi de faire un bilan de cet épisode, notamment des conséquences pour les soignants en termes de santé au travail. Aude Cuny-Guerrier, ergonome à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), a présenté les résultats d’une étude menée auprès de 458 professionnels d’Ehpad privés (aides-soignantes, infirmières et infirmières de coordination). « La moitié rapporte une dégradation de leur santé pendant le confinement : 48 % déclarent un moins bon état physique, 57 % une dégradation de leur moral, et 58 % un niveau de stress plus important. 65 % ont également eu l’impression de mettre leur santé en danger », a-t-elle exposé.

Hausse de la charge mentale

En parallèle, 90 % des soignants – dont 98 % des infirmières de coordination (Idec) – rapportent une hausse de leur charge mentale. Comme pour la charge physique (68 % des répondants), cette hausse est plus marquée dans les établissements qui ont connu des cas de Covid parmi les résidents et le personnel. La charge de travail supplémentaire résulte d’une modification des tâches habituelles (79 %) associée à une insuffisance de moyens (75 %). « Ce n’est pas corrélé à la présence ou non de renforts », a noté l’ergonome. Les aides-soignantes citent aussi leur impréparation face au risque biologique, les IDE, le fait d’avoir dû effectuer des tâches habituellement assurées par des intervenants extérieurs, et les Idec, les changements incessants de protocoles à transmettre. « Cela dessine des axes de réflexion pour mieux organiser l’arrivée de renforts et pour proposer des formations, notamment aux aides-soignantes », a-t-elle suggéré.

Anxiété, perte de sens… et visibilité

Autre secteur touché de plein fouet par le virus : les services de réanimation. Le Dr Clément Duret, médecin du travail à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), a comparé la santé mentale des soignants d’une unité de soins intensifs « classique » à celle de l’équipe d’une salle de réveil transformée en réanimation. L’étude s’est basée sur des questionnaires validés scientifiquement, mais pas sur des diagnostics médicaux. 18 % du personnel montrait des signes d’anxiété, 34 % de burn-out, 16,5 % de stress post-traumatique et 6,2 % de dépression. « La majorité des soignants a cependant mis en place des stratégies de coping actif, a détaillé le médecin. On note une surexposition à l’anxiété parmi le personnel de la salle de réveil, mais les difficultés rapportées sont communes : crainte pour sa santé ou celle de son entourage, manque de matériel, difficulté à s’intégrer dans un nouvel environnement de travail… »

Enfin, les services de santé au travail des hôpitaux ont eux aussi modifié leur activité pendant le Covid pour accompagner les agents et tracer les cas contacts. Le Dr Jérémie Sommé, administrateur de l’Association nationale de médecine du travail et d’ergonomie du personnel des hôpitaux (ANMTEPH), a souligné que la réorganisation en urgence des services de santé au travail pendant la crise avait entraîné une perte de sens pour plus de la moitié des professionnels. « Plus d’un sur quatre a émis le souhait de changer de poste », a-t-il ajouté. Les « cellules Covid », montées en urgence, ont tendance à fermer, à l’image de celle du CHU de Bordeaux. « L’épisode aura cependant eu pour effet de rendre le SST plus visible au sein de l’établissement », a remarqué le Dr Fleur Delva.

Lisette Gries

À LIRE ÉGALEMENT

- Gries L. « “L’Observatoire de santé au travail sera précieux pour adapter nos actions de prévention” », Espaceinfirmier.fr, le 23/06/2022.

- Favier A.-L., « La souffrance des soignants secoue l’éthique », Objectif Soins & Management, n° 287, juin-juillet 2022.

- Flamand-Roze C., Dupont S., « Prévention de l’épuisement professionnel des soignants », Objectif Soins & Management, n° 287, juin-juillet 2022.

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