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25/03/2025

ENDOMÉTRIOSE : FAIRE AVANCER LA PRISE EN CHARGE POUR RÉDUIRE LES DISPARITÉS

Camille Derveaux-Ringot a un point commun avec 2 millions de femmes françaises : elle souffre d’endométriose. Devenue patiente-experte, elle partage avec espaceinfirmier.fr sa vision de la prise en charge de la maladie et le rôle des infirmières dans ce domaine.

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COMMENT AVEZ-VOUS DÉCOUVERT VOTRE MALADIE ?
À l’adolescence, je ressentais des douleurs au moment des règles et dès 20 ans, j’ai souffert de troubles digestifs très forts, avec du sang dans mes selles et des évanouissements. Mon médecin traitant m’a orientée vers un gastroentérologue. Pendant presque 3 ans, j’ai été prise en charge pour une maladie de Crohn avec une première ligne de traitement. Mais mon état de santé s’est dégradé et les médecins m’ont proposé soit de passer à la deuxième ligne de traitement, soit d’approfondir les recherches concernant la pathologie.
En 2014, une échographie pour la recherche d’une endométriose a confirmé la présence de la maladie. J’ai été orientée en gynécologie et mon parcours s’est complexifié car je ne trouvais pas de médecins pour prendre en charge mes douleurs. On me proposait soit une intervention chirurgicale, soit la prise de la pilule en continu. J’ai choisi cette deuxième option, car à l’époque, je trouvais l’opération très intrusive et surtout, j’avais l’impression d’être face à des médecins qui ne comprenaient pas la globalité de la maladie.
Elle est souvent résumée aux règles douloureuses alors que 5 autres symptômes sont associés : les troubles digestifs, les troubles urinaires, les douleurs lors des rapports sexuels, les douleurs pelviennes chroniques et les difficultés à concevoir un enfant. J’ai ensuite eu la chance d’être prise en charge par une équipe pluridisciplinaire formée à la maladie, avec un gynécologue et un médecin de la douleur. L’équipe m’a orienté vers des soins de supports notamment l’ostéopathie, la micronutrition et le yoga. Ma vie a changé. J’ai eu 2 enfants et désormais, je maîtrise mes douleurs.

VOUS VOUS ÊTES FORMÉE POUR DEVENIR PATIENTE-EXPERTE. POURQUOI CE CHOIX ?
J’ai effectivement suivi un DU d’Éducation thérapeutique du patient (ETP), à l’université de la Sorbonne en 2022-2023. J’ai ressenti le besoin de transmettre tout ce que j’avais appris par rapport à ma maladie, cela fait partie de mon cheminement de patiente. Je pense qu’il faut détenir un certain recul pour avoir la capacité d’être patiente-experte. Il ne faut plus être submergé par la maladie, la phase d’acceptation doit avoir eu lieu, ce qui peut prendre du temps. Ce DU m’a appris à tenir une certaine posture vis-à-vis des autres patientes, d’être à l’écoute et de leur dire qu’elles peuvent par elles-mêmes trouver les solutions qui leur conviennent. En tant que patiente-experte, on ne doit pas reproduire un rôle ascendant comme peuvent le faire des médecins. J’utilise cette posture dans le cadre de mon entreprise de micronutrition, au sein de laquelle je travaille avec un ingénieur biologiste et un pharmacien. Nous organisons des moments d’échanges sur la maladie, dans le cadre d’ateliers inspirés de l’ETP, au cours desquels nous réunissons entre 10 et 15 patientes pour par exemple créer leur boîte à outils anti-douleurs, parler de l’alimentation anti-inflammatoire, etc.

QUEL RÔLE PEUVENT JOUER LES INFIRMIÈRES DANS LA PRISE EN CHARGE DE L’ENDOMÉTRIOSE ?
Elles peuvent justement s’engager dans des programmes d’ETP visant à améliorer la qualité de vie des patientes, à l’hôpital, au sein de structures libérales, dans des centres de santé de la femme. Elles ont toute leur place dans la gestion de ces programmes qui se déploient notamment dans le cadre de la Stratégie nationale de lutte contre l'endométriose mise en place en 2022.
Dès lors qu’elles ont été formées sur la pathologie, elles peuvent agir pour une bonne orientation des patientes. Ressentir des douleurs pendant les menstruations, ce n’est pas normal. Aujourd’hui, la douleur chez la femme est encore très biaisée.

TROUVEZ-VOUS POUR AUTANT QUE LA SENSIBILISATION À LA MALADIE EST PLUS GRANDE ?
Depuis la Stratégie nationale de 2022, on constate que le regard a changé sur la maladie. Pour autant, elle est encore mal connue. Et il existe une grande disparité géographique dans sa prise en charge. En fonction de l’endroit où l’on vit, les médecins ne sont pas nécessairement formés à la pathologie ou ils ne vont pas forcément orienter les patientes vers des soins de support pourtant recommandés par la Haute Autorité de santé (HAS). L’accès à ces soins de support ne sont d’ailleurs pas pris en charge par l’Assurance maladie, ce qui creuse les inégalités. Il faut faire avancer la prise en charge pour réduire les disparités.

DEPUIS FÉVRIER, DES TESTS SALIVAIRES DE DIAGNOSTIC DE L’ENDOMÉTRIOSE SONT EXPÉRIMENTÉS DANS 80 HÔPITAUX FRANÇAIS. UNE RÉELLE AVANCÉE ?
C’est une excellente nouvelle car cela répond à 2 problématiques. Tout d’abord, certaines femmes ont des lésions invisibles à l’imagerie. Elles ont alors besoin d’examens approfondis tels que des cœlioscopie pour diagnostiquer la maladie. Ces tests salivaires permettront de réduire le recours à ces examens invasifs. Ils vont aussi aider à diagnostiquer toutes les femmes qui n’ont pas accès à des centres d’imagerie spécialisés en endométriose. Ce dépistage va faciliter une prise en charge plus précoce de la maladie donc ralentir la dégradation de l’état de santé de la femme. Car dès lors que la maladie est prise en charge tôt, on augmente les chances de diminuer la manifestation des symptômes.

Propos recueillis par Laure Martin

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