Une autre écoute | Espace Infirmier
 

30/08/2017

Une autre écoute

Georges Arbuz, docteur en anthropologie, formateur, enseignant en gérontologie sociale, et co-auteur de « Écouter les sujets âgés » (publié aux éditions Érès), livre sa réflexion sur le besoin d'écoute qui doit aller au-delà de l'attention donnée à ce qui est dit.

Mieux écouter les sujets âgés… Le choix de cet objectif peut étonner ceux qui pensent que l’écoute des aînés est une pratique partagée, en particulier par les professionnels qui en prennent soin. À l’hôpital et dans les résidences d’hébergement, l’écoute est en effet une pratique courante, mais spécifique. On écoute pour évaluer un état de santé, recueillir une plainte, faire un diagnostic. Mais s’intéresse-t-on à l’expérience de vie des sujets âgés, à la manière dont ils vivent leur présent et se représentent leur futur ? On ne leur accorde généralement pas une attention comparable. Or, au fur et à mesure de leur avancée en âge, ces derniers sont confrontés à des épreuves plus ou moins difficiles à vivre, source de fragilisation psychique, qui ont un impact sur la pulsion de vie. Avec le risque de voir apparaître une lassitude, un repli, une perte d’intérêt, pouvant aller jusqu’à la dépression.

Une écoute attentive au positionnement existentiel du sujet âgé permettrait – c’est son objectif – de l’aider à mettre en perspective, à donner du sens à une situation qu’il a vécue ou est en train de vivre, à formuler les questions qu’il se pose. Cela suppose de renoncer à ses savoirs et à ses grilles de lecture, d’être disponible pour accéder à des ressentis et à des réflexions généralement cachées. La personne écoutée n’est dès lors pas considérée comme un sujet souffrant ou en difficulté psychologique, mais comme un acteur de sa vie, à même de mobiliser ses capacités réflexives pour faire le point sur sa situation, envisager avec plus de sérénité les années à venir, retrouver de l’intérêt pour les activités quotidiennes et pour les autres, inventer des manières d’être et de penser qui lui sont propres. Pour jouer pleinement ce rôle, l’écoute doit se démarquer du recueil des données, aller au-delà de l’attention donnée à ce qui est dit. Elle doit être une écoute active, une invitation adressée à la personne pour qu’elle mette en mots ce qu’elle a vécu ou vit présentement, une attente qui, tout en respectant son rythme et le temps dont a elle besoin pour s’exprimer, évite d’être intrusive, est un encouragement pour qu’elle approfondisse et précise sa pensée, tire un enseignement de son expérience. Pour saisir le sens et la portée de cette approche, on peut mentionner le lien qui unit expression et écoute. Ce que dit ou cherche à dire une personne est en correspondance avec la qualité de l’écoute qui lui est proposée, ou plutôt avec la qualité de la présence de l’autre à l’acte de parole. De même qu’il n’y a pas d’évènement théâtral sans spectateur, la nature de l’attention portée à celui qui s’exprime a une incidence sur ce qu’il va exprimer et découvrir en prenant la parole. Bénéfique pour le sujet âgé, cette pratique de l’écoute l’est également pour le professionnel, car elle lui permet d’être plus à l’aise dans son rôle d’écoutant. Mais l’observation montre qu’elle est encore peu partagée, notamment dans les Ehpad.

À découvrir

Toutes nos formations pour les professionnels de santé.

- Gestes & soins d'urgence
- Douleurs
- Management
- Droit & éthique
- SST
- Santé mentale & handicap


Télécharger le catalogue
Feuilleter le catalogue