À Lyon, un patient bénéficie d’une greffe bilatérale de bras | Espace Infirmier
 

Felix Gretarsson

29/01/2021

À Lyon, un patient bénéficie
d’une greffe bilatérale de bras

Le 13 janvier, la première greffe bilatérale de bras et épaule s’est déroulée à l’hôpital Édouard Herriot, à Lyon. Une intervention qui a duré près de quinze heures et a mobilisé cinquante personnes. « Une très grande aventure » pour Élodie Blessemaille, infirmière en réanimation qui a pris part à l’opération.

Felix Gretarsson, un jeune Islandais, a été victime d’un grave accident en 1998 : une décharge de 11 000 volts a brûlé ses mains et il s’est retrouvé plongé dans le coma. À son réveil, trois mois plus tard, il a été amputé des deux bras. Après une rencontre avec le professeur lyonnais Jean-Michel Dubernard, pionnier mondial de la greffe de mains en 1998, Felix quitte l’Islande pour la France en vue de bénéficier d’une greffe bilatérale de bras.

« Felix a lutté quinze ans pour avoir sa transplantation. Nous attendions un donneur depuis près de cinq ans. Vingt-trois ans après son accident, nous avons réussi à le greffer », se félicite le Pr Lionel Badet, chef de service urologie et chirurgie de la transplantation à l’hôpital Édouard Herriot de Lyon. « Cette intervention combine des aspects techniques, mais aussi financiers et logistiques, car il est difficile de réunir une cinquantaine de personnes au même endroit et au même moment », développe-t-il.
L’intervention a eu lieu le 13 janvier 2021. Felix a bénéficié d’une greffe bilatérale de bras, au niveau de l’épaule à gauche et transhumérale proximale à droite. Les préparations du donneur et du receveur ont eu lieu simultanément en deux lieux différents de l’hôpital Édouard Herriot. Élodie Blessemaille, infirmière en service de réanimation au sein de l’hôpital lyonnais, a participé à l’intervention. « J’avais beaucoup d’appréhension sur la façon dont ça allait se passer. En tant qu’infirmière, je connaissais déjà l’ambiance du bloc, mais là, il y avait vraiment beaucoup de monde », témoigne-t-elle. En effet, quatre équipes de chirurgiens ont été mobilisées, à raison de trois chirurgiens par équipe, soit douze chirurgiens, plus trois chirurgiens vasculaires.

Une chirurgie en deux grandes étapes

« Ce patient avait perdu ses bras au-dessus de la tête humérale. Nous avons donc reconstruit l’épaule en apportant un humérus en entier », explique le Dr Aram Gazarian, chef de service chirurgie orthopédique main et membre supérieur à l’hôpital Édouard Herriot. La chirurgie s’est décomposée en deux grandes étapes : d’abord, deux équipes ont prélevé le donneur et deux autres ont préparé le receveur. Ces deux phases ont duré moins de cinq heures chez le donneur et chez le receveur. « Ces quatre équipes ont travaillé en même temps et de façon coordonnée pour que le receveur soit prêt à recevoir ses bras sans attendre, afin que les membres prélevés soient immédiatement revascularisés. En effet, les muscles ne supportent pas une ischémie supérieure à six heures », souligne-t-il.
« L’opération a démarré à 9 heures. Je suis arrivée à 19 heures, au moment où ils finissaient le bras droit : il y avait une vingtaine de chirurgiens, une trentaine de personnes en alerte dans la salle et d’autres personnes à l’extérieur du bloc pour pallier un éventuel manque de matériel. Mon rôle était de m’occuper de la dialyse, pour filtrer le sang tout au long de l’opération et éliminer toutes les toxines, notamment le potassium, afin d’éviter un arrêt cardiaque au moment du déclampage », détaille Élodie Blessemaille.

Douleurs du « membre fantôme »

« C’était une très grande aventure que je n’aurais jamais pensé réalisable. Je n’aurais jamais imaginé qu’on puisse en arriver à ce niveau de greffe ! », s’exclame-t-elle. Elle a également suivi le patient à son réveil en réanimation. « Nous avons pu discuter un peu avec lui au bout de quelques jours. Il était vraiment très heureux. Les premiers temps, ça lui faisait bizarre de se réveiller avec deux mains qui ne lui appartenaient pas. Mais ensuite il les a adoptées, elles étaient devenues les siennes. »
La douleur, en revanche, a été compliquée à gérer. « Il ressentait des douleurs liées à la chirurgie mais aussi des douleurs du membre fantôme, malgré les antalgiques. Heureusement, j’ai fait une formation en hypnoanalgésie aux Hospices civils de Lyon, il y a deux ans. J’ai pu mettre cela en place avec le patient et cela a plutôt bien fonctionné », raconte la soignante.
Actuellement, Felix va bien et aucune complication sérieuse précoce n’a été observée. Il ne présente pas de signe de rejet pour le moment. Il va bientôt entamer une longue rééducation, à l’hôpital Henry Gabrielle, d’ici trois à six semaines. « À ce niveau d’amputation, on ne peut pas espérer qu’une main fonctionne normalement, ni même qu’elle retrouve une sensibilité. En revanche, nous avons de bonnes raisons d’espérer que Félix retrouve une flexion active du coude gauche », conclut le Dr Aram Gazarian.

Anne-Gaëlle Moulun

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