CAIM, Cotram, Coscom, CSTM, quèsaco ? - Objectif Soins & Management n° 253 du 01/02/2017 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 253 du 01/02/2017

 

Économie de la santé

Didier Jaffre  

Comment inciter les médecins libéraux à s’installer dans les zones déficitaires ? Entre dispositifs incitatifs et mesures coercitives, la loi portant modernisation de notre système de santé de janvier 2016 a tranché : nous gardons un système incitatif, dans le cadre du modèle conventionnel.

Dorénavant, le schéma régional de santé indique, dans le respect de la liberté d’installation et donc de manière non opposable, les besoins en implantations pour l’exercice des soins de premier recours et des soins de second recours mentionnés. À cette fin, les directeurs généraux des ARS (agences régionales de santé) déterminent par arrêté, après concertation bien sûr avec les représentants des professionnels de santé concernés, les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins, de manière à réduire les inégalités dans l’accès aux soins et permettre ainsi une meilleure répartition des professionnels de santé sur le territoire national. C’est le fameux zonage et la détermination des zones dites “déficitaires”, qui concernent les médecins libéraux (généralistes et spécialistes), mais également les chirurgiens-dentistes, les infirmiers, les sages-femmes, ou bien encore les masseurs kinésithérapeutes.

Au moment où les ARS procèdent aux travaux d’élaboration des projets régionaux de santé (ou PRS) de deuxième génération, une nouvelle méthode pour déterminer les zones dites “déficitaires” en médecins est sur le point d’être soumise à la concertation. Ces zones, qui seront donc arrêtées par le directeur général de l’ARS mais sans avoir à réviser le projet régional de santé pour autant et donc autant que de besoin pour tenir compte des évolutions de la démographie médicale, sont déterminantes pour la mise en œuvre des nouveaux dispositifs incitatifs d’installation prévus dans la convention médicale signée le 25 août dernier entre l’Assurance maladie et trois des syndicats représentatifs des médecins libéraux. Parmi les objectifs de la convention figure l’amélioration de l’accès aux soins de premier et deuxième recours dans les zones déficitaires en offre médicale avec la mise en œuvre de mesures incitatives, sur la base de contrats type nationaux, pouvant être modulés au niveau régional par les directeurs généraux d’ARS. Ces contrats sont signés entre les professionnels et l’Assurance maladie. Au nombre de quatre, ce sont les fameux :

→ contrats d’aide à l’installation des médecins (CAIM),

→ contrats de transition pour les médecins (Cotram),

→ contrats de stabilisation et de coordination pour les médecins (Coscom),

→ contrats de solidarité territoriale médecin (CSTM).

Mais, au fait, de quoi s’agit-il exactement ?

Le CAIM (contrat d’aide à l’installation des médecins)

Pour les nouveaux médecins qui s’installent en zones déficitaires

Le contrat d’aide à l’installation des médecins (CAIM) a pour objet de favoriser l’installation des médecins dans les zones déficitaires par la mise en place d’une aide forfaitaire versée au moment de l’installation du médecin dans ces zones arrêtées par le directeur général de l’ARS.

Pour en bénéficier, le médecin doit remplir l’ensemble des conditions suivantes :

1 s’installer en exercice libéral dans une zone déficitaire,

2 exercer une activité libérale conventionnée,

3 exercer au sein d’un groupe formé entre médecins ou d’un groupe pluri-professionnel, quelle que soit sa forme juridique, ou appartenir à une communauté professionnelle territoriale de santé ou faire partie d’une équipe de soins primaires avec formalisation d’un projet de santé commun déposé à l’ARS,

4 s’engager à participer au dispositif de permanence des soins ambulatoires tel qu’il est organisé sur le territoire, sauf dérogation accordée par le Conseil de l’Ordre des médecins.

Ce contrat n’est pas cumulable avec les autres et il ne peut être accordé qu’une seule fois.

Dans ce cadre, l’ARS peut, dans le contrat type régional qu’elle arrête, ouvrir le contrat aux médecins s’installant dans les zones précitées ne remplissant pas, au moment de l’installation, la troisième condition d’éligibilité. Les médecins concernés s’engagent à remplir cette condition d’éligibilité, à savoir exercer en groupe ou appartenir à une communauté professionnelle territoriale de santé ou à une équipe de soins primaires, dans un délai de deux ans suivant la signature du contrat. Cette dérogation bénéficie au maximum à 20 % des installations éligibles dans la région.

Le médecin s’engage à exercer en libéral, en groupe, en communauté professionnelle territoriale de santé, ou en équipe de soins primaire son activité au sein de la zone pendant une durée de cinq années consécutives à compter de la date d’adhésion. Le médecin doit alors proposer aux patients de ce territoire une offre de soins d’au moins deux jours et demi par semaine au titre de son activité libérale dans la zone. Le médecin peut également s’engager, à titre optionnel, à réaliser une partie de son activité libérale au sein d’un hôpital de proximité.

En cas de résiliation anticipée du contrat, l’Assurance maladie procède à la récupération des sommes indûment versées au titre de l’aide à l’installation et de la majoration pour l’activité au sein des hôpitaux de proximité, le cas échéant, au prorata de la durée restant à courir dans le contrat au moment de la résiliation demandée par le médecin. Le médecin adhérent au contrat bénéficie d’une aide forfaitaire à l’installation d’un montant de 50 000 euros pour une activité de quatre jours par semaine. Pour le médecin exerçant entre deux jours et demi et quatre jours par semaine à titre libéral dans la zone, le montant est proratisé sur la base de 100 % pour quatre jours par semaine (31 250 euros pour deux jours et demi, 37 500 euros pour trois jours et 43 750 euros pour trois jours et demi par semaine). Cette aide est versée dans les conditions suivantes :

→ 50 % à la signature du contrat,

→ le solde de 50 % à la date du premier anniversaire du contrat.

Le médecin adhérent au contrat bénéficie également d’une majoration de ce forfait d’un montant de 2 500 euros s’il s’est engagé, à titre optionnel, à réaliser une partie de son activité libérale au sein d’un hôpital de proximité. La somme correspondant à cette majoration est versée dans les conditions suivantes : 1 250 euros lors de la signature du contrat et 1 250 euros à la date du premier anniversaire du contrat. La majoration de l’ARS ne peut excéder 20 % de l’aide forfaitaire et cette dérogation bénéficie au maximum à 20 % des installations éligibles dans la région.

Le Cotram (contrat de transition pour les médecins)

Pour aider les médecins en zones déficitaires qui partent en retraite à trouver un remplaçant

Le contrat de transition pour les médecins (Cotram) a pour objet de soutenir les médecins installés au sein des zones déficitaires qui, préparant leur cessation d’exercice, s’engagent à accompagner pendant cette période de fin d’activité un médecin dans leur cabinet (soutien dans l’organisation et la gestion du cabinet médical, connaissance de l’organisation des soins sur le territoire et appui à la prise en charge des patients en fonction des besoins du médecin).

Pour en bénéficier, le médecin doit remplir les conditions suivantes :

1 être installé dans une zone déficitaire,

2 exercer une activité libérale conventionnée,

3 être âgé de 60 ans et plus,

4 accueillir au sein de son cabinet un médecin qui s’installe dans la zone, âgé de moins de 50 ans et exerçant en exercice libéral conventionné.

Pour un même médecin, ce contrat de transition n’est pas cumulable avec les autres contrats. Le médecin s’engage à accompagner son confrère installé dans son cabinet pendant une durée de trois ans dans toutes les démarches liées à l’installation en exercice libéral, à la gestion du cabinet et à la prise en charge des patients en fonction des besoins de ce dernier.

Le contrat peut faire l’objet d’un renouvellement pour une durée maximale de trois ans en cas de prolongation de l’activité du médecin adhérent au contrat au-delà de la durée du contrat initial dans la limite de la date de cessation d’activité de ce dernier.

En cas de résiliation anticipée du contrat par le médecin, le calcul des sommes dues au titre de l’année au cours de laquelle intervient cette résiliation est effectuée au prorata temporis de la durée effective du contrat au cours de ladite année. Le médecin adhérent au contrat bénéficie chaque année d’une aide à l’activité correspondant à 10 % des honoraires tirés de son activité conventionnée clinique et technique (hors dépassements d’honoraires et rémunérations forfaitaires) dans la limite d’un plafond de 20 000 euros par an. Pour les médecins exerçant en secteur à honoraires différents, l’aide à l’activité est proratisée sur la base du taux d’activité réalisée aux tarifs opposables par le médecin. Le montant dû au médecin est calculé au terme de chaque année civile, le cas échéant au prorata de la date d’adhésion du médecin au contrat. Le versement des sommes dues est effectué dans le second trimestre de l’année civile suivante.

Comme pour le CAIM, l’ARS peut majorer l’aide dans la limite de 20 % de l’aide et au maximum à 20 % des médecins éligibles dans la région à ce type d’aide démographique.

Le COSCOM (contrat de stabilisation et de coordination pour les médecins)

Pour maintenir les médecins déjà installés en zones déficitaires

Le contrat de stabilisation et de coordination pour les médecins (Coscom) vise à valoriser la pratique des médecins exerçant dans les zones déficitaires, et notamment l’accueil d’étudiants en stage, pratiquer dans les hôpitaux de proximité.

Pour en bénéficier, il faut remplir l’ensemble des conditions suivantes :

1 être installé dans une zone déficitaire,

2 exercer une activité libérale conventionnée,

3 exercer au sein d’un groupe formé entre médecins ou d’un groupe pluri-professionnel quelle que soit sa forme juridique ou appartenir à une communauté professionnelle territoriale de santé ou à une équipe de soins primaires.

Ce contrat n’est pas cumulable avec les autres. Il est conclu pour une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction. Le médecin peut également s’engager, à titre optionnel, à réaliser une partie de son activité libérale au sein d’un hôpital de proximité et à exercer les fonctions de maître de stage universitaire et à accueillir en stage des internes en médecine réalisant un stage ambulatoire de niveau 1 ou des étudiants en médecine réalisant un stage d’externat en médecine générale.

En cas de résiliation anticipée du contrat par le médecin, le calcul des sommes dues au titre de l’année au cours de laquelle intervient cette résiliation est effectuée au prorata temporis de la durée effective du contrat au cours de ladite année. L’ARS peut ouvrir le contrat type régional aux stages ambulatoires en soins primaires en autonomie supervisée (Saspas) pour les internes, après appréciation des éventuelles aides financières existant sur son territoire visant à favoriser cette activité de maître de stage.

Le médecin adhérent au contrat bénéficie d’une rémunération forfaitaire de 5 000 euros par an. Le médecin adhérent au contrat bénéficie également d’une majoration d’un montant de 1 250 euros par an versé au moment du paiement de l’aide forfaitaire précitée, s’il a réalisé une partie de son activité libérale au sein d’un hôpital de proximité. Le médecin adhérent au contrat bénéficie également d’une rémunération complémentaire de 300 euros par mois pour l’accueil d’un stagiaire à temps plein (correspondant à 50 % de la rémunération attribuée par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche pour l’exercice des fonctions de maître de stage universitaire) s’il a accueilli des étudiants en médecine réalisant un stage ambulatoire. Cette rémunération complémentaire est proratisée (prorata temporis) en cas d’accueil d’un stagiaire à temps partiel.

Pour les médecins exerçant en secteur à honoraires différents, les rémunérations versées sont proratisées sur la base du taux d’activité réalisée aux tarifs opposables par le médecin.

Le montant dû au médecin est calculé au terme de chaque année civile, et, le cas échéant, au prorata de la date d’adhésion du médecin au contrat. Le versement des sommes dues est effectué dans le second trimestre de l’année civile suivante. L’ARS peut majorer l’aide dans la limite de 20 % de l’aide et au maximum à 20 % des médecins éligibles dans la région à ce type d’aide démographique.

Le CSTM (contrat de solidarité territoriale médecin)

Pour les médecins qui souhaitent être solidaires avec leurs confrères des zones déficitaires

Le contrat de solidarité territoriale médecin (CSTM) a pour objet d’inciter les médecins n’exerçant pas dans une zone déficitaire à consacrer une partie de leur activité libérale pour apporter leur aide à leurs confrères exerçant dans ces zones. Pour en bénéficier, le médecin doit :

1 ne pas être installé dans une zone déficitaire,

2 exercer une activité libérale conventionnée,

3 s’engager à réaliser une partie de son activité libérale représentant au minimum dix jours durant l’année dans une zone déficitaire.

Le médecin s’engage dans ce contrat pour une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction. En cas de résiliation anticipée du contrat par le médecin, le calcul des sommes dues au titre de l’année au cours de laquelle intervient cette résiliation est effectuée au prorata temporis de la durée effective du contrat au cours de ladite année.

En contrepartie, le médecin bénéficie d’une aide à l’activité correspondant à 10 % des honoraires tirés de l’activité conventionnée clinique et technique (hors dépassements d’honoraires et rémunérations forfaitaires) réalisée dans le cadre du contrat au sein des zones déficitaires, dans la limite d’un plafond de 20 000 euros par an. Pour les médecins exerçant en secteur à honoraires différents, l’aide à l’activité est proratisée sur la base du taux d’activité réalisée aux tarifs opposables par le médecin. Le médecin adhérent bénéficie également d’une prise en charge des frais de déplacement engagés pour se rendre dans les zones précitées. Cette prise en charge est réalisée selon les modalités prévues pour les conseillers des caisses d’Assurance maladie dans le cadre des instances paritaires conventionnelles. Le montant dû au médecin est calculé au terme de chaque année civile, le cas échéant au prorata de la date d’adhésion du médecin au contrat. Le versement des sommes dues est effectué dans le second trimestre de l’année civile suivante.

L’ARS peut majorer l’aide dans la limite de 20 %.

CONCLUSION

Ces contrats peuvent être conclus dès que les directeurs généraux d’ARS ont adopté les contrats types régionaux, ce qui est à peu près le cas dans la plupart des régions. Pour l’instant, bien sûr, les zones concernées sont celles qui sont en vigueur, avant la publication des nouvelles zones par les ARS selon la nouvelle méthode, sachant que, par dérogation, les contrats conclus par des médecins ne se trouvant plus dans des zones déficitaires à la suite de la publication du nouveau zonage par l’ARS se poursuivent jusqu’à leur terme. Les médecins installés dans une zone antérieurement caractérisée comme disposant d’une offre de soins insuffisante conservent transitoirement le bénéfice de l’aide à laquelle ils étaient auparavant éligibles.

Mais en quoi ces dispositifs seront-ils plus incitatifs que ceux mis en œuvre dans le passé, et notamment ceux du Pacte territoire santé, désormais inscrit dans la loi ? Car force est de constater que le bilan est fort mitigé et que les difficultés démographiques se sont aggravées dans les zones fragiles, et ce, malgré l’arsenal des dispositifs (exercice regroupe, formation, etc). Les quatre contrats sont des dispositifs exclusivement d’incitation financière, mais est-ce vraiment ce que recherchent les jeunes médecins ? Toutes les régions sont profondément touchées, y compris la région Île-de-France où l’urbanisation ne garantit pas l’installation des professionnels libéraux, bien au contraire. La convention médicale réussira-t-elle à arrêter l’hémorragie ? L’avenir le dira, mais aura-t-on le temps de mettre en place d’autres dispositifs ? Car il y a urgence.

POUR EN SAVOIR PLUS

Arrêté du 20 octobre 2016 portant approbation de la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l’Assurance maladie signée le 25 août 2016, Journal officiel du 23 octobre 2016. À consulter sur le site legifrance.fr, via le lien raccourci bit.ly/2kROAkc