Place de la simulation dans un parcours de formation initiale - Objectif Soins & Management n° 248 du 01/09/2016 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 248 du 01/09/2016

 

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Patrice Lombardo  

La simulation fait une entrée en force dans la mise en œuvre des formations initiales paramédicales. Si cet outil pédagogique existe depuis longtemps, le plus souvent initié par la profession d’infirmière, il a pris une ampleur considérable grâce à une modélisation méthodologique, structurant notamment le débriefing et bien évidemment une évolution de la technologie. En effet, les mannequins haute-fidélité nous surprennent par leur capacité à simuler les scénarii construits. Expérience.

Pourtant en formation initiale, comme pour tout contexte spécifique, la place de la simulation doit être réfléchie et adaptée. Tout ne peut pas être simulation, et l’utilisation du “procédural”, du patient simulé ou de la simulation hybride n’estpas à négliger. Mais que peut apporter la simulation en formation initiale infirmière ?

DES BÉNÉFICES MULTIPLES

La simulation en formation initiale est bénéfique à plusieurs titres.

• Tout d’abord parce qu’elle est contingente du développement des valeurs pédagogiques de l’Ifsi d’Annecy, de pouvoir proposer à ses étudiants des méthodologies d’apprentissage différentes, parfois classiques mais aussi innovantes et de se donner les moyens de les mettre en œuvre.

• Ensuite, c’est une méthode formidable pour préparer au mieux les futurs professionnels et qui tend vers l’objectif principal de la simulation : « Jamais la première fois sur le patient. ». Cette approche très pragmatique, notamment dans la forme procédurale, invite à développer les fondamentaux du soin infirmier, notamment en début de formation. Cela participe par la suite à prendre en compte progressivement la complexité des situations avec la “formule” du patient simulé et de mettre en lien acquisitions théoriques des temps école et pratiques issues des stages.

• Plus largement, elle active et réactive la réflexivité du praticien que devient peu à peu l’apprenant et lui donne un mode de fonctionnement à travers ses actions de soignant, mais aussi dans ses missions d’encadrement ou de transmission de savoir qui existent très précocement dans la formation. En effet, cette mission de transmissions permet non seulement d’encadrer un collègue (étudiant de troisième année pour un étudiant de première année par exemple) mais également de vérifier la capacité à transférer ses propres savoirs, “stade ultime de la démarche d’apprentissage”.

• Au total, les conséquences pour les étudiants sont qualitatives. La qualité d’apprentissage amplifiée par la simulation va sans aucun doute agir sur la qualité de soins produite auprès des usagers, ceux soignés par nos étudiants pendant les stages et bien entendu pour les patients soignés après l’obtention du Diplôme infirmier.

• C’est bien le pari lancé par l’équipe pédagogique de notre Ifsi et plus largement par ceux qui développent la simulation, que de montrer l’intérêt pour l’usager de soin. C’est bien là, un autre intérêt de la simulation en formation infirmière que de motiver les cadres de santé chargés de formation qui vont alors chercher à se former pour encadrer au mieux. C’est pourquoi le corpus de formation universitaire est un appui considérable.

LA PLURALITÉ, POUR LA COLLABORATION DE TOUS

Pourtant, il est essentiel, sur ce point, de ne pas rester sur une orientation unilatérale de formation individuelle centrée sur la simulation et seulement la simulation. Ainsi, c’est la pluralité des CV des cadres de santé qui fait la qualité de chaque individu et du groupe. C’est d’ailleurs pourquoi, à l’Ifsi d’Annecy, l’objectif de formation continue individuelle sur le plan du cursus universitaire est à la fois quantitatif et qualitatif. Actuellement, ce ne sont pas moins de 70 % des formateurs qui sont titulaires d’un Master et les disciplines laissées au choix individuel reprennent bien évidemment la simulation en santé mais aussi : les sciences de l’éducation, le management des structures sanitaires et sociales, la santé publique… Car ce qui fait la qualité d’une structure comme notre institut, c’est la diversité des expériences et le haut niveau de qualité des formations de chacun. L’idée principale est de maintenir la qualité de la professionnalisation par un enseignement du soin infirmier au plus proche de la réalité, mais aussi de proposer un niveau universitaire suffisant pour sortir d’une approche corporatiste et tendre vers la pluridisciplinarité et la pluriprofessionalité. Car ce sont bien plusieurs personnes issues de plusieurs métiers ou disciplines qui se retrouvent auprès du lit de l’usager de soins. Il est donc essentiel de collaborer avec les autres métiers du soin. Plusieurs pistes sont alors envisageables à partir des référentiels de mesure de performance des structures universitaires.

Tout d’abord, il est intéressant de noter qu’il existe plusieurs palmarès des universités avec un “top 10” publié chaque année. C’est notamment le palmarès réalisé par l’université de Jiao Tong de Shangai en Chine qui est essentiellement basé sur des critères de performance en recherche et développement. Ce choix fait d’ailleurs l’objet de discussions en référence à l’avènement de ce palmarès. En effet, les Chinois souhaitaient connaître la cause des différences entre universités chinoises et américaines et la recherche est apparue comme le critère essentiel de réussite des universités. Les quatre éléments de mesure sont :

• la qualité de l’institution (notamment le nombre de prix Nobel parmi les chercheurs),

• la qualité de l’éducation (nombre de prix Nobel et de médailles Fields parmi les anciens élèves),

• les publications (nombre d’articles scientifiques),

• la taille de l’institution, et donc les ressources financières.

Une seconde référence de classement des universités est réalisée chaque année par le Times Higher Education utilisée par les recruteurs du monde entier*. La méthodologie de classement repose sur l’utilisation de cinq critères principaux :

• la qualité de l’enseignement à partir du sondage Thomson Reuters sur la réputation académique de l’université, le nombre d’étudiants par professeur, le nombre et la variété de titulaires de doctorat et les ressources financières,

• le nombre de publications par les chercheurs,

• le budget recherche,

• l’ouverture internationale, qui comprend le nombre d’enseignants ou d’étudiants étrangers et les collaborations de recherche internationales,

• les revenus engrangés auprès du secteur privé.

LES ATOUTS DE LA SIMULATION EN FORMATION INITIALE

Sans chercher à comparer notre institut aux grandes universités internationales, il est intéressant de montrer ce que sont les déterminants majeurs de la qualité de la production de savoir pour proposer dans notre formation professionnalisante des orientations stratégiques qui embellissent la démarche d’universitarisation du métier d’infirmière. La simulation en santé en fait partie car c’est un formidable terreau de recherche, un catalyseur de mobilisation individuelle et groupale, et les travaux actuels cherchent à le montrer : un vecteur majeur de la qualité des soins prodigués aux patients. En ce sens, notre service public hospitalier s’en est emparé de la meilleure façon.

NOTE

* Journal Le Figaro Magazine des 16 et 17 novembre 2012.

AGENDA

• L’Ifsi du Centre hospitalier Annecy Genevois organise les journées paramédicales II les 13 et 14 octobre 2016 à Annecy. Renseignements via le lien raccourci bit.ly/1YAQTms

LECTURE

• Formation par la simulation. Collectif sous la direction de Sophie Prissette et Catherine Dupuy-Maribas. Éditions Lamarre. En vente sur le site librairie-sante.fr