Syndrome du bébé secoué : priorité à la prévention - Objectif Soins & Management n° 199 du 01/10/2011 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 199 du 01/10/2011

 

Actualités

Laure de Montalembert  

ENTRETIENS DE BICHAT → Difficile à diagnostiquer et de conséquences catastrophiques, le syndrome du bébé secoué fait de nombreuses victimes chaque année en France. Il existe néanmoins des moyens de prévenir sa survenue.

« Certains parents pensent que secouer leur bébé, c’est moins grave que de le frapper. Ils ne voient pas ça comme de la maltraitance », lance le Dr Hervé Haas, pédiatre à Nice, aux Entretiens de Bichat le jeudi 29 septembre dernier. C’est à cette erreur monumentale qu’on doit environ 180 à 200 cas de syndromes du bébé secoué (SBS) chaque année en France. Des enfants présentant une importante disproportion entre les lésions internes gravissimes et les lésions externes minimes. « Les forces exercées par l’adulte qui secoue un nourrisson sont majorées par le poids de la tête plus important, la faiblesse des muscles du cou, et le non-contrôle postural de la tête », explique le médecin avant d’en préciser la conséquence dramatique : la formation d’hématomes sous-duraux.

Une véritable enquête

Lors de l’arrivée aux urgences, le bébé présente un tableau effrayant, allant des vomissements aux convulsions, en passant par des troubles de la conscience, une tension de la fontanelle, des pauses respiratoires ou encore une extrême pâleur. Rares sont les parents qui admettent avoir fait du mal à leur enfant. C’est la raison pour laquelle on recherche des atteintes associées, et particulièrement des ecchymoses au niveau des “prises” du tronc ou de la face postérieure des bras. « Il est important de connaître le lieu de vie de l’enfant, son mode de garde, les difficultés récentes dans la famille ou lors de la grossesse. Un retard de consultation est parfois constaté de la part des parents, plus par déni, sincère ou dû à un refoulement psychologique, qu’une crainte de la découverte de la maltraitance par le médecin », explique Hervé Haas. Malgré tout cela, le diagnostique reste souvent complexe à poser. Seule l’autopsie offre une certitude, mais les parents ont le droit de s’y opposer. Et même si l’enfant survit, les épisodes se renouvellent parfois puisque le fait de secouer le nourrisson provoque une apnée qui arrête immédiatement les pleurs.

Prendre soin des parents

Lorsque le diagnostic est confirmé, il est déjà trop tard. Les conséquences du SDS allant de “banales” difficultés d’apprentissage au coma végétatif ou à la mort. C’est en amont qu’il faudrait intervenir. « Il faut expliquer aux parents que les pleurs ne sont pas une remise en cause de leurs qualités parentales. Les cris sont le seul moyen d’expression du bébé. S’ils deviennent insupportables, il faut poser le bébé, sortir de la pièce et se reposer un peu, le temps que la tension s’apaise », affirme le praticien, lui-même père de trois fils, et qui avoue avoir parfois eu « envie de les étrangler ».

Parmi les facteurs de risques importants, il y a les coliques sévères de l’enfant entraînant des pleurs dépassant 20 % du temps. Dans ces cas-là, le médecin recommande à ses confrères pédiatres et généralistes d’éviter de sous-estimer le désarroi des parents : « Leur dire que leur enfant n’a aucun problème et les renvoyer chez eux sans proposer d’aide, c’est la pire des choses, insiste-t-il. Il faudrait mettre en place une consultation juste pour eux, car après, c’est trop tard. » La question restera néanmoins en suspens : pourquoi certains parents passent-ils à l’acte et d’autres pas ?