De la psychiatrie au médico-social - Objectif Soins & Management n° 199 du 01/10/2011 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 199 du 01/10/2011

 

SERGE LE FOLL

Parcours

Joëlle Maraschin  

Cadre supérieur de santé et ancien infirmier de secteur psychiatrique, Serge Le Foll est aujourd’hui le coordinateur des soins de l’institut Le Val Mandé. Responsable notamment d’un service d’accompagnement spécialisé dans le handicap psychique, il a su faire le lien entre la psychiatrie et le médico-social.

C’est au détour de son exercice professionnel à l’hôpital Esquirol, un EPS dans le Val-de-Marne (94), que Serge Le Foll a découvert l’institut Le Val Mandé. Sollicité par l’ancienne cadre de santé proche de la retraite, il s’est décidé à postuler sur le poste. « C’était un beau challenge que celui de découvrir la culture du médico-social », résume-t-il. L’institut Le Val Mandé est un établissement médico-social public qui accueille et accompagne les personnes présentant un handicap intellectuel, moteur ou psychique. Recruté comme cadre de santé en 2006 par la direction de l’établissement, il est nommé six mois plus tard cadre supérieur de santé. D’une part, il encadre soignants et éducateurs de la Maison d’accueil spécialisée (MAS), laquelle est un lieu de vie et de soins pour une quarantaine d’adultes lourdement handicapés. D’autre part, il est en charge de la coordination des soins pour l’ensemble des douze structures de l’institut : MAS, Institut médico-éducatif (IME) pour les enfants, foyers de jour et de vie, Établissement et service d’aide par le travail (Ésat, anciennement dénommé centre d’aide par le travail), services d’accompagnement… « Coordonner les soins dans un établissement tel que l’institut Le Val Mandé, c’est amener une expertise en soins auprès des différents services, mais aussi donner les moyens aux équipes socio-éducatives de s’informer et de se former aux soins », explique-t-il.

Les droits des personnes handicapées

Les professionnels qui interviennent pour promouvoir l’autonomie des personnes handicapées ne sont pas toutes soignantes. À côté des médecins, infirmières et aides-soignantes, travaillent aussi des éducateurs spécialisés, des aides médico-psychologiques ou encore des conseillères en économie sociale et familiale. « L’établissement n’est pas organisé et financé comme un hôpital, nous n’avons pas de forfait soins pour une grande part des structures. Une de nos missions essentielles est de faire en sorte que les personnes que nous accueillons aient les mêmes droits que tout citoyen », précise-t-il.

Serge Le Foll s’est notamment occupé de l’organisation d’une évaluation annuelle, sur site, de l’état bucco-dentaire de l’ensemble des usagers de l’établissement, de la sécurisation du circuit des médicaments ou encore du projet d’informatisation du dossier de l’usager. Il travaille avec deux infirmières de l’institut pour cette mission de coordination des soins. « Il s’agit de mettre en place les protocoles nécessaires, et ce, d’autant plus que le personnel soignant n’est pas présent en continu auprès des personnes », continue-t-il.

Associé à l’écriture du projet médical de l’établissement pour la partie soins, Serge Le Foll s’investit par ailleurs dans la recherche de partenariats pour faciliter l’accès aux soins des personnes handicapées : conventions avec des hôpitaux pour les soins dentaires ou l’accès aux urgences, sensibilisation des médecins libéraux aux personnes handicapées… « Ce poste est très riche et passionnant, mais c’est aussi beaucoup de travail, reconnaît-il. Comparé à un cadre supérieur exerçant à l’hôpital, je suis beaucoup moins dans le management des cadres, mais sans doute beaucoup plus associé aux décisions et aux orientations de l’institut. » En l’absence d’une direction des soins, il est de fait en lien direct avec la direction générale de l’établissement.

Outre la coordination des soins pour l’ensemble de l’établissement, Serge Le Foll est depuis un an responsable de deux services d’accompagnement du pôle proximité, le Savie et Samsah (Service d’accompagnement médico-social pour les personnes handicapées). « Les schémas sont différents de l’hôpital. Nous travaillons certes avec des praticiens hospitaliers à temps partiel, mais ce ne sont pas eux qui sont responsables des services », indique-t-il.

Le Samsah de l’institut Le Val Mandé est spécialisé dans le handicap psychique. L’objectif est d’accompagner des personnes adultes dont l’autonomie est réduite par une pathologie mentale. Il propose un accompagnement individualisé prenant en compte le suivi des soins et le maintien dans le logement, la vie sociale et professionnelle. « Les missions du Samsah peuvent sembler assez proches de celles d’un centre médico-psychologique, mis à part que nous travaillons avant tout sur le projet et le souhait des usagers », continue Serge Le Foll. Plus de 80 ?% des patients accompagnés par le Samsah sont suivis par le secteur. « Cela a été un grand plaisir pour moi de retravailler en lien avec la psychiatrie, ajoute-t-il. J’aime particulièrement ces patients, j’ai l’impression de pouvoir leur apporter. »

IPS puis cadre à Esquirol

Né en 1965 à l’hôpital Esquirol, l’un des rares hôpitaux psychiatriques à disposer d’une maternité publique pour la population du Val-de-Marne, Serge Le Foll est très attaché à l’humanité des soins en psychiatrie. Après avoir vécu ses vingt premières années de vie dans l’enceinte d’Esquirol avec ses parents personnels hospitaliers, lesquels occupaient alors un logement de fonction à l’hôpital, Serge Le Foll décide de suivre les études d’infirmier de secteur psychiatrique. « Ce n’était pas une vocation de départ puisque j’avais suivi des études dans le domaine de l’électronique. Mais je suis tombé très vite amoureux de ce métier », se souvient-il. De 1986 à 2000, il exerce en tant qu’infirmier de secteur psychiatrique dans différents services adultes de l’hôpital Esquirol. Il passe ensuite son diplôme de cadre à l’institut de formation des cadres de l’hôpital Sainte-Anne.

Cadre à Esquirol, sa première mission est de restructurer le centre médico-psychologique (CMP) et le centre d’accueil et de crise. Il réintègre l’intrahospitalier pour accompagner une équipe en difficulté puis revient en tant que cadre de santé du CMP jusqu’en 2006. Professionnel engagé, il rejoint très vite l’association Serpsy (Soin, étude et recherche en psychiatrie) créée par des infirmiers d’Esquirol à la fin des années 1990. Cette association, qui dispose d’un site Internet particulièrement riche*, s’est donnée pour mission d’être un espace de réflexion et d’échanges autour de la relation soignant/soigné. « J’ai conservé ce côté militant, comme nombre de mes collègues qui travaillaient en psychiatrie à cette époque », souligne-t-il. Il continue de suivre et de s’intéresser à l’évolution de la psychiatrie, dont les enjeux lui semblent toujours aussi importants. « Je suis très sceptique quant à la dernière réforme des soins sous contrainte. Sans prendre en compte l’intérêt des patients, cette loi a été faite avant tout dans un souci sécuritaire », dénonce-t-il.

Toujours trésorier de l’association Serpsy, Serge Le Foll souhaite continuer le combat pour défendre la qualité des soins en psychiatrie. Et s’il a fait le choix de travailler dans le médico-social, il n’exclut pas de revenir un jour en psychiatrie, ne serait-ce que pour les dernières années de sa carrière.

* www.serpsy.org.