Le port des gants en milieu hospitalier - Objectif Soins & Management n° 187 du 01/06/2010 | Espace Infirmier
 

Objectif Soins n° 187 du 01/06/2010

 

Qualité, hygiène et gestion des risques

Philippe Blanco*   Thierry Joutard**  

MATERIEL DE PROTECTION → Évoquer le port des gants à l’hôpital(1), c’est tout d’abord évoquer l’hygiène. Mais vouloir diffuser et mettre en œuvre les bonnes pratiques en termes d’hygiène hospitalière amène en général à se heurter à deux grandes familles de difficultés.

Dans ce but, et en premier lieu, il faut apporter de l’information, une information scientifiquement validée mais également adaptée et compréhensible par le plus grand nombre. C’est une dimension du travail des hygiénistes, nécessairement pédagogique. Pour autant – et c’est qui nous amène à la seconde famille de difficultés – il ne suffit pas de transmettre ni de savoir. Les habitudes sont là, portées par tout un champ de représentations sociales qui guident l’action quotidienne. Pour essayer d’en comprendre les racines, explorons les questions suivantes : quels sont les obstacles aux changements de pratiques attendus ? Pour le dire autrement, bien que l’information ait été donnée, pourquoi les professionnels ne modifient-ils pas immédiatement leurs pratiques ? Et pour être plus concret encore, pourquoi le port de gants n’est-il pas toujours conforme aux recommandations ?

Il faut alors essayer d’identifier quelques mécanismes psychosociaux avec lesquels composer. Les éluder serait contre-productif, tenter de les intégrer à une stratégie pédagogique paraît plus pertinent. Plusieurs niveaux d’analyse sont possibles : certains relèvent du psychologique, d’autres du sociologique ou encore de l’histoire, etc. Retenons-en quelques-uns.

DE LA SALETÉ À LA SOUILLURE, PUR ET IMPUR…

Le port du gant est associé à la protection donc au risque, le risque de contact avec la souillure et, plus précisément, à la contagion. Premier niveau comme l’écrit Paul Ricœur : « La souillure elle-même est à peine une représentation et celle-ci est noyée dans une peur spécifique qui bouche la réflexion ; avec la souillure nous entrons au règne de la terreur. »(2) Les peurs les plus archaïques organisent ainsi nos réflexes professionnels quotidiens et tendent à restreindre le champ de la raison.

D’un autre point de vue, le regard anthropologique, notamment celui de Mary Douglas(3), invite à aborder les notions de contagion, de pollution, de tabou. Elle écrit que lorsque l’on aborde la question de la souillure, on traite aussi de classification, de séparation : ce qui est propre et ce qui est sale, ce qui est pur et ce qui est impur, ce qui est à sa place et ce qui ne l’est pas. Ces classifications ayant d’ailleurs un caractère arbitraire, fortement relié à la culture ou à des normes sociales. À ce propos, en introduction à son livre(3), Mary Douglas remercie son mari qui, en matière de propreté, possède un seuil de tolérance beaucoup plus bas que le sien ce qui l’a obligé à prendre position sur la relativité de la saleté. Elle cite aussi l’exemple de brahmanes indiens qui se sentent si impurs que pour éliminer ces impuretés, ils se nettoient avec de la bouse de vache. Nos repères culturels occidentaux s’en trouvent évidemment bouleversés.

Ce dernier exemple amène à confronter les notions de propre, de pur et de sacré. La religion catholique établit un lien dans le vocabulaire théologique entre le péché et la saleté. « Le péché flétrit l’âme, ternit sa blancheur, le péché originel a souillé le genre humain l’excluant du paradis, le séparant de Dieu. L’âme du nouveau-né doit être lavée par l’eau du baptême pour réintégrer par la médiation de l’église la société privilégiée des êtres humains promis au salut. Seule la mère du Christ échappe à cette tare constitutionnelle. Sa conception fût immaculée, c’est-à-dire étrangère à toute pollution charnelle. »(3)

Ces quelques lignes rappellent le principe du tabou du corps, de la honte qui entoure la nudité et la sexualité dans la morale chrétienne. La salissure nous rapprocherait du péché.

La salissure, c’est ce qui n’est pas à sa place, écrit encore Mary Douglas(3). « Mes chaussures sont propres, si je les mets sur la table, c’est sale ». « La salade que nous avons mangée ce midi a été confectionnée en respectant scrupuleusement les règles d’hygiène selon la réglementation HACCP (NDRL : Hazard Analysis Critical Control : Point, méthode et principes de gestion de la sécurité sanitaire des aliments), pourtant cette éclaboussure de salade sur ma chemise, ça fait sale. »… Les effluents corporels sont propres tant qu’ils sont à leur place. L’urine dans la vessie, c’est propre, l’urine par terre, c’est sale. Le sang qui coule dans les veines, c’est propre, parfois c’est noble, sang bleu, pur sang ; quand le sang se répand, c’est sale.

Dans certaines sociétés, la souillure se rapproche de la notion de caste. Les membres des castes nobles passent beaucoup de temps à se purifier. Ils risquent de se contaminer au contact de personnes d’une caste inférieure. Cette fois, la contamination est sociale. L’impur, l’intouchable, c’est celui qui a voulu changer de caste, échapper à la règle.

Sommes-nous très loin du port des gants chez les patients ? Peut-on établir des liens entre ces réflexions et le port de gants dans les services de soins ? Partons de quelques situations.

CES INFIRMIERES QUI « PIQUENT » SANS GANTS

Les AES

Depuis 1990, 47 professionnels de santé ont contracté le virus du sida, et 48 une hépatite C, dans le cadre de leur activité professionnelle. Ces deux infections sont les principales complications d’un accidents d’exposition au sang (AES). Voilà très sommairement pour le risque. Le bilan des surveillances nationales des AES de 2007, publié par l’InVS(4), relève 15 600 accidents d’exposition au sang. Dans 37 % des cas, les victimes ne portaient pas de gants. Or on sait de façon certaine que le gant constitue une protection efficace contre la transmission des virus grâce à l’effet d’essuyage. La courbe est plutôt favorable puisque ce chiffre tend à diminuer d’année en année. Pour l’inter-région Ouest, en 2004, 38 % des victimes ne portaient pas de gants. Elles sont 28 % en 2008.

Habitude et savoir expérientiel

Quand on interroge les infirmières sur le “non-port” de gants, elles invoquent des motifs externes dans 2 % des cas (gants non disponibles ou taille inadaptée) mais, dans 98 % des cas, les raisons invoquées relèvent d’un choix comportemental individuel : patient jugé “non à risque”, « je ne mets pas des gants systématiquement »

Les habitudes sont confortées par un savoir expérientiel. Le prélèvement sanguin sans gants est argumenté : « Avec les gants, je sens moins bien les veines, je n’ai pas l’habitude. » Certaines infirmières suggèrent une moindre efficacité des actes pratiqués avec gants. Cette connaissance empirique est alimentée par les pratiques anciennes (« j’ai toujours piqué sans gants et je n’ai jamais eu de problèmes »), pratiques validées en formation initiale. Or, quand une infirmière a appris à l’école à piquer uniquement ou essentiellement à mains nues et a continué à pratiquer ainsi pendant des années et qu’on lui signifie qu’elle doit dorénavant accomplir les mêmes gestes avec des gants, elle n’est pas seulement gênée, elle est aussi renvoyée à un désaveu implicite de sa compétence et de celle de ses maîtres.

Minimiser les risques

Parmi les raisons (souvent inconscientes) pour ne pas porter les équipements de sécurité : celles qui nous rappellent la présence du danger et, en ce sens, qui seraient plutôt anxiogènes. « Lorsque je ne prends pas les équipements de protection, j’oublie aussi la présence du danger. Si je ne porte pas de gants, je mets de côté, j’élude la possibilité de me piquer et de me contaminer. » Le risque est également une chose à laquelle on s’habitue et, par conséquent, moins il y a d’accidents, plus on a tendance à considérer que le risque n’existe pas.

Autre argument qui rejoint ce que nous développions plus haut, la sécurité inhiberait l’efficacité professionnelle. Au carrefour de toutes ces logiques, des pratiques quotidiennes qui tendent à ignorer ou, tout au moins, à minimiser la question du risque. Des études réalisées sur le risque en milieu industriel ou dans les travaux publics montrent bien ces phénomènes de rationalisation du danger.

Des a priori sur les patients

Dans ce registre, on peut aussi parler des idées fausses sur les patients. L’infirmière aurait sa propre conception du patient qu’elle considère comme à risque ou non pour elle : jeune ou vieux, homosexuel, blanc ou noir, etc. En fonction de cette image ou de ces stéréotypes, certaines portent ou non des gants. On retrouve ce que nous disions plus haut sur la souillure et la classification : il y a des gens “propres sur eux”, un peu comme nous, dans une certaine “norme sociale”, et puis d’autres, à la marge, trop gros, trop sales, sans domicile fixe, etc. Bien que chacun cherche à s’en défendre, nombre de stéréotypes gouvernent tout ou partie des pratiques professionnelles. L’exemple le plus classique, une dame de 95 ans, catholique très pratiquante, ne peut pas avoir le sida, pense l’infirmière. Pourtant, elle a subi une transfusion en 1990 et a contracté le virus de l’hépatite C… Dommage, l’infirmière ne l’apprend qu’après l’AES, et elle ne portait pas de gants.

Des formations à la pratique

Le “non-port” de gants chez les infirmières est suffisamment répandu pour interpeler les futures professionnelles. On rencontre des infirmières qui piquent sans gants et qui tiennent le discours suivant aux étudiants : « Moi je ne mets pas de gants, mais toi tu dois en mettre. » On peut rapprocher cette conduite à un sentiment d’invulnérabilité : « Il ne m’est jamais rien arrivé. » D’emblée, on voit bien que les stagiaires se retrouvent face à des difficultés cruciales, comme « dois-je vraiment mettre des gants ? », « à l’école, ils disent que oui, et l’infirmière dit que c’est important mais elle ne le fait pas, et puis il ne lui est jamais rien arrivé »

Comme Léon Festinger(5) l’a évoqué dans un autre cadre, le stagiaire se trouve dans une situation de dissonance cognitive, il y a un décalage entre ses représentations de ce qu’il faudrait faire – représentations alimentées notamment par ses cours sur le sujet – et ce qui se passe sous ses yeux. Il lui devient alors difficile de tenir la position, et ce, d’autant que la plupart du temps, l’infirmière représente la professionnelle, celle qui connaît le terrain. Les formateurs de l’institut, au contraire, auront tendance à pâtir de leur image de professionnels par trop éloignés de ce même terrain. Le stagiaire est alors tenté de rapprocher sa pratique quotidienne de celle qui lui semble la plus économique. Après tout, le phénomène est connu, il s’apparente à celui que l’on observe avec la conduite automobile : dès que le permis est obtenu, combien de bonnes habitudes semblent s’évanouir dans la nature ?

PRESSION SOCIALE ET DYNAMIQUE DE GROUPE

Travailler en équipe, c’est inévitablement devoir composer avec des règles, des normes, une pression sociale, bref, faire avec la dynamique de groupe. On le voit bien avec l’exemple précédent, être stagiaire oblige à faire avec des messages contradictoires et la tentation d’aller vers les pratiques les moins contraignantes est grande.

Quant aux professionnels en titre, ils doivent au quotidien partager des situations “sociales” au cours desquelles les gens orientent leurs actions en fonction les uns des autres (Max Weber(6)) ou, pour le dire autrement, vivre en société et pas de société sans contrôle social (Peter Berger(7)). Ainsi, des questions de normes et de pression sociale interfèrent sur les pratiques propres à chaque groupe et qui participent de son unité.

Pour les repérer dans une unité de soins, des petites phrases comme « ici, on fait comme ça », « si tu respectes tout ce qu’on te dit, tu n’en finiras jamais » « si tu fais tout dans les règles, on sera obligé de finir ton boulot », etc. La contrainte existe, des règles de conduite organisent la vie quotidienne et, par conséquent, le risque d’exclusion du groupe existe si la norme n’est pas respectée. L’effet stigmatisation pointe son nez et les cancans, dirait Peter Berger(7). Anne Véga(8)(9) le montre aussi, et il n’est pas toujours évident de devoir assumer sa réputation de lenteur, de celui qui freine les autres, de celui qui travaillerait moins bien ou moins vite que les autres, etc.

Pour être concret et revenir à notre préoccupation, si une infirmière porte de manière adaptée ses gants à usage unique et que cela n’est pas repéré par les autres comme un facteur de moindre efficacité, tant mieux. En revanche, dans le cas contraire, elle devrait rapidement sentir la pression de conformité au groupe. Ses collègues s’en chargeront, n’en doutons pas !

Une vie d’équipe, c’est devoir intégrer des normes implicites et s’en écarter n’est pas si simple. C’est pourquoi, bien que certains sachent ce qu’il faudrait faire en termes de “bonnes pratiques”, ils font comme les autres et tendent à s’en écarter. Ce second champ d’explication relève donc du social et, plus précisément, de la dynamique de groupe propre à chaque équipe de travail.

CES SOIGNANTS POUR QUI LE GANT EST UNE SECONDE PEAU

La barrière protectrice

Si certaines infirmières minimisent le risque en ne portant pas de gants pour les prélèvements sanguins ou les injections, on observe parfois le contraire pour des soins de nursing. Lors de l’audit national sur l’hygiène des mains en 2009, les auditeurs ont observé des soignants qui portaient des gants pour l’ensemble de la toilette. La même paire de gants est portée depuis le soin du visage jusqu’à l’habillage ainsi que pendant l’installation du patient et le rangement du matériel.

Plus fréquemment, le port et le changement des gants se fait au détriment de l’hygiène des mains. Les soignants enchaînent les actes et changent de gants sans pratiquer de gestes d’hygiène des mains. D’autres multiplient les paires de gants pour un même acte. Mais de quoi cherchent-ils à se prémunir ?

Anne Véga(8)(9) reprend les propos d’un cadre de santé : « Les infirmières et les aides-soignantes utilisent en permanence des gants pour les toilettes. Elles disent qu’elles ne peuvent pas toucher la bave des malades, ça les dégoûte. Et après, elles peuvent ouvrir des pansements souillés avec des germes dessus à la visite du médecin sans se protéger. Je n’arrive pas à leur faire mettre des gants pendant les soins, lorsqu’elles sont au contact de liquides et de germes contaminés. Il y a des excès des deux côtés : je comprends que les infirmières mettent des gants pour les selles, surtout s’il s’agit de diarrhée, ce n’est pas agréable. Mais ce n’est pas si normal pour la toilette. Ce sont des contacts intimes que le soignant refuse alors qu’il n’y a pas de risque. »

Pour Marie-Annick Delomel(10), multiplier les paires de gants, pour les jeunes professionnels, pourrait être un moyen de faire face à l’angoisse produite par « la confusion des espaces intimes du soignant et du soigné » lors de la toilette. La vue et le contact avec un corps nu, altéré par le vieillissement et la maladie, seraient une source de difficultés que la formation et le dialogue avec les autres professionnels n’abordent pas. Le port de gants pour tout contact serait alors davantage une barrière protectrice pour le bien-être psychique du soignant que contre une improbable transmission virale.

L’approche proxémique (Hall) nous apporte quelques pistes de réflexions. La zone d’intervention des soignants est souvent inférieure à 45 cm des malades. Cette zone est réservée à l’intime, la relation mère-enfant ou la relation amoureuse. Dans cet espace, les échanges sensoriels sont intenses. La vue, l’odorat (odeurs corporelles, haleine) mais aussi le toucher sont sollicités. La main, principal outil de travail du soignant, est aussi l’organe du toucher, de la sensation tactile. Certains auteurs disent que mettre des gants, c’est mettre une distance, une protection contre cette trop grande proximité. Les gants servent à remettre de la distance dans une relation qui serait trop intime, trop “impliquante”. Une barrière contre la pollution ou la contamination par les affects, pour ne pas être “touché” (au sens figuré) ? C’est peut-être aussi une manière de respecter la “bulle” de la personne soignée.

Le contact souillant

Assez curieusement d’ailleurs, on constate que la consommation de gants à usage unique non stériles dans un service de pédiatrie est en moyenne de 4 paires par journée d’hospitalisation contre 15 paires par journée d’hospitalisation en gériatrie. Soit approximativement quatre fois plus élevée. Cette différence illustrerait-elle le fait que l’on appréhende différemment le contact avec l’enfant et avec le vieillard ? Au-delà du risque infectieux ou bactériologique ?

Le contact avec la peau du patient serait un contact souillant, polluant. Céline Amiel(11) s’inspire de Mary Douglas(3) et décrit les soignants comme une sorte de caste, les gens en blancs, bien portants, qui ne se laisseraient pas polluer par les malades, les personnes âgées, les corps abimés. Elle établit comme un parallèle avec la société indienne et ses castes. Les gants serviraient-ils à se protéger d’un contact souillant ou polluant ? Anne Vega(8)(9) explique que certains patients sont rapidement classés comme de mauvais patients, ceux qui sont différents, repoussants, laids, sales, sans domicile fixe, immigrés, mais aussi ceux porteurs de bactéries multirésistantes… Pour ceux-là, le port du gant, est nécessaire à la protection collective, il ne faut pas contaminer les autres patients, mais il ne faut pas non plus contaminer les collègues. La saleté apparaît comme rupture de l’ordre normal du monde. La souillure contamine le corps biologique mais aussi le corps social.

Réminiscence des épidémies

La notion de contagion renvoie aux grandes épidémies meurtrières. Ces épisodes ont marqué l’histoire. Peste, choléra, grippe espagnole ont fait des ravages. La contagion faisait très peur d’autant que la transmission de germes étaient inconnue jusqu’aux travaux de Pasteur (1870). Mais la diffusion et l’intégration de ses découvertes par la population a pris encore quelques années. Depuis le moyen âge jusqu’au début du XIXe siècle, on croyait que les épidémies se transmettaient par l’air et les miasmes pestilentiels. Ces miasmes pouvaient entrer dans le corps par les pores de la peau. Il était donc très dangereux de se laver avec de l’eau chaude qui ramollissait les chairs, ouvraient les pores de la peau laissant la porte ouverte à la contagion. Les excès constatés pour le port de gants aujourd’hui ne seraient-ils pas un résidu de croyances archaïques quant au mode de pénétration des germes dans le corps ? Anne Vega(8)(9) parle des gants comme objets contra-phobiques, contre la peur du sale, du souillé, de l’impur. On met des gants systématiquement pour éviter le contact avec les effluents du corps jugés dangereux (impurs, souillés, contaminés), sang, urines, selles bien sûr mais aussi sueur, salives, larmes. Ce qui est souillant, c’est ce qui sort du corps : tous les effluents, les liquides biologiques. Là, tout le monde est d’accord, il faut se protéger, mais pour ce qui est du contact avec la peau saine…

ENTRE RÉSIGNATION ET OPTIMISME

Ces réflexions autour du port des gants et des relations que nous entretenons avec le propre et le sale ne sont que des tentatives d’explication des comportements humains. Faut-il pour autant être pessimiste et penser que le port des gants ne sera jamais conforme à ce que préconisent les hygiénistes ? Sans doute que non. L’évolution favorable du port des gants observée dans le relevé des AES est un signe encourageant.

Les journées de formation, les actions de sensibilisation au plus près du terrain, les groupes de travail qui réfléchissent au port de gants lors des soins contribuent à améliorer les pratiques. Christophe Dejours(12) écrit : « Les gens ne sont pas des “crétins sociaux”, les actes qu’ils produisent ont un sens. » Il appartient à chacun d’entre nous de réfléchir sur ce sens parfois bien obscur pour entrevoir une possibilité de changement. Et si cette réflexion se fait en équipe, elle n’a que plus de chances d’aboutir. ,

NOTES

(1) Nous nous intéressons ici au port des gans à usage unique non stériles qui sont avant tout un équipement de protection. Leur but est de protéger celui qui les porte.

(2) Ricœur Paul. Philosophie de la volonté, finitude et culpabilité. Editions Montaigne. 1960.

(3) Douglas Mary. De la souillure. Éditions la découverte/ poche. 2001.

(4) Résultat de la surveillance nationale des AES – InVS 2006.

(5) Festinger Léon. A theory of cognitive dissonance. Evanston, IL : Row, Perterson & Company, 1957.

(6) Weber Max. Économie et société. Éditions la découverte/ poche. 2003.

(7) Berger Peter. Comprendre la sociologie. Editions du centurion. Paris. 1973.

(8) Véga Anne. Une ethnologue à l’hôpital, l’ambiguïté du quotidien infirmier. Éditions des archives contemporaines. Paris. 2000.

(9) Véga Anne. Soignants/soignés, pour une approche anthropologique des soins infirmiers. Editions de Boeck université, collection savoir et santé. Paris 2001.

(10) Delomel Marie-Annick. La toilette de la personne âgée, un soin chargé de sens. in : Soins Gérontologie, volume 11, n° 57, février 2006, pp. 19-21. Editions Masson.

(11) Amiel Céline. Usage et mésusage des gants. in : HMH hors-série, avril 2004 pp. 34-38. Editions WKF.

(12) Dejours Christophe. L’évaluation du travail à l’épreuve du réel. Éditions Inra. Paris. 2003.