LE MÉDICAMENT, PAS TOUJOURS AIDANT - L'Infirmière Magazine n° 393 du 01/05/2018 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 393 du 01/05/2018

 

IATROGÉNIE

ACTUALITÉS

FOCUS

Yves Pandelé  

Le Collectif Bon usage du médicament appelle à se mobiliser pour limiter les accidents iatrogènes. Car leur mauvaise utilisation causerait plus de 10 000 décès chaque année.

Les médicaments sont à double tranchant. Leur mauvais emploi serait ainsi responsable de plus de 10 000 morts et 130 000 hospitalisations chaque année. C’est ce qu’a été rappelé par le Collectif Bon usage du médicament lors d’un colloque, le 22 mars. « Les interactions médicamenteuses sont sans doute le sujet le plus important : au-delà de cinq médicaments, on ne sait plus ce qu’on fait, indique Éric Baseilhac, son porte-parole et directeur des affaires économiques des Entreprises du médicament (Leem). Il y aussi la mauvaise observance, très prégnante en cas de maladie chronique. » D’un métabolisme fragile et polymédiqués, les seniors sont souvent en première ligne.

Prodigue en médicaments, peu regardante sur les indications, la France fait figure de mauvaise élève en Europe. Alors qu’un rapport de 2013(1) estime que 45 à 70 % des hospitalisations pour effets indésirables seraient évitables…

Une meilleure formation

Devant ce constat, le Collectif a dévoilé dix préconisations(2) pour promouvoir le bon usage des médicaments. Parmi elles, la formation renforcée des soignants. « Les médecins sont insuffisamment formés, de même que les IDE, qui doivent avoir un rôle actif dans ce domaine », détaille Éric Baseilhac. Les 90 heures de formation en Ifsi peineraient-elles à se traduire sur le terrain ?

« C’est la pratique qui permet d’identifier les effets iatrogènes importants et les médicaments à surveiller », juge Catherine Jochmans-Moraine, secrétaire générale de l’Ordre des infirmiers (membre du collectif). Un tutorat en sortie d’études, assorti d’un développement professionnel continu (DPC) axé sur la iatrogénie, garantiraient, selon elle, une meilleure prévention sur le terrain.

Dur dur de passer à l’acte…

Le risque iatrogène pose aussi un défi de coordination aux acteurs du soin. Afin que les prescripteurs cernent mieux le rôle de proximité des IDE, Catherine Jochmans-Moraine voudrait voir se généraliser les stages interprofessionnels pendant les études.

Autre piste : des réunions de collaboration de proximité, réunissant médecins, pharmaciens et IDE sur un territoire. La mesure, expérimentée dans quatre régions (Grand-Est, Bourgogne-Franche-Comté, Île-de-France, et Auvergne-Rhône-Alpes), s’annonce prometteuse. « C’est efficace car aucun soignant ne peut régler les problèmes individuellement : l’échange d’informations est la clé », estime Éric Baseilhac.

En attendant, le site(3) créé par le Collectif en 2015 (et qui sera ouvert au grand public fin 2018), propose conseils et outils à ceux qui veulent se mobiliser. Quant à la création d’un acte plein de surveillance et d’observation des patients dans la Ngap(4), demandé par les syndicats, elle dépendra de l’issue des négociations conventionnelles, renvoyée à juillet 2018…

1- Dominique Costagliola et Bernard Bégaud, « Rapport sur la surveillance et la promotion du bon usage du médicament en France », 2013. À consulter ici : bit.ly/2E3BQwz

2- À consulter ici : bit.ly/2Gh89Ox

3- Reflexeiatrogenie.com

4- Nomenclature générale des actes professionnels.