Sept vertus pour un métier - L'Infirmière Magazine n° 386 du 01/10/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 386 du 01/10/2017

 

EXPRESSION LIBRE

Élisabeth de Larochelambert  

Ex-directrice d’hôpital, secrétaire générale de l’École des hautes études en santé publique de Rennes (EHESP)

L’envie m’est venue, en prenant mes fonctions de secrétaire générale de l’EHESP, d’assurer, par l’écriture, le passage de relais aux nouvelles générations de manageurs hospitaliers, confrontés aux mêmes réalités, quel que soit leur domaine d’action. Après quarante années d’un parcours qualifiant de directrice d’hôpital, je me sentais légitime, d’une part, pour répondre à leur attente de témoignage sur des situations vécues, d’autre part pour rappeler à chacun que son métier, même s’il évolue et se diversifie, fait appel avec la même constance à des valeurs fortes auxquelles nous sommes tous profondément attachés.

C’est dans un contexte réglementaire, financier, social et technologique en mutation complexe et accélérée, qu’exercent aujourd’hui tous ceux qui se consacrent à la prise en charge des patients, que l’on veut toujours meilleure et performante en termes de qualité et de coût. Écartelés entre des injonctions paradoxales, les manageurs hospitaliers s’efforcent d’assurer un fragile équilibre entre stratégie et fonctionnement quotidien, activité programmée et afflux aux urgences, écoute et décision, qualité des soins et qualité de vie au travail… Nombre d’entre eux décrivent le « stress d’éthique » dont ils souffrent, défini par le professeur Michel Dupuis, philosophe(2), comme le ressenti lié à l’écart entre « ce que je pense devoir faire et la réalité ».

Tels les instrumentistes et choristes autour de leur chef d’orchestre, les professionnels des multiples métiers réunis au sein de nos hôpitaux attendent de leurs manageurs les trois niveaux d’attention résumés dans la formule sportive du grand rugbyman rochelais Arnaud Elissalde : « Le club avant l’équipe, l’équipe avant les individus ». Parfaitement transposables à notre environnement professionnel, ceux-ci supposent une exemplarité que j’ai souhaité résumer en « sept vertus pour un métier » : savoir tenir ses promesses, respecter l’équité dans la gestion de son équipe (à travers les plannings, gardes et astreintes…), faire preuve de loyauté et de respect envers chacun, être réactif et alerter sans alarmer (en particulier face à la survenue d’un événement indésirable grave et au retour d’expérience que l’on partage) et favoriser le développement de l’esprit d’équipe sont les cinq premières, qui permettent d’asseoir la crédibilité et la légitimité de tout manageur, quel que soit le secteur d’activité dans lequel il exerce (et plus encore dans celui de la santé, où la gestion des ressources humaines prend une part essentielle). Mais des sept vertus exigées, deux demeurent fondamentales pour entraîner à ses côtés toute une communauté au service des patients et de leur entourage : donner du sens à son action, et savoir concilier sérieux, optimisme et humour !

1- Auteure de Confessions et convictions d’une directrice d’hôpital, Presses de l’EHESP, Rennes, 2017, 182 p., 16 €.

2- Professeur à l’Université catholique de Louvains.