MAL-ÊTRE DES ESI : L’ÉTUDE QUI DIVISE - L'Infirmière Magazine n° 386 du 01/10/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 386 du 01/10/2017

 

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Adrien Renaud  

Que penser de l’étude publiée par la Fnesi sur la souffrance des étudiants ? Si certains y voient une confirmation de leur diagnostic sur l’état de la profession, d’autres peinent à y reconnaître ce qu’ils vivent au quotidien.

Un enfer. C’est à cela que ressemblent les trois années de formation des étudiants en soins infirmiers… si l’on en croit une étude menée en ligne, de février à avril 2017, par la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (Fnesi), dont les résultats ont été publiés mi-septembre. En recueillant les témoignages de 14 000 étudiants sur des questions liées à leur santé physique, mentale ou financière, la Fnesi a mis en évidence des chiffres chocs (voir encadré) qui ne laissent pas la profession indifférente.

« Cette étude illustre malheureusement les conditions d’exercice difficiles », note Karim Mameri, secrétaire général de l’Ordre national des infirmiers (ONI), qui regrette être « souvent amené à commenter la thématique de la souffrance au travail ». Même son de cloche du côté des libéraux, et notamment de Philippe Tisserand, président de la Fédération nationale des infirmiers (FNI) : « J’aurais espérer que, depuis l’époque où j’étais en formation, on serait sorti du Moyen Âge. Cette étude semble montrer que les choses ne sont pas encore réglées : le manque de considération dont témoignent les étudiants préfigure celui que l’on connaît une fois en exercice. »

Un miroir déformant ?

Mais, au sein de la profession, tout le monde n’est pas prêt à prendre les chiffres de la Fnesi pour argent comptant. « J’ai du mal à imaginer que 40 % des infirmières sont discriminantes ou harcelantes », explique Thierry Amouroux, secrétaire général du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI). S’il reconnaît qu’il peut y avoir quelques individus « déviants », il estime que l’étude de la Fnesi « donne une image de la profession qui n’est pas celle que nous connaissons ». Au Comité d’entente des formations infirmières et cadres (Cefiec), organisme chargé de représenter les Ifsi, on est encore plus direct. Sa présidente, Martine Sommelette, regrette que la Fnesi ait choisi de poser des questions « négatives et pessimistes », et déclare qu’elle aurait préféré une véritable « enquête sociologique » : « Nous sommes au quotidien en présence des étudiants que nous formons, et nous ne pouvons que nous étonner de ces chiffres. »

Toutefois, même ceux qui prennent les chiffres de la Fnesi avec des pincettes s’accordent pour dire qu’il faut consacrer plus de moyens à l’encadrement des stages infirmiers. « Il est vrai que la charge de travail est telle que l’infirmière n’a pas toujours le temps de tutorer correctement les étudiants », reconnaît Thierry Amouroux. « Nous savons que notre système est perfectible, ajoute Martine Sommelette. Certains étudiants sont plus fragiles et peuvent rencontrer des difficultés sur des terrains de stage où l’on travaille en flux tendu, et où l’encadrement n’est pas complètement adapté. » Voilà au moins un point qui fera consensus.

EN CHIFFRES

→ 51 % estiment que leur santé s’est dégradée depuis leur entrée en formation.

→ 78 % se sentent « tout le temps » ou « souvent » stressés.

→ 36 % pensent avoir été victimes de discrimination.

→ 40 % ont subi du harcèlement.

→ 81 % des étudiants de 3e année ont déjà songé à arrêter leur formation.