Des dispositifs médicaux sur ordonnance IDE - L'Infirmière Magazine n° 384 du 01/07/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 384 du 01/07/2017

 

FORMATION

EN PRATIQUE

T. P.  

Pansements, compresses et coton, sets pour plaies, support d’aides à la prévention d’escarres, sondes de nutrition, appareillage pour incontinence urinaire, orthèses… La liste des dispositifs médicaux que les IDE peuvent prescrire est longue.

Depuis le 22 décembre 2006, selon l’article L. 4311-1 du code de la santé publique (CSP) les infirmières peuvent prescrire des dispositifs médicaux inscrits sur une liste fixée par arrêté des ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale. Les articles de pansements représentent 80 % des prescriptions infirmières, qui ont été multipliées par deux entre 2011 et 2013 pour une valeur absolue relativement faible de 90 M€ en 2013(1).

1. INTRODUCTION

Un dispositif médical (DM) est un produit destiné à des fins médicales et qui n’est pas d’origine humaine ni un médicament. Le code de la santé publique le définit par « tout instrument, appareil, équipement, matière, produit […] destiné par le fabricant à être utilisé chez l’homme à des fins médicales et dont l’action principale voulue n’est pas obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme […] » (article L. 5211-1).

Prise en charge des DM

→ Pour être remboursés, les dispositifs médicaux doivent être :

– inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables (LPPR) ;

– prescrits par un professionnel de santé habilité (médecin, chirurgien-dentiste, masseur-kinésithérapeute, infirmière), sur une ordonnance distincte des autres prescriptions.

→ Le taux de prise en charge est fixé à 60 % au régime général ou 100 % en cas d’exonération du ticket modérateur. La LPPR répertorie les produits pris en charge par les caisses d’Assurance maladie et indique le montant et les conditions de leur remboursement. C’est le « tarif LPPR » indiqué sur la vignette du produit. Elle prend également en compte la prestation nécessaire à sa bonne utilisation. Par exemple, l’achat d’un lit médical spécifique bénéficie d’un remboursement forfaitaire de 1 030 euros ; un montant qui prend en compte une garantie d’au moins 5 ans et qui inclut une maintenance annuelle préventive et un remplacement du lit en cas de panne.

Intérêt de la LPPR pour la prescription

Se référer à la LPPR(2) permet à l’infirmière de :

– prescrire « correctement » avec le vocabulaire adéquat. Exemple : l’appellation « pansement absorbant non adhésif » a remplacé « compresses stériles absorbantes non adhérentes » ;

– connaître les limites de la prise en charge : nombre d’unités remboursées, indications donnant droit à la prise en charge, délai de renouvellement ;

– connaître le tarif auquel le dispositif médical est remboursé par les organismes d’assurance maladie (appelé « tarif de responsabilité ») ;

– vérifier s’il existe un prix limite de vente au public (PLV) qui correspond au prix maximum auquel peut être vendu le dispositif médical ;

– pouvoir dire au patient qu’il n’aura pas de supplément à payer de sa poche si le PLV est égal au tarif de responsabilité. Par exemple, pour les pansements actifs, bandelettes pour l’autocontrôle glycémique, matelas anti-escarres… ;

– avertir le patient qu’il peut avoir un supplément à sa charge – et le chiffrer – s’il existe un PLV supérieur au tarif de responsabilité. Par exemple, si un dispositif médical a un tarif de responsabilité de 2 euros et un PLV de 3 euros, le pharmacien ne peut pas demander plus d’un euro de participation au patient. C’est le cas notamment des pansements adhésifs stériles avec compresses imprégnées et des films adhésifs semi-perméables stériles ;

– avertir le patient qu’un supplément peut lui être demandé sans pouvoir en fixer le montant si aucun PLV n’est fixé. Comme pour la boîte de 30 manchons permettant de pratiquer l’irrigation colique ou les articles de compression.

2. DM AUTORISÉS À LA PRESCRIPTION INFIRMIÈRE

La liste des dispositifs médicaux autorisés à la prescription infirmière est toujours fixée par l’arrêté du 20 mars 2012 qui distingue les dispositifs médicaux que les infirmières peuvent prescrire :

– sauf en cas d’indication contraire du médecin ;

– sauf en cas d’indication contraire du médecin et sous réserve d’une information de la part du médecin traitant.

Prescription sauf indication contraire du médecin

→ Des articles pour pansement, par exemple :

– les pansements adhésifs stériles avec compresse intégrée, dans les indications : soins des plaies aigües suturées et des incisions chirurgicales (support textile) ou protection des plaies aigües légèrement hémorragiques et/ou exsudatives (support film) ;

– les compresses stériles non tissées pour le nettoyage des plaies ou de la peau saine en péri-opératoire, confection de pansements en soins post-opératoires et pour les plaies aigües à risque infectieux ;

– les filets et jerseys tubulaires pour le maintien des pansements sur peau fragile.

→ Des cerceaux pour lit de malade : ils sont autorisés à la prescription infirmière pour les patients ayant perdu leur autonomie motrice temporaire ou définitive avec l’indication : protection des membres contre le frottement et le poids des draps.

→ Des dispositifs pour le traitement de l’incontinence et pour l’appareil urogénital, par exemple :

– « étui pénien, joint et raccord », appelé également appareillage pour incontinence urinaire masculine, dans les indications : incontinence urinaire masculine et sondage intermittent. Certains modèles sont munis d’une large bande autocollante (7 à 8 cm) pour une meilleure fixation, notamment en cas d’activités sportives, d’érections réflexes, de transferts de fauteuil fréquents, de forte sudation ;

– « poches de stomie digestive » (poches d’entéro-stomie, poches de colostomie, d’iléostomie…). Dans les systèmes « une pièce », la poche est solidaire d’un support assurant l’adhésivité du système à la peau. Dans les systèmes « deux pièces », la poche vient se fixer sur un support pour poche qui peut rester en place de 24 à 72 heures. Seule la poche est changée tous les jours ou plusieurs fois par jour. Ce qui limite le risque d’érosion cutanée.

Prescription sauf indication contraire du médecin et sous réserve d’une information du médecin traitant

Il s’agit d’une simple information du médecin traitant et non d’une demande de validation des choix de l’infirmière.

→ Des matelas ou surmatelas d’aide à la prévention des escarres en mousse avec découpe en forme de gaufrier. Seuls les matelas de classe IA sont autorisés. Ils sont préconisés pour un risque faible d’escarre en l’absence d’antécédent. À conseiller chez des patients pesant moins de 90 kg avec un score inférieur ou égal à 14 sur l’échelle de Norton validée pour le remboursement des dispositifs médicaux par l’Assurance maladie.

→ Coussin d’aide à la prévention des escarres :

– les coussins à air statique, composés de membranes de polyuréthane médical soudées en réseau et recouverts d’une housse, sont préconisés en l’absence d’escarre chez les patients présentant un risque faible, pouvant changer régulièrement de position et restant assis au fauteuil moins de 10 heures par jour ;

– les coussins en gel, constitués de gel viscoélastique et protégés par une housse, sont préconisés pour les patients présentant un risque de formation d’escarre faible à moyen et pesant entre 40 et 120 kg ;

– les coussins en mousse et gel : il s’agit de coussins mixtes constitués de mousse et incluant un élément en gel viscoélastique et/ou viscofluide. Mêmes indications que les coussins en gel.

→ Les pansements (voir tableau ci-contre).

→ Des sondes naso-entérales pour nutrition entérale à domicile regroupent les sondes naso-gastriques, les sondes naso-duodénale et les sondes naso-jéjunales. Ces sondes se différencient par le lieu d’instillation des nutriments vers le tube digestif. Domaines d’utilisation :

– une sonde naso-gastrique pour une nutrition entérale de courte durée inférieure à un mois ;

– sonde naso-duodénale ou naso-jéjunale si l’instillation des nutriments se fait au-delà du pylore en raison de troubles de la vidange gastrique.

→ Des orthèses élastiques de contention des membres, autorisés dans le cadre d’un renouvellement à l’identique : bas, chaussettes et suppléments associés.

→ Des accessoires pour lecteur de glycémie, par exemple, autorisés dans le cadre d’un renouvellement à l’identique : lancettes, bandelettes d’autosurveillance glycémique, autopiqueurs à usage unique, seringues avec aiguilles pour autotraitement…

S’il n’y a pas de limite du nombre d’unités prises en charge par l’Assurance maladie, il existe cependant des recommandations sur le nombre d’autosurveillances journalières selon le type de patient et de traitement.

1- Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, Cour des comptes, septembre 2015.

2- La base de données LPPR est consultable sur le site de l’Assurance maladie, www.ameli.fr, rubrique « Professionnels de santé ». Cliquez sur « Infirmiers », puis sur « Codage ».

* L’Afet compte plus de 700 infirmières et infirmiers entérostoma-thérapeutes en activité qui ont suivi une formation spécifique et diplômante.

* C. Castel, L. Cochard, C.Gourio, Pharmacie centrale, ChU Caen (Calvados), « Analyse de la pertinence des prescriptions de pansements dispensées en ville », poster présenté aux Journées Europharmat à tours en 2014.

ÉCLAIRAGE

« LE DROIT DE PRESCRIPTION NOUS A SIMPLIFIÉ LA TÂCHE »

Danièle Chaumier Infirmière stomathérapeute à l’Hôpital Tenon (Paris), Présidente de l’Association Française d’Entérostoma-Thérapeutes* (AFET)

Poches, supports de poches, étuis péniens… Les infirmières stomathérapeutes prescrivent des dispositifs médicaux tous les jours. Reste à être bien se former pour choisir le plus adéquat.

Avez-vous l’occasion d’utiliser la prescription infirmière dans votre activité ?

Oui, quasiment tous les jours, car les infirmières stomathérapeutes ont aussi une compétence dans l’incontinence et les plaies complexes.

Les dispositifs médicaux les plus prescrits sont le matériel de stomie comme les poches et les supports de poches, les étuis péniens, et les pansements pour les infirmières qui exercent aussi en plaies et cicatrisation. Les prescriptions se font soit à la sortie du patient, soit lors des consultations externes.

Est-ce que la prescription de dispositifs de stomathérapie présente des difficultés ?

Le droit de prescription nous a simplifié la tâche en nous évitant de chercher un médecin qui signait souvent l’ordonnance que l’on avait préalablement rédigée.

Ce qui est compliqué, c’est le choix du bon dispositif. Chez les patients « sans problème », ce sont les préférences du patient à qui les différents dispositifs ont été présentés qui vont orienter la décision. À l’inverse, dans certains cas d’allergie ou en fonction de la morphologie ou de la peau du patient, le choix peut s’avérer plus difficile. Et dans d’autres cas, pour des patients chez qui plus aucun appareillage ne tient en place, l’hospitalisation est alors inévitable. C’est pourquoi une formation complémentaire est tout à fait recommandée pour prescrire des dispositifs médicaux en stomathérapie.

Que conseiller à une infirmière non formée en stomathérapie qui doit renouveler un dispositif de stomie ?

Le premier conseil est de conserver le type d’appareillage prescrit s’il ne pose pas de problème et si le patient n’en formule pas la demande, et de s’en tenir au choix du prescripteur initial, surtout si ce dernier a une expertise en stomathérapie. C’est parfois un problème avec les infirmières libérales qui prescrivent un autre dispositif parce qu’elles le connaissent mieux. Certains de nos patients reviennent alors en consultation avec un appareillage mal adapté. Si c’est le souhait du patient de changer, il est préférable de garder le même principe d’appareillage et de proposer un autre modèle dans une autre marque. En cas de doute, il est possible de se mettre en rapport avec le prescripteur initial.

Prescriptions de pansements incomplètes et/ou inadaptées

Une étude* menée sur des prescriptions de pansements en ville pointe les erreurs les plus fréquemment commises. L’étude porte sur 95 prescriptions recueillies en 2013 auprès d’officines de la région Ouest et Nord-Ouest, dont 20 % ont été produites par des infirmières.