La rééducation, une urgence pour limiter les séquelles - L'Infirmière Magazine n° 381 du 01/04/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 381 du 01/04/2017

 

FORMATION

PRISE EN CHARGE

Anne-Gaëlle Moulun  

Après un accident vasculaire cérébral, prendre en charge l’enfant en médecine physique et de réadaptation pédiatrique est indispensable pour minimiser les séquelles à long terme et permettre au plus vite le retour à une vie normale.

1. SÉQUELLES MOTRICES

Hémiparésie

Après un AVC néonatal, un tiers des patients conservent une hémiparésie, c’est-à-dire un déficit partiel de la force musculaire touchant la moitié droite ou gauche du corps. Dans l’AVC de l’enfant ou du grand enfant, les séquelles motrices persistent toute la vie dans 50 % des cas. La gravité est variable : le trouble moteur peut prédominer au niveau du membre supérieur ou du membre inférieur, avec parfois des troubles associés notamment dans les domaines du langage, de l’attention, de l’organisation des gestes ou des fonctions exécutives. On peut aussi observer une perturbation du tonus musculaire au repos ou à l’activité avec une éventuelle spasticité (résistance à l’étirement du muscle), voire des syncinésies – ces mouvements involontaires qui s’effectuent dans une partie du corps au moment où ont lieu d’autres mouvements dans une autre partie du corps.

→ Évaluation : pour évaluer l’hémiparésie, on peut utiliser des outils standardisés et reproductibles, qui sont spécifiques aux enfants souffrant de lésions cérébrales, comme le Manual Ability Classification System (MACS). Cette échelle permet de mesurer comment les enfants atteints d’hémiparésie utilisent leur main pour manipuler des objets dans leurs activités quotidiennes (pendant le jeu, l’alimentation, l’habillage…). Elle se décompose en cinq niveaux, basés sur la capacité auto-initiée des enfants à manipuler des objets et leur besoin d’aide ou d’adaptation pour effectuer des activités manuelles dans la vie quotidienne.

→ Rééducation : l’hémiparésie peut toucher un membre supérieur ou inférieur, ou les deux. Cette expression motrice de l’AVC est prise en charge en kinésithérapie. « Contrairement aux pieds, où les deux sont nécessaires pour marcher, l’enfant utilise la main qui fonctionne le mieux et a tendance à oublier la main qui fonctionne moins bien, ce qui fait qu’il reste un peu asymétrique au fil du temps. L’objectif de la rééducation est de réintégrer cette main dans le schéma corporel le plus naturellement possible », explique le Dr Carole Vuillerot, pédiatre, coordinateur SSR pédiatriques de l’Escale, le service de médecine physique et réadaptation pédiatrique des Hospices civils de Lyon. L’enfant a parfois besoin d’une attelle ou de rééducation prolongée en ergothérapie pour stimuler l’utilisation des membres. On peut aussi prescrire l’injection de toxine botulinique dans les muscles trop raides, pour faciliter la rééducation. » (lire l’encadré p. 52)

Kinésithérapie

→ Pendant la période « flasque », celle durant laquelle les muscles ne répondent pas ou peu à la commande nerveuse et où les réflexes ostéotendineux sont abolis, il est facile de mobiliser les membres paralysés qui ne présentent aucune résistance. D’où un risque de lésions musculotendineuses ou articulaires si, par exemple, l’enfant est « tiré » par son bras paralysé des suites de son AVC. Durant cette période, on donne surtout des conseils aux parents ou à l’équipe soignante « pour ne pas provoquer de douleur ou de manœuvres délétères : ne pas tirer sur le bras hémiparétique, ne pas mettre les perfusions de ce côté, etc. », explique Marion Patey, kinésithérapeute sur le secteur de neurologie pédiatrique à l’Hôpital femme mère enfant de Lyon. Des installations sont réalisées pour éviter les déformations orthopédiques. Les enfants sont installés à l’aide de coussins afin qu’ils n’aient pas les hanches en « grenouille », ou alors pour redresser l’avant-pied. « Il est important de garder le membre inférieur dans l’axe. Et si on observe une rétractation, on peut mettre des attelles, détaille Marion Patey. Ces installations favorisent le mouvement. De plus, le positionnement du membre supérieur permet d’éviter la formation d’œdèmes, qui risquent de s’installer en l’absence de mouvement. » Elle insiste notamment sur l’importance de redonner des sensations au jeune patient. « Stimuler les sensations de l’enfant lui permet de travailler la proprioception et de sentir, par exemple, si son coude est plus ou moins fléchi. Il faut notamment éviter que le membre supérieur soit flasque le long du corps et qu’il reste bloqué sous les fesses de l’enfant lorsque celui-ci tente de se tourner sur le côté. Pour cela, nous mettons en place un positionnement avec un coussin, afin que le coude soit fléchi avec la main sur le ventre. C’est un travail de longue haleine à expliquer aux équipes soignantes, pour que tout le monde sache comment positionner l’enfant », souligne la kinésithérapeute (lire le témoignage p. 48).

→ Concernant la rééducation en elle-même, celle-ci vise à se rapprocher d’un développement normal de l’enfant du même âge. « Il existe des grandes étapes dans le développement de l’enfant et la rééducation les respecte : si l’enfant doit s’asseoir, nous le positionnons comme s’assoit un enfant de son âge, insiste Françoise Girardot, cadre de santé rééducation du service l’Escale. Dans nos stimulations de positionnement ou de mouvement, nous essayons de nous rapprocher au maximum de ce schéma moteur de l’enfant normal du même âge. Dans le cas de l’AVC, nous travaillons les schémas moteurs antérieurement acquis par l’enfant. Cette rééducation est différente de celle de l’enfant handicapé que nous amenons à découvrir et à explorer des mouvements et des postures encore inconnus de son corps. »

À l’hôpital, les kinésithérapeutes utilisent beaucoup le schéma normal de la maturation de l’enfant comme base de travail. « Si nous prenons en charge des bébés par exemple, nous nous basons sur ce qu’ils savaient faire avant l’AVC. Le but est de récupérer l’état antérieur, sachant que ces niveaux d’évolution motrice sont des schémas globaux. Par exemple : quand l’enfant couché sur le dos veut se tourner sur le ventre, il tend le bras du côté où il veut tourner pour arriver à transférer du poids. Nous travaillons beaucoup ces phases de transfert de poids lors de nos stimulations motrices. Il a été prouvé que la stimulation précoce après AVC favorise la récupération », détaille Françoise Girardot. « On peut aussi retirer des appuis à un endroit pour essayer de provoquer du mouvement. Ce travail de stimulation motrice est complété par les installations. Par exemple : si on surélève la partie anté-brachiale du membre supérieur, l’enfant voit sa main, ce qui encourage les mouvements », développe la cadre. Enfin, une fois que l’enfant commence à récupérer, un appareillage peut être mis en place pour faciliter sa récupération motrice.

Dans les suites d’un AVC, les enfants vont souvent récupérer une grande partie de leurs capacités globales. « C’est plus la motricité fine, la coordination des mouvements qui sera difficile et plus lente à retrouver », détaille Françoise Girardot.

Ergothérapie

L’ergothérapeute intervient précocement au lit du malade pour encourager les activités bimanuelles, et ce, afin de favoriser la récupération d’un membre supérieur parétique et veiller à l’absence d’installation de déformations orthopédiques précoces. « Le travail majeur au départ, c’est de faire exister le côté atteint, par des sollicitations tactiles et proprioceptives, explique Édith Luc-Pupat, ergothérapeute à l’Escale. Lors des soins de nursing, il est ainsi important de faire exister le bras d’emblée et que les personnes qui viennent voir l’enfant lui prennent la main, la lui touchent ou la caressent et que ce dernier soit acteur. Les parents doivent être impliqués précocement dans cette démarche. Ce qui est délicat, c’est d’inciter le parent à formuler des rappels bienveillants à l’enfant, sur l’utilisation de son bras par exemple, tout en restant dans sa position de parent et sans devenir un soignant pour autant. Quand un enfant oublie son bras sous la table, le parent doit se souvenir que ce n’est pas de sa faute s’il oublie ! Il ne faut pas que l’enfant sente ces rappels comme un reproche. C’est lui qui doit, de lui-même, avoir envie de tenir son assiette, sa feuille pour dessiner. » Car spontanément, l’enfant va se latéraliser du côté le moins atteint. Il faut donc trouver une fonction à ce membre atteint, de main « assistante » et de main qui va aider à la fonction. « On n’est pas obligé de se servir de cette main, on peut faire sans. Il faut donc souvent passer par une phase de rééducation unimanuelle. Le but est de retrouver les automatismes de mise en jeu du bras et de la main et une certaine vitesse de réaction du bras. »

Au départ, la rééducation doit porter sur des choses simples : poser, tenir, stabiliser. « Au bout d’une semaine on peut déjà solliciter des mouvements actifs, note Édith Luc-Pupat. On peut demander à l’enfant d’essayer de tenir son yaourt, ou utiliser le jeu, par exemple tenir Monsieur Patate pendant qu’on l’habille. Le simple geste d’ouvrir la main, c’est déjà de la rééducation. » Ensuite, la rééducation s’effectue par des mouvements d’approche au niveau de l’épaule, du coude, ou du poignet. L’ergothérapeute peut donner des conseils aux parents pour le choix et l’apprentissage d’aides techniques de vie quotidienne qui peuvent faciliter l’usage de la main ou la compenser si nécessaire. Édith Luc-Pupat a notamment participé à la rédaction d’une brochure(1) destinée aux parents, afin de leur expliquer comment se placer et placer l’enfant, comment le stimuler grâce à des sollicitations tactiles, lui apprendre des manœuvres de mobilisation et d’étirement pour détendre les muscles et faciliter l’habillage/déshabillage, mais aussi comment utiliser le côté atteint de façon isolée ou encore comment utiliser les deux mains ensembles. « Dans la toilette ou l’habillage, il faut que ce corps atteint soir bien cocooné, massé, palpé, mobilisé », insiste l’ergothérapeute.

Troubles de la déglutition

Un AVC peut provoquer des troubles de la déglutition avec des fausses routes possibles.

→ Évaluation : l’orthophoniste évalue si une reprise de l’alimentation est possible. Il convient alors de vérifier le réflexe de déglutition et l’absence de retard dans le déclenchement de ce réflexe. « Nous vérifions s’il y a des fausses routes, principalement avec des liquides, en observant s’il y a de la toux quand le bébé tête ou quand l’enfant mange. On peut également repérer au niveau de son larynx avec un stéthoscope, si la voix est “mouillée”. En cas de doute, il est possible de lui faire passer un radio-cinéma de la déglutition : on fait alors avaler à l’enfant un liquide baryté qui permet d’observer à la radio ce qui se passe dans le pharynx et le larynx quand il déglutit », explique Édith Fréry.

→ Prise en charge : une prise en charge précoce des troubles de la déglutition est nécessaire ainsi qu’une prise en charge régulière pour la communication. Elle est mise en place après un bilan et le suivi à long terme peut durer plusieurs années. « En fonction des résultats de l’évaluation, on adapte la posture. En effet, si la tête est en extension cela favorise les fausses routes, alors que si l’on fait rentrer le menton de l’enfant, cela protège davantage les voies aériennes supérieures par recul de la base de langue », détaille Édith Fréry. Et si cela ne suffit pas, il est possible d’épaissir les liquides (avec de la bouillie pour bébé, de la compote ou un épaississant type magimix). « En général, dans les trois mois post-AVC, la déglutition revient à la normale », souligne-t-elle.

2. SÉQUELLES COGNITIVES

Les séquelles cognitives peuvent comprendre des troubles du langage, des troubles praxiques, des atteintes exécutives ou des atteintes visiospatiales.

Atteintes visiospatiales

L’enfant peut avoir des héminégligences corporelles, avec une perte de conscience de la moitié du corps atteinte et des héminégligences visuelles : il ne voit pas les jeux à gauche de la table par exemple. En se plaçant du côté atteint, l’adulte peut inciter l’enfant à aller explorer de ce côté. « Il faut faire attention au regard et inciter l’enfant à regarder du côté atteint, insiste Édith Luc-Pupat. Il peut aussi avoir des problèmes de champ visuel. »

Troubles du langage

L’aphasie est un trouble fréquent. Il désigne la perte partielle ou totale de la faculté de s’exprimer et de comprendre le langage écrit ou parlé, à la suite d’une lésion cérébrale. « Si l’enfant récupère au niveau de la motricité, il va récupérer durablement au niveau du langage, note le Dr Carole Vuillerot. Néanmoins, même si on a l’impression qu’il récupère, on pourra se rendre compte plusieurs années après que cet enfant a des troubles du langage complexes, qui ont des conséquences sur son apprentissage. Les évaluations de langage montrent que même s’ils se débrouillent bien dans la vie, quasiment tous les enfants ayant eu un AVC ont des troubles du langage complexe. »

→ Évaluation : Un bilan orthophonique est systématiquement réalisé, et ce, dès que l’enfant est stable. Effectué à l’aide de tests, il permet de déceler le type de trouble dont souffre l’enfant et de savoir si la compréhension a été touchée. « Chez le tout-petit jusqu’à 3 ans ou de 2 à 6 ans, il existe le test Evalo et chez l’enfant de 4 à 8 ans, le test N-eel », précise Edith Fréry, orthophoniste libérale à Saint-Genest-Lerpt (42).

• Le test Évalo 2-6 propose un éventail de 32 épreuves de base et de 15 épreuves complémentaires regroupées en 13 domaines.

• Le test N-eel (Nouvelle épreuve pour l’examen du langage) est composé, lui, de 16 épreuves différentes permettant de faire un bilan exhaustif des constituants formels du langage (phonologiques, lexicaux, morpho-syntaxiques) sur les deux versants réceptifs et expressifs.

• Il existe aussi le test ELO (Evaluation du langage oral), de Khomsi, qui comprend 6 épreuves et permet un bilan de langage oral complet. Il est destiné à décrire et évaluer, de façon fine, diverses composantes de la compétence orale et donc évaluer aussi le « risque » lecture.

• À l’hôpital Bicêtre, à Paris (AP-HP), une échelle de langage, baptisée Last (LAnguage Screening Test) a été créée par Constance Flamand-Roze, orthophoniste, et Christian Denier, praticien hospitalier dans le service de neurologie. Celle-ci permet d’identifier, en seulement deux minutes et de façon fiable, les troubles phasiques causés par l’accident vasculaire cérébal en phase aiguë. Pour cela, une orthophoniste, une infirmière ou un médecin propose un questionnaire composé de 15 items au patient. Ce dernier doit par exemple désigner l’image correspondant au mot « lapin », nommer un téléphone dessiné, compter de 1 à 10, répéter une phrase, mettre une main sur la tête, etc. « S’il obtient un score inférieur à 15, le patient a potentiellement un trouble du langage ; les orthophonistes pratiquent alors les tests complémentaires nécessaires », explique Constance Flamand-Roze.

→ Prise en charge : chez l’enfant, le langage est en construction, donc il faut commencer la prise en charge très vite, le plus tôt possible après l’AVC. « Dans la semaine qui suit, dès que l’enfant est stable sur le plan médical », estime Édith Fréry.

Les troubles du langage peuvent toucher tous les niveaux. « Il peut y avoir un “manque du mot”, comme si on avait un mot sur le bout de la langue. Dans ces cas-là, le travail s’effectue en utilisant des automatismes, par exemple les chansons connues de l’enfant, ou encore les jours de la semaine ou le compte », explique-t-elle. Le trouble peut aussi se situer au niveau de la phrase, avec des patients qui se mettent à parler en style télégraphique.

Pour les enfants qui ne trouvent pas leur mots, il existe des carnets de communication leur permettant de montrer des pictogrammes pour exprimer leurs besoins. « Nous utilisons beaucoup la désignation d’image et la dénomination d’images pour réactiver toutes les images des mots que l’enfant a dans la tête. » Les orthophonistes ont aussi beaucoup recours aux comptines pour travailler le langage. « Les comptines apprises par cœur reviennent de manière automatique », note l’orthophoniste. Un travail est également réalisé sur la motricité bucco-faciale. « On fait faire des bulles à l’enfant, éteindre une allumette ou une bougie », explique Édith Fréry. Enfin, « la prise en charge inclut aussi les parents. Ils sont souvent très inquiets et nous leur expliquons comment on va travailler, comment le trouble peut évoluer, etc. »

Pour conclure, le Dr Vuillerot rappelle toute la nécessité d’informer les parents sur le suivi au long cours de leur enfant. « En effet, même si l’enfant récupère, il ne faut pas oublier cet AVC. Les séquelles apparaissent parfois quand la demande environnementale augmente. Par exemple, des difficultés de vision dans l’espace ou d’abstraction peuvent survenir au fil du temps. Les enfants récupèrent mieux que les adultes, du fait de leur plasticité cérébrale supérieure, mais un adulte fait un AVC à 70 ans en moyenne et il a donc a 20 ans à vivre avec ! Les enfants, eux, commencent leur vie avec ça et doivent vivre longtemps avec. Et ce n’est pas parce que c’est un enfant qu’il va tout récupérer… », conclut-elle.

1- « Comment solliciter le membre supérieur d’un jeune enfant atteint d’hémiplégie cérébrale ? » Myriam Collet et Édith Luc-Pupat. Brochure éditée par le réseau R4P.//bit.ly/2mmMEi0

ÉCLAIRAGE : DR CAROLE VUILLEROT PÉDIATRE, COORDINATEUR SSR PÉDIATRIQUES DE L’ESCALE, LE SERVICE DE MÉDECINE PHYSIQUE ET RÉADAPTATION PÉDIATRIQUE DES HOSPICES CIVILS DE LYON

« LE PROGRAMME DE RÉÉDUCATION DOIT ÊTRE ÉTABLI AVEC LA FAMILLE »

S’il peut y avoir des interventions rééducatives précoces, le Dr Carole Vuillerot nous explique pourquoi il est important de proposer un entretien « au lit du malade » entre l’enfant, sa famille et un médecin spécialisé en médecine physique et de réadaptation (MPR).

Comment est introduite la rééducation après un AVC ?

Après un AVC, chez l’adulte comme chez l’enfant, il y a une phase pour la prise en charge médicale aiguë qu’il faut respecter. Les enfants se présentent aux urgences, le diagnostic est posé, puis ils sont pris en charge rapidement en fonction de leur état médical et des indications éventuelles par différents services en particulier la réanimation pédiatrique et la neurologie pédiatrique. Il peut y avoir des interventions rééducatives précoces, mais rarement avant un délai de 48 h après l’hospitalisation. Ce qui est important, c’est de proposer un entretien précoce entre l’enfant, sa famille et un médecin spécialisé en médecine physique et de réadaptation (MPR). Il faut qu’il ait lieu au lit du malade, il ne faut pas que l’enfant soit déjà sorti de l’hôpital. Le médecin doit ainsi faire le point avec la famille sur les conséquences de l’AVC sur la motricité et la cognition de l’enfant, ses possibilités de récupération, ainsi que sur les différentes formes de prises en charge rééducatives et sociales.

La rééducation post-AVC présente-t-elle des spécificités ?

Non, elle est plutôt spécifique aux séquelles que l’AVC engendre. En MPR pédiatrique comme dans tous les domaines de la MPR, l’étiologie du trouble n’est souvent pas la priorité, l’objectif de la prise en charge est plus axé sur la limitation d’activité ou la restriction de participation qui en découle. L’intensité doit être adaptée à la fatigabilité du patient, à son état de conscience, à son état médical et à sa compliance. Les enfants qui présentent une importante asthénie ne tolèrent pas la rééducation intensive et l’hôpital n’a d’ailleurs pas forcément les moyens de le faire non plus. Au-delà d’une fois par jour, on a du mal à proposer de la rééducation intensive. Le programme de rééducation doit être établi avec la famille et les thérapeutes, en fixant des objectifs. En pratique, la rééducation la plus précoce mise en place est souvent kinésithérapique pour remettre « sur ses pieds » cet enfant, qui a parfois perdu la capacité de marcher et/ou de se mettre debout. C’est souvent assez rapide et l’enfant sort de l’hôpital sur ses deux jambes. La rééducation orthophonique permet elle aussi une récupération rapide lorsque l’enfant souffre d’aphasie. Il est très rare que les enfants soient totalement aphasiques et le restent sur de longues périodes contrairement à l’adulte. Ils récupèrent d’apparence très bien la plupart du temps. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas de séquelles durables au niveau du langage complexe. La prise en charge en psychomotricité a, dès la phase précoce, un intérêt pour permettre de travailler avec l’enfant sur la réintégration dans son schéma corporel de l’hémicorps parétique et sur la négligence parfois associée.

PROPOS RECUEILLIS PAR A.-G. M.

TÉMOIGNAGE : CHRISTINE BOURGEOIS INFIRMIÈRE PUÉRICULTRICE, SERVICE DE NEUROPÉDIATRIE ET NÉPHROLOGIE, HÔPITAL FEMME MÈRE ENFANT DE LYON

« Enfant, parents et IDE, un trio pour la prise en charge »

Lorsqu’un enfant fait un AVC, nous réalisons un bilan sur prescription médicale pour essayer de trouver les causes de l’AVC : bilan sanguin, radios, échographie du cœur, etc. En fonction des résultats, on fait ensuite une recherche plus poussée. Ce bilan d’entrée sert ensuite pour la prise en charge et les soins quotidiens. Selon la gravité des séquelles, l’entretien d’accueil effectué quand l’enfant arrive nous permet d’avoir des données pour la prise en charge quotidienne et l’aide que nous pouvons apporter aux parents. À la différence de l’AVC chez l’adulte, les parents sont présents et restent souvent dormir ici, donc nous formons un trio avec eux et l’enfant pour la prise en charge. Il s’agit, par exemple, si l’enfant souffre d’une hémiparésie d’adapter le matériel. Nous avons des chariots de douche et une baignoire allongée bien pratique pour les handicaps de ce type. Pour la nourriture, on demande si l’enfant arrive à manger, s’il doit manger mixé, etc. Après la prise en charge aiguë, nous veillons également à bien positionner l’enfant dans son lit. Nous avons beaucoup de matériel, par exemple des coussins en mousse modulables, que nous pouvons positionner dans le lit pour changer l’enfant de position, car il faut qu’il bouge. Nous disposons aussi de matelas à air pour limiter les risques d’escarres. Notre rôle est également de veiller à la prévention des escarres avec des méthodes d’effleurage et des huiles de soins. Par ailleurs, on réalise une échelle de la douleur lorsque l’on accueille l’enfant. On associe les parents en leur demandant comment ils trouvent l’enfant, s’il n’est pas comme d’habitude, par exemple. La durée de la phase aigüe est très variable en fonction des cas. Certains enfants récupèrent très rapidement, d’autres moins vite. Après l’hôpital, ils sont pris en charge par d’autres établissements qui proposent de la rééducation, ou en libéral.