Tous ensemble - L'Infirmière Magazine n° 380 du 01/03/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 380 du 01/03/2017

 

PRADER-WILLI

DOSSIER

C. C.-C.  

Le syndrome de Prader-Willi est une maladie rare. L’association qui lui est dédiée a construit, en collaboration avec les professionnels de santé, un modèle de prise en charge. Récit de cet engagement.

Sous le soleil du pays basque, à Hendaye (64), l’AP-HP dispose d’un établissement d’exception, dédié aux polyhandicapés lourds et aux troubles autistiques et envahissants du développement. 36 lits y sont consacrés à la prise en charge d’une maladie génétique rare, le syndrome de Prader-Willi, qui touche « environ 40 nouveau-nés par an, en tout 1 200 personnes en France », indique François Besnier, le président de l’association Prader-Willi France.

À la naissance, les enfants souffrent d’une hypotonie sévère entraînant des difficultés à s’alimenter. Mais à partir de deux ans, au contraire, ils sont très attirés par la nourriture et n’ont plus de sentiment de satiété. En l’absence d’un régime alimentaire strict, ils développent une obésité massive. Ils souffrent aussi de sévères troubles cognitifs et du comportement « En 1999, la direction médicale de l’AP-HP nous a demandé de répondre au désarroi des familles et de ces patients, qui ne trouvaient aucune structure pour les accueillir, raconte Denise Thuilleaux, psychiatre et chef du pôle maladies rares et troubles envahissants du développement à Hendaye. Nous ne savions presque rien de cette maladie complexe. » 18 ans plus tard, l’équipe pluriprofessionnelle est devenue experte de ce syndrome, en association étroite avec l’association de familles Prader-Willi France. « Car les familles ont une connaissance clinique du syndrome, du vécu quotidien, de la gravité des troubles du comportement », poursuit la psychiatre.

Une guide des bonnes pratiques

L’hôpital d’Hendaye offre une prise en charge séquentielle, une à deux fois par an sur une période de un à trois mois. « C’est une offre de répit pour les familles ou pour les établissements médico-sociaux qui les accueillent, explique François Besnier, lui même père d’un malade. C’est aussi un lieu où les malades se retrouvent entre eux, alors que le reste du temps ils sont seuls au monde. » À leur arrivée à Hendaye, tous les patients doivent réaliser un « bilan d’entrée », détaillé par l’infirmière Johanna Lingrand : « L’ensemble de l’équipe pluridisciplinaire y participe : psychiatre, IDE, AS, ergothérapeute, etc. On établit avec le patient, qui est acteur de sa prise en charge, un projet qui comprend des objectifs sur la perte de poids, les troubles du comportement, les traitements, etc. Nous sommes aussi en lien constant avec l’établissement d’accueil ou la famille, qui nous parlent des limites de la prise en soins. Leur vision est indispensable. »

Les bonnes pratiques ont été réunies au sein d’un guide (1), élaboré dans le cadre d’un appel à projets de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Pour Johanna Lingrand, qui a participé à sa rédaction, « c’est un travail de longue haleine, qui a associé familles et professionnels ». Sur une série de thématiques – alimentation, habitudes et rituels, etc. – le guide présente, d’une manière pédagogique, l’état des connaissances, des savoir-faire et quelques témoignages. « C’est une référence pour tous : familles, professionnels du sanitaire et du médico-social », se félicite François Besnier. Des projets de recherche sont également développés sur de nouveaux traitements ou une meilleure prise en charge cognitive, et l’association participe à leur financement. « Nous nous appuyons sur les cotisations de nos membres et de dons collectés à l’occasion d’évènements, comme des marches ou des tombolas », explique le président de l’association. « Nous avons la chance de pouvoir travailler avec des équipes très ouvertes, poursuit François Besnier. Mais nous ne voulons pas nous substituer à elles. Nous jouons aussi un rôle de médiateurs avec des familles qui sont parfois dans de telles situations de souffrance, que leur demande est presque un cri. Nous essayons d’aller au-delà de l’émotion, de trouver la juste distance pour mettre en place le bon dispositif d’aide. »