LA MINISTRE DÉÇOIT - L'Infirmière Magazine n° 378 du 01/01/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 378 du 01/01/2017

 

QUALITÉ DE VIE AU TRAVAIL

ACTUALITÉS

FOCUS

Caroline Coq-Chodorge  

Pour répondre au malaise infirmier, Marisol Touraine a dévoilé sa stratégie pour améliorer la qualité de vie au travail. Un plan dénoncé quasi unanimement par les syndicats.

Prendre soin des soignants » : c’est avec ce slogan que la ministre de la Santé a lancé, le 5 décembre, sa « stratégie nationale d’amélioration de la qualité de vie au travail ». Elle tentait ainsi de répondre à l’émotion soulevée par la série de suicides qui a touché le monde infirmier cet été, et à sa forte mobilisation le 8 novembre dernier. Mais l’accueil des syndicats a été glacial. Comme FO et Sud, la CGT n’a même pas répondu à l’invitation de la ministre : « Elle entendait clôturer une soi-disant concertation à laquelle nous n’avons même pas été associés », explique Philippe Crepel, porte-parole de la fédération santé. Pour FO, « la ministre nous demande aujourd’hui d’accompagner les conséquences de sa politique ». Seule la CFDT se félicite « de ce schéma national qui reprend en grande partie les propositions que nous avions faites au ministère dès 2011 ».

Mesures tous azimuts

Marisol Touraine a présenté une stratégie en 10 engagements. Sera mis sur pied un « observatoire national de la qualité de vie au travail et des risques psychosociaux des professionnels de santé ». Des médiateurs seront nommés pour régler les conflits dans les établissements : pour les personnels non médicaux, ce seront des cadres supérieurs. Mais il sera aussi possible de faire appel à un médiateur régional – médecin, directeur ou soignant volontaire. Et un médiateur national coordonnera ce réseau régional. Les formations initiales et continues vont intégrer de nouveaux modules sur la qualité de vie au travail. Les managers seront, eux, plus spécifiquement formés à « la gestion et l’animation d’équipes » et à « la résolution de conflits et la conduite de projets ». 30 millions d’euros seront investis sur trois ans pour « revaloriser la médecine du travail et généraliser les services pluriprofessionnels de santé au travail ». Un « cycle de concertations » doit être lancé afin de « mieux valoriser » les contraintes de travail liées à la continuité des soins. La stratégie prévoit encore de mieux synchroniser « les organisations de travail médicales et paramédicales », ou encore de redonner « de la stabilité et de la visibilité en matière de planning ».

Incohérences

Martine Sommelette, la présidente du Comité d’entente des formations infirmières et cadres (Cefiec), est « profondément déçue. Nous essayons d’expliquer que les soignants, dans les hôpitaux, croulent sous le travail, sont en souffrance, en manque de reconnaissance. Et on va mettre en place un observatoire ? On va aider les cadres à mieux gérer la crise ? Il y a un refus de regarder la réalité en face… ». Nathalie Depoire, la présidente de la Coordination nationale infirmière (CNI), est sur la même ligne : « Il y a un problème de cohérence. On annonce un renforcement de la formation, mais on ponctionne les crédits de l’Agence nationale de formation hospitalière. » Le Syndicat national des infirmiers anesthésistes (Snia) est plus virulent encore : « C’est du blabla ! Pour diminuer la pénibilité, il faut embaucher, fixer des ratios minimums de soignants ! » s’emporte Simon Taland, son secrétaire général. « Nous allons remobiliser en janvier, assure Nathalie Depoire. Reste à trouver une date. »