Le temps qui passe - L'Infirmière Magazine n° 375 du 01/10/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 375 du 01/10/2016

 

CRITIQUE

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GUY CHATAP  

→ Chromolithographie du XIXe siècle, le « degré des âges » représente l’évolution de la nature humaine à divers âges. De la naissance à la mort, les personnages montent puis descendent un escalier pyramidal à neuf marches, vieillissant progressivement par tranches de 10 ans. La 1e partie, ascendante, culmine à la cinquantaine, la 2e, descendante, finit à 100 ans. Convoquant ces images d’Épinal, l’auteure définit la vie comme un cycle menant à la mort, via un retour à l’âge de l’enfance. Un cycle jalonné d’étapes que l’homme doit franchiR. Les passages d’une étape à l’autre sont des moments particuliers, que Charlotte Herfray appelle « crises », marqués par des mutations diverses. Ces « ruptures » sont longtemps essentiellement qualitatives : changement de classe d’âge, modification de la taille ou du timbre vocal, apparition de rides, altération des capacités physiques et psychiques. Après avoir ainsi défini le vieillissement de manière fine et parfois avec humour, l’auteure en livre une interprétation psychanalytique. Cette étape est décrite comme un autre temps de la vie dont la fin est inéluctable et irréversible, ce temps comportant lui-même des « crises » qui ne sont plus seulement de type narcissique, mais aussi subjectif. Le vieillard se désintéresse de l’image insupportable de son corps usé qu’il ne reconnaît plus, voire qu’il maltraite ou au contraire exploite par ce que des psychanalystes nomment « pulsions », qui entraînent vers certains désirs : orale avec la recherche du plaisir par la bouche, anale par l’incontinence, génitale pouvant pousser au désir sexuel. La vieillesse est un temps de renoncement, de déplaisir et de frustration que l’individu va compenser par des régressions et certains investissements autoérotiques, dans un retour à la petite enfance. Cet ouvrage est écrit dans un vocabulaire accessible et illustré d’anecdotes. Toutefois, bien que séduisante, cette approche psychanalytique du vieillissement pourrait être contestée par les neuroscientifiques, car souvent généraliste et faisant fi des corrections qu’il est possible d’apporter par des prises en charges appropriées, la rééducation ou certaines thérapies cognitivo-comportementales. La vieillesse en analyse, Charlotte Herfray, éd. Érès, 13 €