CONTRECARRER L’INFLUENCE DE L’INDUSTRIE - L'Infirmière Magazine n° 365 du 01/11/2015 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 365 du 01/11/2015

 

BONNE CONDUITE

DOSSIER

Il existe, au quotidien, des moyens simples et des attitudes permettant aux infirmières d’exercer leur regard critique afin d’avoir du répondant face à la parole des laboratoires. Revue de détails.

En premier lieu, il faut être conscient de ces tentatives d’influence et apprendre à développer un regard critique sur tout ce qui nous est présenté », note Nathalie Dallard, infirmière aux urgences d’Aubenas (07) et administratrice au Formindep. L’infirmière a commencé à se poser de sérieuses questions après le décès par hémorragie massive de sa mère, sous anticoagulants oraux, avant que les nouvelles molécules qu’on lui avaient prescrites soient placées sous surveillance renforcée par l’Agence nationale de sécurité du médicament. « J’ai fait des recherches et je me suis demandé pourquoi on avait pu prescrire ce médicament qui n’était recommandé qu’en deuxième intention. »

La professionnelle réalise alors qu’elle n’a jamais appris à connaître le circuit du médicament, ce qui régit sa mise sur le marché, etc. « Donc la deuxième recommandation que je formulerais, c’est de toujours chercher à s’informer et de manière indépendante des laboratoires pharmaceutiques », ajoute-t-elle.

L’IDE, une sentinelle

Depuis qu’elle s’est engagée auprès du Formindep, l’IDE a également tenté d’influer sur les pratiques de son service : « Nous pouvons inciter les internes à aller lire les recommandations de la HAS, au lieu de prescrire uniquement en suivant l’exemple du médecin, nous pouvons interpeler nous mêmes les visiteurs médicaux lorsqu’ils présentent des produits qui n’apportent rien de neuf à l’arsenal thérapeutique. » Surtout, l’infirmière est à même d’ouvrir la discussion avec le médecin sur les prescriptions qu’il formule si quelque chose l’alerte. « Aucune IDE ne devrait se contenter d’être dans l’exécution d’une prescription, insiste Gisèle Hoarau, cadre de pôle en hématologie (Pitié-Salpétrière) et présidente de l’Afitch-OR(1). Précisément, c’est aussi parce qu’elle ne prescrit pas à l’hôpital qu’elle est dans une forme de liberté à l’égard des industriels et qu’elle peut se permettre de questionner le médecin. »

Enfin, l’observation clinique particulière à l’infirmière doit également être l’occasion de prendre pleinement sa place dans la déclaration des effets indésirables auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). « L’infirmière est au plus près du patient, c’est elle qui observe ces effets indésirables, explique Nathalie Dallard. Trop souvent, elle ne les déclare qu’au médecin qui peut ne pas donner suite… Alors que nous pouvons contribuer à remplir les formulaires auprès de l’ANSM qui éviteront à des produits dangereux de demeurer sur le marché. »

1- Association française des infirmières de thérapie cellulaire, hématologie, oncologie et radiothérapie.