Prise en charge infirmière - L'Infirmière Magazine n° 361 du 01/06/2015 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 361 du 01/06/2015

 

FORMATION

LA PATHOLOGIE

Ibode, infirmière anesthésiste ou de soins de suite, elles sont nombreuses à s’occuper des patients souffrant d’une fracture bimalléolaire. Leur fonction s’étend même à l’immobilisation de la cheville en délégation de tâche.

Au service des urgences, une infirmière accueille le patient. Elle lui applique un pansement en cas de fracture ouverte. Elle vérifie s’il est à jour dans sa vaccination anti-tétanique. Elle peut réaliser l’immobilisation temporaire de sa cheville en délégation de tâche (voir encadré ci-contre). Elle installe le patient en salle d’examen ; si nécessaire, elle pose une voie veineuse pour l’antalgie.

La prise en charge est ensuite assez similaire que le traitement de la fracture soit orthopédique ou chirurgical ; la chirurgie avec pose de matériel d’ostéosynthèse étant le traitement le plus courant.

Avant l’opération

→ Préparation du matériel : avant que le patient ne soit opéré, l’Ibode consulte le chirurgien orthopédiste pour savoir quel matériel d’ostéosynthèse il va poser. Cela lui permet de préparer ce matériel en vérifiant l’intégrité des emballages et les dates de péremption dans un souci de traçabilité. Le « pack » de base comprend un champ stérile en non tissé, des casaques, des gants, des compresses, des champs blancs, différents types de polyvidone iodée (Bétadine) – moussante, dermique, alcoolique –, un garrot électro- pneumatique, un générateur à hautes fréquences (bistouri électrique) pour l’hémostase, le matériel d’ostéosynthèse (fil, vis, plaques, broches…), un kit ancillaire adéquat (pour le poser), un moteur (perceuse)… Le chariot de plâtre comprend du jersey, des bandes de coton, du plâtre et une bassine d’eau.

→ L’Ibode accueille le patient quand il arrive au bloc opératoire. Elle lui pose toutes les questions d’usage. L’infirmière anesthésiste est présente pour écouter aussi les réponses du patient. Les rôles peuvent aussi être inversés entre l’Ibode et l’infirmière anesthésiste dans ce jeu de questions-réponses. Au menu de cet entretien : nom, prénom, date de naissance, le type d’opération et de quel côté, est-ce que le patient est bien à jeun, s’il a des allergies, des prothèses, des lentilles, des piercings, des bijoux, et même dans certains cas un téléphone portable sur lui… L’Ibode pose un garrot électropneumatique à la racine de la cuisse. Elle dépile la zone à opérer (éventuellement au-delà) avec une tondeuse. Elle lave la jambe du patient avec de la polyvidone iodée (Bétadine) moussante et rince au sérum physiologique. Elle appelle les chirurgiens, leur donne tout le matériel stérile et les habille.

Pendant l’opération

Au bloc, l’Ibode rappelle régulièrement au chirurgien depuis combien de temps le garrot électropneumatique est gonflé afin de ne pas dépasser la durée maximale fixée à deux heures. Elle répond à tous les besoins qu’exprime le chirurgien. L’Ibode doit remplir des documents administratifs : la feuille d’écologie (qui donne toutes les informations sur le déroulement de l’intervention, heure d’arrivée et de départ, les personnes de l’équipe…) et le cahier de traçabilité des dispositifs médicaux implantables (date, identité du patient, indication opératoire, nom du matériel, son numéro de lot, sa date de péremption…).

Au réveil

Pendant le réveil du patient, une infirmière des soins de suite post-intervention (SSPI) surveille régulièrement la coloration pulpaire ainsi que la motricité et la sensibilité des orteils du patient. Elle lui administre un antalgique classique, l’opération n’étant pas très douloureuse. Elle veille à ce que sa jambe soit un peu surélevée.

Après l’opération

Le patient reste hospitalisé deux à quatre jours selon le type de fracture et l’âge du patient (un à deux jours en cas de traitement orthopédique).

→ L’équipe chirurgicale passe voir le patient tous les jours. Une infirmière doit vérifier plusieurs fois par jour si la douleur du patient est bien prise en charge, s’il n’existe pas de complications post-opératoires (compression sous plâtre, thrombo-phlébite, infections…). Elle injecte chaque jour au patient un traitement anticoagulant pour prévenir les thrombo-phlébites liées à l’immobilisation du membre inférieur. Le kinésithérapeute apprend le patient à béquiller sans appui durant son hospitalisation.

→ Le patient sort sur décision du chirurgien avec son traitement de sortie, les consignes, une ordonnance pour que la famille puisse acheter des cannes anglaises. À son domicile, il fait appel à une infirmière libérale, d’une part pour ses injections quotidiennes d’anticoagulant pendant toute la durée d’absence d’appui du pied et, d’autre part, pour sa prise de sang hebdomadaire (contrôle de la coagulation par l’analyse des plaquettes).

REPÈRE

Vous avez dit gypsothérapeute ?

→ Ce terme savant désigne celui qui était autrefois appelé « plâtrier » dans les établissements de santé. La référence au plâtre figure indirectement dans le mot, le gypse étant le minerai qui sert à le fabriquer.

→ De nos jours, le plâtre n’est plus le seul matériau utilisé pour réaliser une immobilisation. Résines, plastiques thermoformables, polyuréthanes… font partie de l’arsenal. Les techniques ont, elles aussi, évolué. Tout comme le profil des gypsothérapeutes, qui sont aujourd’hui majoritairement des infirmières, alors qu’il y a 20 ans, on trouvait principalement des aides-soignantes. Le déclic ? Un décret de 2004, qui a délégué, noir sur blanc, aux infirmières cet acte médical.

→ L’infirmier peut ainsi participer à la pose de systèmes d’immobilisation après réduction. Il peut les poser sur prescription médicale à condition que le médecin puisse intervenir à tout moment. Il peut réaliser l’ablation des dispositifs d’immobilisation et de contention et poser des bandages de contention sur prescription médicale ou suivant un protocole écrit signé par un médecin. Enfin, dans le cadre de son rôle propre, l’infirmier peut rechercher des signes de complication pouvant survenir chez un patient porteur de tels dispositifs.

→ L’Association hospitalière des gypsothérapeutes de France (AHGTF) milite pour la promotion d’une formation obligatoire suffisamment longue et pour la promotion de la qualité des soins dans ce domaine. Certains établissements comme le centre hospitalier de Mulhouse ont un pool dédié de gypsothérapeutes.

« Cela permet un suivi du patient par le gypsothérapeute dès son arrivée aux urgences jusqu’au bloc opératoire, puis pendant l’hospitalisation, et lors des consultations de suivi post-opératoire », souligne le président de l’AHGTF, Arnaud Labaude.

Source : AHGTF, décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004.