Vertiges de l’art brut - L'Infirmière Magazine n° 356 du 01/01/2015 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Magazine n° 356 du 01/01/2015

 

ZOOM EXPOSITION

RENDEZ-VOUS

CATHERINE FAYE  

Dès la première salle, on est comme aspiré par le vent. Un dessin du Japonais Yuichi Saito vous accueille, aussi déconcertant que captivant : des traits au stylo, sortes de vagues, grappes chevelues, formes aux multiples interprétations. C’est par cette abstraction que débute le voyage initiatique. Une promenade entre conscient et inconscient à travers 400 œuvres – dessins, peintures, sculptures, photographies, assemblages… – de 200 artistes. L’exposition est une plongée dans le monde de l’art brut que Jean Dubuffet, l’inventeur du concept, décrivait comme une « opération artistique toute pure, brute, réinventée dans l’entier de toutes ses phases par son auteur ». Guéridon bancal, flotte aérienne en carton, épopées célestes, labyrinthes chiffrés, formes hybrides, talismans de protection… « Pour nous, ces œuvres sont des supports de rêve extraordinaires. Pour ces créateurs, elles sont vitales, elles ne constituent pas une production artistique, elles sont un discours mental », précise Bruno Decharme, dont la collection d’art brut est la plus importante au monde. Les créateurs ? Des patients d’hôpitaux psychiatriques, des solitaires, des détenus, des marginaux de toute sorte. Des artistes autodidactes, aux œuvres originales et subversives. Toute la palette des désordres intimes ou collectifs y est incarnée. Pleins, vides, tracés minuscules, formes délicates ou grossières, noir et blanc, couleurs criardes s’attellent à conjurer le sort, panser la douleur, contenir le chaos. Dans cette interaction entre art, psychanalyse, spiritualité, anthropologie, l’expression de l’humanité est à son comble.

« Art brut/Collection abcd ». La Maison rouge, jusqu’au 18 janvier 2015.